Face au drame et l’ignominie que vivent les israéliens depuis samedi dernier, nos petites histoires provençales, nos coups de gueule et aussi notre mauvaise fois ne pèsent plus grand chose. Elles apparaissent comme incongrues et terriblement mal à propos. Le cœur n’y est plus.
C’est la raison pour laquelle, en accord avec la rédaction en chef de l’Echo du Mardi, cette semaine votre chronique marquera une pause. Nous le faisons en mémoire de tous ceux qui sont mort sous les balles de ces criminels. Et l’escalade nous fait craindre que le pire est à venir. Nous n’oublierons pas non plus les autres drames que notre monde vie aujourd’hui, que ce soit en Ukraine où la guerre s’installe dans son 18ème mois ou plus récemment la situation des arméniens dans le Haut-Karabakh.
Non le cœur n’y est vraiment plus.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Alors que la Russie a annoncé lundi 17 juillet son retrait de l’Initiative céréalière de la mer Noire – un accord signé avec l’Ukraine, la Turquie et les Nations unies pour permettre la poursuite des exportations de céréales ukrainiennes malgré la guerre – la carte ci-dessus donne un aperçu de l’importance de ces flux agricoles à l’échelle mondiale.
L’invasion de l’Ukraine par la Russie a entraîné une hausse significative des prix des denrées alimentaires sur les marchés mondiaux, et en particulier des prix des céréales, étant donné le rôle joué par ces deux pays dans le commerce agricole international. Les « couloirs de solidarité » mis en place par l’Union européenne pour aider l’Ukraine à exporter ses produits agricoles et l’Initiative céréalière de la mer Noire (signée en juillet 2022) ont contribué de manière significative à la baisse des prix observée depuis la fin de l’année 2022.
Au total, l’an dernier, 90 pays ont importé des céréales (blé et autres) en provenance de ce pays déchiré par la guerre. Environ la moitié d’entre eux sont situés en Afrique et en Asie. La Roumanie voisine, peu touchée par les blocages des exportations maritimes de Kyiv, est devenue le premier importateur de céréales ukrainiennes en 2022 (devant la Chine).
Tristan Gaudiaut, Statista.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Selon le suivi des aides internationales promises à l’Ukraine de l’Institut d’économie de Kiel, la France se classe au 11e rang des pays fournissant le plus d’aides en valeur, avec un montant total annoncé de près de 1,5 milliards d’euros du 24 janvier 2022 au 31 mai 2023. Au cours de cette période, le soutien officiellement accordé par le gouvernement français a principalement été d’ordre financier (700 millions d’euros) et militaire (450 millions).
Comme le montre notre graphique, les États-Unis ont jusqu’à présent (et de loin) accordé le plus grand soutien à Kyiv, avec 71 milliards d’euros d’aides militaires, financières et humanitaires promises depuis le début du conflit. Un soutien qui représente le double en valeur de celui apporté par l’ensemble des institutions de l’Union européenne (auquel la France participe via sa contribution au budget de l’UE) : environ 35 milliards d’euros en incluant les aides financières de la Banque européenne d’investissement.
Si l’on regarde la contribution rapportée à la taille de l’économie, c’est l’Estonie qui arrive en première position, avec un montant accordé qui représentait 1,3 % de son PIB au cours de la période étudiée. La Lettonie (1,1%) et la Lituanie (1,0 %) complètent le podium. En comparaison, l’aide engagée par les États-Unis représentait 0,3% de son (important) PIB.
William Marx interviendra samedi 20 mai à 17h à l’Art Gallery, à l’Isle-sur-la-Sorgue sur le thème Littérature et philosophie. Il nous contera comment il a retrouvé des textes inédits de Paul Valéry (1871-1945). Lors de la conférence, donnée à l’occasion de Lire sur la Sorgue, William Marx interviendra aux côtés de Mazarine Pingeot. Il y présentera les ‘Cours de poétique de Paul Valéry, tomes 1 et 2 chez Gallimard tandis que Mazarine Pingeot présentera ‘Et la mort continue’ collection Disputatio aux éditions Mialet-Barrault.
Vous venez présenter à Lire sur la Sorgue les deux volumes de Cours de poétique de Paul Valéry parus dans la bibliothèque des idées chez Galimard. L’ouvrage prend sa source au gré d’un travail documentaire et d’analyse de trois ans qui fait écho à une surprise d’envergure avec la mise au jour d’inédits du poète-auteur-philosophe.
