Le soleil a attendu la mi-février pour faire son apparition à Pont-Saint-Esprit et c’est pourtant dans le froid et les ténèbres d’une ancienne cave coopérative que nous avons rendez-vous. Dans la cour du 232 rue du Commando Vigan Braquet, sur l’enseigne Cave coopérative, premier indice, le mot opéra apparait en rouge. Dans la cour trône un ancien corbillard orné d’étoiles. Il faudra peut-être vivre l’enfer pour gagner le paradis ? Ready ?
Nous entrons dans l’ancienne cave coopérative qui n’est plus tout à fait elle-même. Nous poussons les rideaux rouges qui donnent, à leur tour, sur une très ancienne porte ouvragée indienne, la porte d’or. C’est ici que nous accueille un improbable trio. Il y a Pascal de Symbialys artiste scénographe, Christel Von Lindstat artiste lyrique et le Protektor Joël Aidinian le business angel féru d’arts martiaux. Un trio déjanté pour la création de l’univers le plus improbable de France… et peut-être même d’Europe.
Catapultés 150 ans en arrière
Sur les murs, des tentures inspirées de l’univers de Dante, mystiques et baroques, sont signées La ligne 29. Et la première à nous accueillir est ‘le diable au bois joli’. Nous voilà immergés dans le mouvement Steampunk. Steampunk ? Le style plutôt élégant et baroque mêle esthétique et technologie du 19e siècle à des éléments de science-fiction. Si vous pensez à l’ère victorienne et à Jules Verne vous avez tapé dans le mille. Les costumes et accessoires sont très recherchés et l’aventure se vit comme une très symbolique course au trésor. Nous voici transportés 150 ans en arrière, exactement l’âge de la porte indienne.
Un monde post-apocalyptique
Bien oui, si nous sommes ici c’est que nous sommes des survivants d’un univers qui s’est écroulé. Mais attention, tout y est métaphore, réflexion, voyage au centre de soi. Disposé à en savoir plus ? Les prétendants à ce voyage extraordinaire sont invités à revêtir eux-mêmes le style steampunk (Gentleman extraordinaire, les Mystères de l’Ouest, la Cité des enfants perdus…). Ils seront enchaînés par groupe de 5, mais on peut venir seul, à deux, voire trois et plus et dans ce cas, l’on rejoint d’autres invités avec lesquels l’aventure sera partagée. L’aventure ? Elle consistera physiquement à gagner quelques-unes des 40 salles, chacune donnant naissance à une atmosphère propre, garnie d’objets, d’art, faisant référence à d’autres mondes, aux éléments…
Entrez dans la spirale
Nous baignons dans un univers tantôt baigné de rouge, tantôt de bleu. Les anciennes cuves ont été savamment éventrées par Pascal de Symbialys, ingénieur en génie mécanique, pour en faire autant d’alcôves propres à délivrer un message sans cesse renouvelé. Nous empruntons les arches foliées en pointe. Mais de quels messages s’agit-il ? Symbialys ne veut pas trop le dire mais finit par lâcher ‘l’Enfer de Dante’. Nous sommes en plein dans la pensée médiévale. Dante n’est pas mort et voyage dans les mondes de l’au-delà. Cependant Pascal prévient. Ce sera pensé et réalisé à sa façon et l’on devrait sortir de là véritablement changé… Comme transmutés ! Un clin d’œil aux sociétés secrètes.
Inscape game
On nous prévient : Nous ne sommes pas dans un escape game mais dans un inscape game. La différence ? Pas de stress pour trouver la solution à une énigme et s’enfuir d’une pièce verrouillée mais un voyage intérieur pour laisser surgir du fond de soi un kaléidoscope de ce que l’on est vraiment et que l’on ignore. Ici, l’objectif n’est pas de s’échapper mais plutôt d’étudier un sujet à travers un parcours ludique. Ce sujet ? C’est nous ! Ce qu’il faudra chercher ? Un objet petit ou gigantesque qui mènera à l’alcôve suivante. L’aide est personnalisée, notamment par le maître du jeu. Évidemment son alter ego féminin, Christel Von Lindstat, n’en perdra pas une miette, elle qui fera frémir tout notre être au gré de vibrations sonores ascendantes, car des entrailles de la terre nous sommes appelés à rejoindre… la surface.