Une entrée au Collège de France et un héritage à transmettre Professeur au collège de France –tout comme vous qui y occupez la chaire de littératures comparées depuis 2019- Paul Valéry occupe la chaire de poétique de 1937 à 1945. Vous collectez une partie des feuillets et annotations ainsi que les transcriptions de la 1re et la dernière année de ses cours, soit plus de 2 500 feuillets analysés, qui dormaient depuis 50 ans à la bibliothèque de France.
Les inédits trouvés dans la bibliothèque littéraire de Jacques Doucet Alors que vous êtes sur le point de remettre l’ouvrage aux éditons Gallimard, un doctorant évoque la bibliothèque littéraire de Jacques Doucet. Vous connaissez bien ce fonds et en avez feuilleté le catalogue électronique, sans rien n’y repérer, lorsque l’étudiant vous signale que celui-ci est très incomplet et recèle, en fait, des écrits inédits référencés dans le catalogue manuscrit, sur le sujet qui vous intéresse ‘la poétique’. Là gisent les 16 retranscriptions des dernières leçons données par Paul Valéry au Collège de France en 1945.
En remontant cette nouvelle piste vous vous rendez compte que la correspondance entre le secrétaire de Paul Valéry et Gallimard fait également état d’un fonds d’archives chez ce même éditeur, pour lequel, d’ailleurs, vous êtes en train de finaliser l’ouvrage et dont certains éléments, mal référencés ont échappé à la vigilance de l’archiviste. Ce sont 12 nouveaux feuillets donnés la première année par Paul Valéry que vous découvrez avec stupeur –vous pensiez clore votre travail- et plaisir jubilatoire.
Finalement, vous retrouvez 28 leçons inédites Deux volumes seront donc nécessaires aux ‘Cours de poétique, tome 1 Le corps et l’esprit (1937-1945) et Cours de poétique, tome II, le langage, la société, l’histoire de (1940 à 1945), les deux tomes étant parus le 5 janvier 2023, pour intégrer vos nouvelles trouvailles -400 à 500 pages dactylographiées- et, enfin, nourrir deux ouvrages de références sur Paul Valéry. ‘Un authentique monument de la pensée pour le 20e et 21e siècle’ dites-vous.
Des cours oui mais de poétique ? Pas si sûr ! Et puis, si vous évoquez tout comme le poète et auteur Paul Valéry, le terme de Cours de poétique, c’est d’autre chose dont il est véritablement question même si la poétique fait partie des deux ouvrages, le véritable sujet n’est pas la poésie mais la connaissance de soi. Car toute sa vie, Paul Valéry se sera observé pour mieux se connaître et appréhender le monde avec la vision la plus claire possible et surtout la conscience la plus fine.
Le véritable axe de travail de Paul Valéry Nous découvrons la recherche existentielle de Paul Valéry, le véritable axe de recherche depuis ses 20 ans. Car oui, au gré de son travail de poète, il développe une pensée philosophique sur le fonctionnement de l’esprit, le rapport de l’esprit avec le corps et avec le monde. Paul Valéry a su s’observer, prendre de la distance avec lui-même, alors qu’il est en train de travailler, d’écrire. D’ailleurs, à l’orée de ses 50 ans, il reprend son travail de poésie : ‘La jeune Parque’, ‘Le cimetière marin’, ‘Le recueil Charme’… Il explique ‘qu’Ecrire une œuvre c’est transformer une matière pour transformer quelqu’un’. Vous, vous irez plus loin en complétant : ‘tandis que l’œuvre transforme le lecteur qui, pour y avoir accès, doit fournir un effort’. Ainsi, au cœur de son œuvre réside l’exigence intellectuelle.
L’observation de soi au travail Le poète travaille à partir de l’ensemble des données qui lui viennent : sa sensibilité, la mémoire, les émotions, des idées, pour mettre tout cela, prioritairement, en langage, comme un sculpteur, un ingénieur. Il faut alors donner la confiance aux mots pour qu’ils portent l’initiative. Mais il va au-delà de l’anthropologie de la pensée en observant comment la société travaille, en étudiant le pouvoir du langage, comment faire pour que les paroles comptent. Il s’adresse, ainsi, à l’ensemble de l’humanité.
Paul Valéry est un méta écrivain Il est celui que les écrivains lisent parce qu’il leur apprend à s’améliorer. Egalement, les scientifiques retrouvent Chez Paul Valéry des intuitions confirmées par les avancées de la science comme Jean-Pierre Changeux neurobiologiste, le plus grand neuroscientifique français et Olivier Oudé psychologue expérimental. Ce que porte Paul Valéry ? Un niveau d’exigence intellectuel, de rapport à la vérité et de confiance en la science, n’oublions pas qu’il était un grand ami d’Albert Einstein.
William Marx Né à Villeneuve-lès-Avignon en 1966, William Marx fait ses études à Marseille au lycée Thiers avant d’intégrer l’École normale supérieure en 1986. Reçu premier à l’agrégation de lettres classiques en 1989, il soutient sa thèse de doctorat en 2000 à l’université Paris-Sorbonne et son habilitation à diriger des recherches en 2005 à l’université Paris 8 Vincennes Saint-Denis. Il enseigne aux États-Unis et au Japon ainsi que dans plusieurs universités françaises avant d’être élu en 2019 professeur au Collège de France sur la chaire Littératures comparées.
Membre de l’Academia Europaea, lauréat de l’Académie française (prix Montyon en 2010), membre honoraire de l’Institut universitaire de France, ancien fellow de l’Institut d’études avancées de Berlin, titulaire de la chaire International Francqui Professor, régulièrement invité dans les universités étrangères, éditeur des œuvres de Paul Valéry et T. S. Eliot, il travaille sur l’évolution, dans la longue durée, des systèmes esthétiques et du statut de la littérature depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours et sur leur variation selon les cultures, avec des recherches portant entre autres sur la tragédie grecque et sur le nô japonais comme sur le modernisme européen. Parmi ses ouvrages, parus pour la plupart aux Éditions de Minuit et traduits en une dizaine de langues, figurent Naissance de la critique moderne (2002), Les Arrière-gardes au XXe siècle (2004), L’Adieu à la littérature (2005), Vie du lettré (2009), Le Tombeau d’Œdipe (2012), La Haine de la littérature (2015), Un savoir gai (2018), Vivre dans la bibliothèque du monde (2020) et Des étoiles nouvelles (2021) et les deux volumes de Cours de poétique volumes 1 et 2 de Paul Valéry parus dans la bibliothèque des idées chez Galimard.
Le collège de France Le Collège de France promeut et enseigne la recherche en train de se faire dans les sciences, les lettres et les arts. Cours, séminaires et colloques sont ouverts à tous et gratuits. En savoir plus ici.
L’interview
Quand et comment avez-vous rencontré la littérature ? «Mon grand-père maternel, Jean Marx qui était médecin à Avignon, et son cabinet se situait en face du nouveau Conservatoire de musique. Il était aussi musicien et poète à ses heures perdues dans sa demeure de Villeneuve-lès-Avignon. Ainsi, j’ai toujours été entouré de livres. De plus, j’avais bourse ouverte auprès de mes parents lorsqu’il s’agissait d’acheter des livres. J’habitais à la Cité radieuse à Marseille et allais tous les samedis à la librairie, mais je n’avais personne pour me conseiller d’acheter des livres. A 10 ans, j’ai commencé à lire le Discours de la méthode de Descartes, le Banquet de Platon. Je ne suis pas sûr d’avoir vraiment saisi de quoi il retournait… Aussi les traductions d’Horace le poète latin. Et puis, à un moment, mon voisin qui était professeur de lettres, également mon professeur de grec et aussi le père d’une de mes copines d’école, m’a orienté. C’était un environnement favorable, car nous étions poussés à lire et j’ai lu, tout de suite, de la grande littérature.»
Pourquoi vous être intéressé à Paul Valéry ? «C’est aussi une histoire d’adolescence. J’avais ma propre radio dans ma chambre et j’écoutais France culture. J’ai possiblement abordé Paul Valéry par une ‘dramatique’ car l’auteur avait écrit des dialogues inspirés de Platon et Socrate dans une mise en onde –magistralement interprétée par la Comédie française- d’Eupalinos ou l’architecte’, l’un des plus beaux textes de Paul Valéry. Il est d’une poésie folle, d’une profondeur de pensée… J’étais à l’âge de 9 ou 10 ans passionnément intéressé par l’antiquité classique. C’est donc par là que je suis ‘entré’ dans l’oeuvre de Paul Valéry.»