Et puis
Et puis après la promesse de cette apothéose, chacun sera libre de continuer à explorer ce qu’il aura laissé jaillir de l’expérience qui continuera sûrement son chemin une fois sorti de KavKop, prévient Pascal.
Qui sont-ils ?
Pascal de Symbialys (Pascal Simonutti) est artiste scénographe. Il est particulièrement touché par le style Steampunk –l’apocalypse a eu lieu dans les années 1900 et, en 2022 nous en sommes les survivants, conservant en héritages des objets de 1900 mis au goût du jour. C’est un ancien ingénieur en génie mécanique qui a trouvé la cave coopérative sur… Le Bon coin, comme bon nombre d’autres trouvailles comme le confessionnal désacralisé qui accueillera un Photomaton. Évidemment, en sortie, on pourra prendre un bon verre, un cocktail et, pourquoi pas, se restaurer d’une petite planche ?
Christel Von Lindstat
Christel Lindstat est artiste lyrique, professeur de musique ,animatrice en musicothérapie et chef de cœur. Elle décroche la médaille d’or de chant et d’art lyrique au Conservatoire d’Aix-en-Provence, organise des masterclass de chant lyrique en région Aquitaine, est professeur de musique et de chant à Laudun-l’Ardoise, les Angles, Montfavet, le Thor. Elle a participé à plus de 120 productions d’opéra, récitals, concerts avec des orchestres symphoniques et a enregistré plusieurs CD. Elle a mené des projets thérapeutiques avec la School of visual arts de New-york, a été lead voice du groupe Opus Doria, a fait la préparation vocale des patientes et du personnel infirmier participant du film Camille Claudel de Bruno Dumont avec Juliette Binoche à Montdevergues en 2013. Elle est maître praticien en hypnose Ericksonienne et psychothérapeute.
Le Protektor
Le protektor c’est Joël Aidinian, costume noir et ailes blanches. Un business angel qui démarra sa carrière en tant que programmeur informatique dans sa propre société et connut une belle réussite avec la vente d’un logiciel auquel il consacra 28 ans de sa vie et qu’il revendit dans 10 pays. Il a vendu son entreprise en 2018. « Je me suis retrouvé avec des fonds. Je suis aussi un homme de terrain et pour moi l’argent est une énergie qui doit circuler. J’ai réinvesti dans des magasins Centrakor. J’ai revendu un de mes magasins et, avec le Crédit Mutuel, nous nous sommes lancés dans le projet. La vie c’est explorer des voies, avec l’expérience on mesure les risques un peu mieux. L’investissement ? Il est dans la salle, le lieu. Le plus important ? C’est d’être multi produits : Inscape game, concert d’opéra underground, team building, boutique en ligne. Un chef d’entreprise se projette à 5 ans. Il devine les besoins du marché pour être prêt lorsque ceux-ci apparaissent.»
La petite histoire ? Joël Aidinian rencontre Pascal Simonutti sur un tatami d’où découlera une solide amitié. Ensemble, ils évoqueront l’art, la philosophie et la spiritualité. Il est celui qui finance presque en totalité l’aventure.
Interview
«On a senti que la Chaise-Dieu* –leur précédente aventure en Auvergne- touchait une cible, une sensibilité, à un besoin, analyse Joël Aidinian. Il fallait s’ouvrir à une dimension plus exceptionnelle. 1 300 m2 sont désormais exploitables. Si notre ressenti est le bon nous pourrons développer le concept sur deux autres niveaux. Au tout début ? Pascal avait créé un magasin à Lyon, sur les quais de la Saône. Il s’appelait Symbialys. Il était déjà dans cette ambiance d’art déjanté, typé Steampunk, Orient, Indien. Puis il est parti à la Chaise-Dieu où il a créé son cabinet de curiosité pour pousser l’aventure vers un escape game. Cependant la météo, peu propice à un développement touristique, empêchait le développement que nous souhaitions. Pascal a alors cherché un lieu plus ensoleillé.»