Quels sont les écrits qui vous ont le plus marqué, inspiré, bouleversé chez lui et pourquoi ? «J’ai lu ‘la soirée avec monsieur Teste’, un texte étonnant, très court mais d’un esprit plongeant en lui-même. J’étais un enfant introverti et donc fasciné par cette puissance de la langue et de la pensée. Paul Valéry est pour moi un amour d’adolescence qui est resté. Sa poésie, évidemment avec ‘Charme’, ‘La jeune Parque’. Ce qui me frappe c’est l’intelligence absolue de cet auteur, de cet écrivain. Il était considéré, par tous les gens qui l’ont fréquenté, comme un homme hors du commun avec une capacité de se regarder par lui-même et à théoriser tout ce qui était autour de lui. Personne ne l’avait fait avant et de cette manière : Pouvoir formuler en termes exacts et très précis des pensées très complexes. Aujourd’hui les hommes politiques, les penseurs continuent de puiser des citations dans les écrits de Paul Valéry, parce que ces citations nous portent, nous font penser encore maintenant.»
Si vous n’aviez été ni professeur, ni auteur, qu’auriez-vous aimé être ? «J’ai longtemps voulu ‘faire’ des neurosciences, travailler sur le cerveau. J’avais un oncle psychiatre et psychanalyste. Je n’aurais pas voulu être psychanalyste mais travailler sur le cerveau m’aurait bien plu. J’ai la chance, au Collège de France, de pouvoir fréquenter des collègues qui éclairent sur cette matière comme Jean-Pierre Changeux avec lequel j’animerai un colloque en juin.»
Quelles sont les personnalités qui vous touchent le plus et pourquoi ? «Les compositeurs de musique et les écrivains comme Orhan Pamuk que j’accueille au Collège de France, prix Nobel de littérature, un des plus grands romanciers vivants et aussi Philippe Sollers qui vient de nous quitter. Tous les écrivains que je connais ont une connaissance de la littérature de l’intérieur, du fonctionnement des choses. Il n’y a pas de grand écrivain qui ne soit en même temps un penseur et un lecteur de la littérature. Ils ont à apporter des choses aux autres, aux savants des lettres. Les discussions avec eux sont tout à fait fascinantes.»
Côté musique ? «J’ai deux amours dans la vie : la littérature et la musique classique. Un jour j’aimerais écrire sur Schubert, mon compositeur préféré avec Bach et la musique française avec De Bussy et Ravel. Schubert est mort à 30 ans, en laissant une œuvre extraordinaire écrite la dernière année de sa vie. Qu’est-ce qu’il aurait encore pu écrire s’il était resté ?»
Quelle analyse faites-vous de la littérature d’aujourd’hui ? Comment percevez vous leslecteurs ? «Ce qui m’inquiète ? Les jeunes lisent de moins en moins. Il y a un véritable enjeu à faire redécouvrir l’effort de la lecture. C’est vrai qu’il y a beaucoup de concurrence avec les écrans, les video-games, les réseaux sociaux, les séries télévisées qui happent même mes collègues universitaires. Ces séries sont addictives pour tout le monde. J’ai trouvé cela passionnant, mais j’ai arrêté car si je les regarde, je ne lis plus. Que peut faire la littérature face à cette énorme attraction ? Comment faire comprendre à la jeunesse que lire en soi c’est absorber pour former ses propres images ? C’est ne pas être passif. La lecture c’est poursuivre un effort. Nous sommes dans un monde qui adore les sportifs –les footballeurs- mais pourtant, je vois les jeunes en trottinette électrique… »
Pourquoi arrêter l’effort ? « Car c’est la même chose pour le corps et l’esprit. Nous sommes là pour entraîner notre esprit. Paul Valéry voyait déjà dans les années 1920, 1930, notre esprit accaparé par tous les moyens de communication comme le cinéma et la radio et déjà, s’inquiétait du futur de la littérature. La littérature est un sport intellectuel, un outil de développement personnel qui nous maintient en vie. Qui nous octroie une capacité de penser, d’imaginer, de verbaliser. En même temps je suis fasciné par les réseaux sociaux. Les influenceuses, les jeunes-filles dans les banlieues, les femmes qui décrivent leur vie, avec leurs mots. Elles n’ont pas accès à l’édition et, pourtant, sont lues par des milliers de personnes. Ces productions de la jeunesse existent. Il faut tirer parti de cela, mais rien ne remplacera le contact direct d’une personne avec un texte sur du papier.»
Le héros d’aujourd’hui ? « Volodymyr Zelensky. Le parcours de cet homme est sidérant. J’ai une immense admiration pour lui. Je ne pense pas être le seul à le penser. Nous sommes tous touchés par ce qui se passe en Ukraine. Cet acteur dont Poutine ne donnait pas cher, et qu’il pensait être un simple clown, gère son pays avec un sens de la communication incroyable. Il n’avait pas un parcours tracé d’avance. La chaîne télévisuelle Arte a diffusé des épisodes de sa série ‘Serviteur du peuple’. Je l’ai regardée. »
Qu’est-ce que vous aimez le plus dans notre monde, ce qui vous effraie aussi ? «Ce que j’aime le plus au monde ? C’est de vivre, exister. Ce qui m’angoisse ? Le changement climatique mais ce qui m’inquiète le plus c’est la folie humaine. C’est Poutine qui attaque l’Ukraine sans aucune obligation. Toute notre attention… Beaucoup d’argent est focalisé sur l’armement alors que nous aurions beaucoup d’autres choses à faire pour sauver la planète. Je trouve cette situation monstrueuse et criminelle. Ces grands criminels à la tête des états, c’est monstrueux. »
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Dans le cadre du Printemps des poètes, le cinéma Utopia diffusera lors d’une séance unique le documentaire « Choubaï, parler à nouveau », ce vendredi 17 mars à 17h45. La projection sera suivie d’une session questions-réponses avec le réalisateur du film, Mykhaïlo Kroupievskyï et l’artiste et traductrice, Kseniya Kravtsova.
La poésie a rarement un destin heureux dans les régimes totalitaires… Celle de Choubaï fut interdite avant même qu’elle ne rencontre son public. Réalisé par Mykhaïlo Kroupievskyï, le film documentaire « Choubaï, parler à nouveau » plonge le spectateur dans cette période dramatique. Acteurs, écrivains, peintres, musiciens et poètes, pour ce film le réalisateur réuni celles et ceux qui ont côtoyé Choubaï pour qu’ils le racontent. Entre documentaire, fiction et pièce de théâtre, le film est composé de traces qui ont appartenu à l’artiste (icônes, livres, photos, peintures). L’acteur Serghiï Ghadan incarne à l’écran le poète avec un incontestable magnétisme. Pas-à-pas, le spectateur fait connaissance avec « Grytsko » Choubaï, ses réflexions sur la nature des choses et des êtres qui dépassent largement les frontières de sa culture et de son époque.
Le cinéma Utopia propose de découvrir ce film documentaire projeté pour la première fois en France, vendredi 17 mars à 17h45. En plus de son inscription dans le cadre du Printemps des poètes, cette diffusion s’inscrit dans le long travail effectué par Kseniya Kravtsova pour faire découvrir la poésie de Choubaï aux Français, mais également aux Ukrainiens. En effet, si les enfants de Choubaï, Solomiya et Tars, sont connus du peuple ukrainien, le poète, décédé à l’âge de 33 ans, ne l’est que très peu.
Résumé : « Figure phare de la ‘génération condamnée’ en Ukraine, Ghryghoriï Choubaï est une étoile fugace qui a éclairé l’horizon sombre de son époque. Agé d’à peine 20 ans, Choubaï arrive à Lviv à la fin des années 60. Sa poésie inspire la jeunesse et inquiète les bourgeois de la région. Il est fréquemment invité à lire ses œuvres dans les soirées, puis le couple de poètes-dissidents, Ighor et Iryna Kalynets le prennent sous leur aile. Avec ses amis, il lance alors la première autoédition du magazine littéraire et artistique ‘Skryniya’ (‘coffre’) dans lequel paraît son poème ‘Vértép’. En janvier 1972, le KGB commence une opération spéciale à l’encontre du journal. Choubaï, le couple Kalynets ainsi que d’autres représentants de l’intelligentsia ukrainienne sont arrêtés et condamnés à neuf ans d’emprisonnement. Il sera finalement relâché, mais sa vie se transforme en cauchemar. »
« Choubaï, parler à nouveau » de Mykhaïlo Kroupievskyï, séance unique le vendredi 17 mars à 17h45, à l’Utopia, 4 rue des esc. Sainte-Anne, Avignon.Durée 1h43 – VostFR.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Pour célébrer le Printemps des poètes, qui aura lieu du 11 au 27 mars, la Factory ouvre ses portes en solidarité aux artistes ukrainiens lors d’une soirée hommage au poète GrégoryChubaï, ce jeudi 16 mars à partir de 19h.
Initialement prévue le 6 janvier, puis reportée par manque de moyens financiers, cette soirée de soutien a pour objectif de faire connaître la culture du pays aux Français et permettre aux Ukrainiens de retrouver un peu de chez eux. Initiée par Kseniya Kravtsova, artiste plasticienne ukrainienne installée en France depuis 20 ans, et Laurent Rochut, directeur de la Factory, cette soirée est également l’occasion de faire en sorte que l’Ukraine ne soit pas réduite à son malheur actuel.