Dans une vie antérieure
Dans une vie antérieure, de 2013 à 2020, Pascal Simonutti s’était déjà immergé dans l’univers de l’escape game à la Chaise-Dieu* en Haute-Loire, dans une maison faisant face à l’abbaye millénaire érigée au XIe siècle. L’autruche en métal désormais en majesté dans l’allée principale de KavKov indiquait alors l’entrée de ce cabinet de curiosité, les yeux tout d’abord bandés, l’on descendait dans une crypte, où enfin libre de voir, l’on découvrait momies, squelettes, puis, gagnant les degrés d’un escalier, l’on découvrait les œuvres et sculptures d’amis artistes. Les deux dernières années l’aventure s’était changée en escape game, connaissant un franc succès. C’est dorénavant dans un terrain de jeu bien plus étendu que l’art de Pascal et de Christel Von Lindstat s’épanouira.
La chose étonnante ?
«Le Sud-Est, Marseille, Aix-en-Provence raffolent de l’escape game, souligne joël Aidinian. Nous sommes dans un secteur où la clientèle est réceptive, également proche de Lyon et Grenoble. Nous pensons que pour ces soirées d’exception les personnes n’hésiteront pas à se déplacer. Nous nous adressons à une clientèle qui se pose des questions, qui cherche un sens à sa vie. Un mixte entre du jeu et du développement personnel. Ceux qui viendront interrogent sur ‘Où en suis-je de ma vie ?’ La clientèle ? C’est une femme de 35 ans qui amènera son mari, ses copines, ses copains. Elle est la locomotive du projet. Nous pensons –hypothèse basse- embaucher 5 salariés sans compter les musiciens. Nous n’avons pas de référentiel car ce lieu est atypique à la fois inscape game, galerie d’art et salle de concert pour opéra underground. Le modèle, qui n’existe pas, ne convient pas aux investisseurs friands de benchmarking (analyse comparative) de scoring (notation) puisqu’ils ne peuvent pas asseoir leur décision sur un modèle existant.»
Dans l’air du temps ?
«Mais ce qui fait peur, inversement, si le ressenti, l’air du temps est le bon, peut engendrer des succès phénoménaux. Etre le premier en marketing installe durablement la marque. Et puis l’autre volet est de fortement développer le team building (cohésion d’équipe). Il s’agira d’accueillir des entreprises qui, au lieu de faire ramper leurs équipes dans la boue et d’être dans la compétition, vivrons ensemble, une émotion. En conclusion ? C’est le premier pas qui compte, après la vie vous emmène. Dans un premier temps nous n’ouvrirons que le samedi soir pour l’inscape game, puis, dans six mois, en semaine, pour la galerie d’art et des concerts underground reprenant les chefs d’œuvres et mélodies de Mozart à Nina Hagen.»
Le bon moment et un lieu unique en Europe
«Nous avons vécu deux années difficiles : confinements, problématiques posées face à nos libertés. Suite à cela, beaucoup de gens se sont interrogés. L’immobilier dans les campagnes est pris d’assaut. Nous observons un changement des comportements et des questionnements de vie. Nous espérons, très modestement, proposer une voie, parmi des milliers d’autres, qui puissent être utiles à notre monde. Nous visons une clientèle européenne, un peu comme les soirées ‘Secret de cinéma’ où les gens viennent d’Europe pour y assister. Nous allons démarrer au plan local, régional, puis national, pour, à termes, toucher une clientèle européenne. Nous sommes dans un concept innovant, qui n’existe pas par ailleurs, alors on créé et l’on s’adaptera au marché. On teste, on y va et on rectifie pour répondre à la demande,» conclut l’homme d’affaires.
Les chiffres
KavKop propose 1300m2 et 40 pièces de surface de jeu qui sont les anciennes cuves. Le bâtiment propose deux autres étages. L’achat de la cave coopérative et les travaux frisent le million d’euros. A termes 5 salariés seront employés. La capacité de la salle est de 299 personnes. La durée d’immersion est de plus ou moins trois heures et le temps sur site de 5 heures.
Les infos pratiques
KavKop. le site www.kavkop.com sera accessible au 1er mars avec l’ouverture des pré vente le 31 mars. Tarif de lancement 49 € pour 3 h d’immersion.KavKop sera ouvert les vendredi et samedi soirs dans un premier temps de 18h30 à 23 h. Ouverture courant mai, le samedi soir. L’entrée sera ensuite à 69€ par personne. On est invité à venir déguisé en Steam punk (Gentleman extraordinaire, les Mystères de l’Ouest, la Cité des enfants perdus…) 232, rue du Commando Vigan braquet, 30130 Pont-Saint-Esprit. Contact 06 15 62 02 37.