Intitulée « Dire, se taire et dire à nouveau », cette soirée rendra notamment hommage au poète Ukrainien Grégory Chubaï disparu à l’âge de 33 ans. Devenu chef de file de la poésie underground ukrainienne dans les années 70, ses textes seront interdits par les agents du KGB avant même qu’il ne soit connu des milieux littéraires. Pour faire découvrir son œuvre au plus grand nombre, Kseniya Kravtsova assura la lecture des poèmes en français et en ukrainien.
La soirée se poursuivra par un échange avec Svitlana Smirnova et Matthieu David, respectivement réalisatrice et chef-opérateur du documentaire « We are soldiers ». Le film, projeté à la suite de la session d’échange, suit le parcours de trois combattants ukrainiens volontaires, blessés au front lors de la guerre contre la Russie et les séparatistes du Donbass. Représentant trois générations, trois milieux sociaux et trois régions différentes, Dmytro, Anatolii et Oleksii se rétablissent à l’hôpital militaire de Kiev et essaient de penser à l’avenir.
Le concert reporté au mois de juillet
Cette soirée devait également accueillir Solomiya et Tars Chubaï, les enfants du poète, pour un concert de chants traditionnels ukrainien, mais malgré l’appel aux dons, notamment relayé dans nos pages, la somme nécessaire à leur venus n’a pas pu être récoltée à temps. Cependant, grâce à un important soutien d’Arsud, présidé par Michel Bissière, le concert est reporté au mois de juillet, durant le Festival d’Avignon. Cette nouvelle date permettra une meilleure visibilité des artistes. Contacté par notre rédaction, Kseniya Kravtsova explique que d’autres initiatives devraient se greffer à celle-ci.
Jeudi 16 mars à partir de 19h au Théâtre de l’Oulle, 19 place Crillon, Avignon. Billetterie solidaire en cliquant ici.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Initialement prévue le 6 janvier au Théâtre de l’Oulle, la soirée de soutien aux artistes ukrainiens est reportée au 16 mars, par manque de moyens financiers. Kseniya Kravtsova, artiste à l’initiative de l’évènement, lance un appel aux dons.
La soirée était initialement prévue le 6 janvier, jour de célébration de Noël en Ukraine, au Théâtre de l’Oulle. Initiée par Kseniya Kravtsova, artiste plasticienne ukrainienne installée en France depuis 20 ans, et Laurent Rochut, directeur de la Factory, la soirée en solidarité aux artistes ukrainiens est reportée au 16 mars, par manque de moyens financiers.
Pour cette soirée, les organisateurs ont décidé de faire venir des artistes ukrainiens afin de faire connaître la culture de ce pays aux Français et permettre de ne pas réduire l’Ukraine à son malheur actuel. La Factory a ainsi lancé un appel aux dons pour couvrir les frais de déplacement et d’hébergement des artistes. Pour l’heure, la somme nécessaire n’a pas été réunie.
Kseniya Kravtsova renouvelle donc l’appel aux dons, « comme toute bonne initiative, nous sommes obligés de tenir compte du côté pragmatique et pratique des choses. J’invite vivement les gens qui souhaiteraient participer à la soirée à faire l’acquisition du billet, car ce sont ces fonds qui nous permettront de faire venir les artistes en France ».
L’acquisition du billet pour assister à la soirée s’effectue sous forme de don via helloasso. La plateforme propose de choisir entre un montant libre ou parmi quatre montants : 20€, 50€, 100€ et 250€. En plus d’accéder à plus ou moins de moments de la soirée selon le montant du don, des contreparties supplémentaires sont proposées comme une journée de stage théâtrale à la Factory.
L’artiste peintre, sculptrice et photographe poursuit, « les personnes qui peuvent se manifester en dehors de la plateforme de collecte de dons, pour par exemple héberger ou offrir le repas aux artistes sont les bienvenues. Toute aide est précieuse. La plateforme de collecte de dons est importante, mais si des personnes se manifestent pour d’autres soutiens possibles, nous sommes ouverts ».
Soirée de soutien aux artistes ukrainiens le 16 mars à partir de 18h au Théâtre de l’Oulle. Pour accéder à la plateforme de collecte des dons permettant l’accès à la soirée, cliquez ici.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Depuis que la guerre a éclaté en Ukraine en février dernier, les services de l’État et la préfecture de Vaucluse se mobilisent afin d’accueillir les réfugiés ukrainiens dans de bonnes conditions. Plusieurs dispositifs ont été déployés pour leur permettre l’accès au logement, au droit, à la santé, à la scolarisation des enfants, à la langue française et à l’emploi dans une logique d’insertion.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, 1218 personnes ont été accueillies en Vaucluse, dont 710 qui ont été hébergées dans des dispositifs collectifs, 182 qui ont été logées, 266 élèves ont été solarisés, et 229 personnes ont été inscrites à Pôle emploi.
Afin que l’accueil des réfugiés ukrainiens se passe dans des conditions optimales, l’État a financé 3,7 millions d’euros pour l’accompagnement et l’hébergement collectifs des ménages ukrainiens, 116 050 d’euros pour l’accompagnement des personnes dans le logement, ainsi que 62 000 d’euros pour l’apprentissage linguistique.
La protection des réfugiés
Le dispositif de protection temporaire, mis en place dans les pays de l’Union européenne, octroie aux personnes fuyant la guerre en Ukraine, un statut temporaire de réfugiés, leur permettant de séjourner légalement sur le territoire français, pour une durée maximale de 3 ans, avec des autorisations provisoires de séjour d’une durée de 6 mois renouvelable.
À ce jour, le bureau de l’immigration et de l’asile de la préfecture de Vaucluse a délivré 1184 autorisations provisoires de séjour, 770 en première demande et 414 en renouvellement.
L’hébergement
Trois dispositifs permettent l’hébergement des Ukrainiens : l’hébergement collectif, l’accueil citoyen et le logement individuel. Un accueil de jour a été installé au 6, boulevard Limbert à Avignon. Ouvert six jours sur sept, il représente le premier lieu d’accueil et de contact en Vaucluse pour les réfugiés.
Les Ukrainiens sont ensuite guidés vers un des cinq logements collectifs situés à Avignon, Carpentras, Orange, Cavaillon et Apt. 345 Ukrainiens sont accueillis en hébergement collectif à ce jour. Près de 700 personnes en ont bénéficié dans le département depuis le début de la crise. L’État a financé 3,7 millions euros pour l’ensemble des dispositifs d’hébergement collectifs
Une fois la situation des ménages stabilisée, il est proposé aux Ukrainiens une solution plus perenne vers un accès au logement. Actuellement, 182 déplacés ukrainiens ont été orientés en logement en Vaucluse. L’État a financé 116 050€ pour ces mesures d’accompagnement.
La langue française
La direction départementale de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) a organisé plusieurs ateliers socio-linguistiques, notamment sur les sites de Carpentras et d’Orange, afin de proposer des sessions intensives d’apprentissage de la langue française aux réfugiés.
Dans le cadre de l’accès à l’emploi, Pôle emploi s’est mobilisé pour organiser des formations spécifiques d’apprentissage de la langue à visée professionnelle. Pour permettre cet apprentissage, l’État a financé 62 000€ au niveau local.
L’emploi
Autre facteur essentiel d’intégration pour les réfugiés, qui sont relativement diplômés et disposent d’un bon niveau d’éducation : l’emploi. Afin de les accompagner au mieux, Pôle emploi a renforcé ses équipes dans le but de répondre aux besoins des Ukrainiens en matière de formations spécifiques à visée professionnelle.
L’école
Trois unités pédagogiques pour élèves allophones nouvellement arrivés ont été déployées par l’éducation nationale afin d’accueillir au sein de plusieurs établissements les enfants ukrainien : au collège Raspail à Carpentras, qui accueille 23 élèves ukrainiens, au lycée Fabre à Carpentras qui en accueille 14, et au collège Gionot à Orange qui en accueille 19. Une nouvelle unité devrait s’ouvrir à Orange en 2023.
Les droits
Les associations et opérateurs de l’État pour l’accompagnement social des ménages ukrainiens œuvrent ensemble afin de permettre une ouverture rapide des droits et les aider dans toutes leurs démarches administratives. L’association Entraide Pierre Valdo et la société Adoma sont mobilisées pour le suivi en hébergement collectif. Cap Habitat, Soligone, Habitat Humanis, Le Village, Rhéso, Cité Caritas, sont quant à elles chargées de l’accompagnement dans le logement.
Toutes ces associations travaillent en relation avec la Caisse d’allocations familiales (CAF) et la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) afin de faciliter l’ensemble des démarches administratives auprès de ce public. À ce jour, 1093 droits ont été ouverts à la CPAM.
La santé
Dès l’arrivée des premiers réfugiés ukrainiens, l’Agence régionale de Santé (ARS) s’est mobilisée et a constitué des équipes pour réaliser des bilans de santé flash et assurer le suivi médical des personnes. En tout, 249 évaluations de santé ont été réalisées par l’ARS.
Et en 2023 ?
Comme cette année, l’accès à l’emploi et à l’apprentissage du français, et la scolarisation des enfants demeureront essentiels pour l’insertion des réfugiés.
Les services de l’État continueront à se mobiliser afin de stabiliser l’hébergement collectif et permettre aux ménages ukrainiens d’accéder à des logements individuels, autant que possible, pour ceux disposant de ressources.
V.A.
Face à l’horreur, le cœur n’y est plus
Le vendredi 6 janvier prochain, le Théâtre de l’Oulle à Avignon va accueillir la soirée ‘Noël d’Ukraine’, à l’initiative de Laurent Rochut, directeur de la Factory, et Kseniya Kravtsova, artiste ukrainienne vivant en France depuis 20 ans.
Si le réveillon de Noël chrétien est célébré le 24 décembre, en Ukraine il vient 13 jours après, c’est-à-dire le 6 janvier selon le calendrier orthodoxe. Ainsi, le Théâtre de l’Oulle, situé à Avignon, va accueillir une soirée spéciale.
Cette soirée, elle a notamment été possible grâce à Kseniya Kravtsova, une artiste ukrainienne arrivée en France il y a deux décennies, mais pas seulement. « Ça a été un réel travail d’équipe, explique-t-elle. Dès le départ, j’ai pu organiser cet événement uniquement parce que j’étais entourée. » C’est grâce au metteur en scène Noam Cadestin qu’elle fait la rencontre de Laurent Rochut, directeur de la Factory, qui est immédiatement séduit par l’idée de cette soirée.
Un appel aux dons pour accueillir les artistes ukrainiens
Pour cette soirée, les organisateurs ont décidé de faire venir des artistes ukrainiens afin de faire connaître la culture de ce pays de l’Europe de l’Est aux Français. Pour ce faire, la Factory a lancé un appel aux dons pour permettre aux artistes de se déplacer. Ces dons devraient couvrir les frais de voyage et d’hébergement. La Factory propose de choisir un montant libre ou parmi quatre montants : 20€, 50€, 100€, ou 250€. Selon le montant du donateur, il aura accès à plus ou moins de moments de la soirée.
Depuis que la guerre a éclaté en Ukraine en février dernier, de nombreux artistes ont échangé les outils de leur création contre des armes. Ce projet a donc pour objectif de rallumer la flamme qui sommeille en eux et leur permettre de pratiquer de nouveau ce qui les anime : leur métier. « Je fais un parallèle avec les confinements, durant lesquels les artistes n’étaient pas considérés comme essentiels, et donc ne pouvaient pas se produire et atteindre leur public, alors que les gens ont besoin des artistes qui leur apportent du réconfort, un moyen de s’évader par l’image, par le son, ou autre », explique Kseniya Kravtsova.
Une soirée pour rapprocher les deux nations
L’événement ‘Noël d’Ukraine’ a un double objectif : permettre aux personnes réfugiées en France d’entendre un artiste de leur pays d’origine, mais aussi de permettre aux Français de comprendre qui sont les Ukrainiens. L’occasion idéale de découvrir une nouvelle culture, qui se veut joyeuse, colorée et chantante.
Cette soirée, elle n’a pas pour but de ressasser le malheur qui frappe le pays, mais de passer un moment convivial dans la joie et la bonne humeur. « Quand on évoque l’Ukraine, les gens tournent la tête, ils en ont marre qu’on les sollicite pour aider ceux qui sont en détresse parce qu’il y a de la détresse partout dans le monde, poursuit Kseniya Kravtsova. Je voudrais qu’on connaisse aussi l’Ukraine comme une locomotive au niveau culturel. »
Le programme
L’événement débutera en réalité en début d’après-midi, avec la projection du film sur la vie de Chubaï, un poète ukrainien et figure emblématique de la résistance. La projection sera sous-titrée en anglais uniquement. Pour y participer, il faut réserver sa place au préalable au 09 74 74 64 90.
À 18h, la soirée ‘Noël d’Ukraine’ débutera avec des lectures de poèmes de Chubaï en deux langues, suivis d’une rencontre avec les artistes, qui ne sont autres que les enfants du poète : Solomiya et Taras Chubaï. Seuls les contributeurs de la plateforme y seront conviés et se verront offrir un apéritif dinatoire avec quelques plats traditionnels ukrainiens à 19h. Cet apéritif sera suivi par les concerts des deux artistes. Pour terminer la soirée en beauté, les artistes proposeront de faire entendre quelques chants traditionnels de Noël ukrainien.