27 juillet 2024 |

Ecrit par le 27 juillet 2024

Semaine de 4 jours : objectifs, organisation et impacts dans les entreprises qui l’ont testée

La semaine de 4 jours est expérimentée en France depuis quelques mois, dans le privé mais aussi dans la fonction publique. Les Editions Tissot ont analysé les accords collectifs de 4 entreprises qui l’ont testée. Quels sont leurs objectifs ? Comment se sont-elles organisées ? Quels sont les impacts de cette nouvelle organisation ? Les réponses d’Axel Wantz, juriste aux Editions Tissot, éditeur spécialiste du droit social.

Quels sont les objectifs poursuivis par les entreprises ayant mis en place la semaine de travail de quatre jours ?
De manière globale, les partenaires sociaux mettent en avant que cette nouvelle organisation du travail doit permettre de répondre aux besoins des salariés, en termes de santé et de qualité de vie et des conditions de travail (QVCT) et de l’entreprise, en termes d’organisation, d’implication, de compétitivité et de rentabilité.

Comment les entreprises se sont-elles organisées (bénéficiaires, durée du travail, rémunération) ?
Sauf exclusion spécifique, l’ensemble des salariés ont vocation à bénéficier de la semaine de quatre jours. En fonction des entreprises, les salariés intérimaires, les cadres en forfait jours ou les cadres dirigeants peuvent en être exclus. Notons cependant l’exclusion généralisée des alternants et des stagiaires.
La semaine de travail sur quatre jours n’emporte pas, de fait, une réduction du temps de travail hebdomadaire. Sur ce point, les accords analysés font état de deux tendances. La majorité des accords opte pour une réduction immédiate ou progressive de la durée du travail à 32 heures. A la marge, un accord retient toutefois une durée du travail égale ou supérieure à 35 heures, on parle à ce titre de compression du temps de travail. Pour rappel, le Code du travail fixe la durée hebdomadaire de travail à 35 heures.
La réduction du nombre de jours travaillés aboutit à augmenter la durée quotidienne de travail. Cette hausse peut varier entre 1h et 1h45 par jour. A noter que les entreprises restent tenues au respect des dispositions légales et conventionnelles relatives aux durées maximales de travail, aux durées minimales de repos, à l’amplitude journalière et à la pause.
En termes de rémunération, les partenaires sociaux affirment, sans exception, que les salariés concernés ne doivent subir aucune perte de salaire. Pour ce faire, les accords recourent à divers procédés : augmentation du taux horaire, maintien du taux horaire couplé d’un complément de rémunération…

Quels sont les impacts de cette nouvelle organisation de la semaine de travail (heures supplémentaires, congés payés) ?
Cette réorganisation du travail a conduit les négociateurs à prévenir ou neutraliser les effets que celle-ci pouvait emporter sur les congés payés et les heures supplémentaires.

les heures supplémentaires

La loi impose une contrepartie à l’accomplissement d’heures supplémentaires. Celle-ci prend alors la forme :

● d’une majoration de salaire de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires (de la 36e à la 43e heure) et 50 % pour les heures suivantes.
● ou d’un repos compensateur équivalent.

Les accords procédant à une réduction de la durée hebdomadaire de travail adoptent des positions différentes sur le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Et pour cause, la jurisprudence admet qu’une réduction corrélative n’est pas automatique. Cela suppose, en réalité, une disposition spécifique en ce sens. Dès lors, selon les accords, le seuil de déclenchement des heures supplémentaires peut être abaissé à compter de la 33e heure ou maintenu à la 36e heure.

En revanche, tous les accords ayant décidé d’abaisser ce seuil déclenchement retiennent des taux de majoration et des seuils d’application identiques, à savoir : 25 % à compter de la 33e heure puis 50 % à compter de la 44e heure.

● les congés payés

Une même logique ressort des trois accords abordant ce sujet : la semaine de quatre jours n’institue pas de nouveaux droits. Ainsi donc, avec ou sans mesures correctrices, les règles préexistantes sont maintenues : 30 jours ouvrables de congés payés. C’est-à-dire cinq semaines de six jours.

Axel Wantz, juriste aux Editions Tissot, éditeur spécialiste du droit social


Semaine de 4 jours : objectifs, organisation et impacts dans les entreprises qui l’ont testée

L’idée d’une semaine de travail de quatre jours continue de susciter l’intérêt, avec plus d’un travailleur français sur 5 (22 % contre 28 % au niveau monde) estimant qu’elle sera la norme dans son secteur d’activité dans les cinq prochaines années. C’est ce que révèle l’étude de l’ADP® Research Institute « People at Work 2023 : l’étude Workforce View » menée auprès de plus de 32 000 actifs dans 17 pays, dont près de 2 000 en France.

Par secteur d’activité, les salariés de l’industrie (31 %) sont les plus nombreux à affirmer que la semaine de 4 jours deviendra la norme, suivis par ceux de l’informatique et des télécommunications (27 %), de l’immobilier et du commerce (25 %). A l’inverse, les travailleurs des médias et de l’information ne sont que 15 % à faire cette projection.

Le maintien du salaire : un critère indispensable au déploiement de la semaine de 4 jours

Au-delà des projections, l’étude met en avant les préférences des collaborateurs en termes de flexibilité. Ainsi, 37 % des interrogés préféreraient travailler 4 jours par semaine, en conservant le même salaire, mais avec des journées de travail plus longues. Ce chiffre atteint 41 % chez les jeunes de 25-34 ans (contre 32 % des 18-24 ans), 40 % chez ceux qui pratiquent le travail hybride (contre 31 % chez ceux en 100 % télétravail) et 39 % chez les femmes (contre 35 % des hommes) et les parents (contre 34 % chez ceux qui n’ont pas d’enfant). Les salariés évoluant dans le commerce (44 %), l’hôtellerie-restauration (43 %) et les transports (41 %) en sont également particulièrement demandeurs, d’autant plus qu’il s’agit de secteurs dans lesquels le télétravail semble impossible à pratiquer pour la majorité des effectifs.

Le maintien d’un salaire identique reste un critère important dans la mise en place de la semaine de 4 jours, car seuls 9 % des interrogés accepteraient d’adopter ce type d’organisation pour un salaire moindre. En outre, dans le cas où ils ne pourraient pas être augmentés, la semaine de travail plus courte serait une alternative envisageable pour un quart des salariés (25 %).

Une part importante des salariés espère encore plus de flexibilité des horaires

Alors que les schémas classiques d’organisation du travail continuent d‘évoluer, 18 % des travailleurs français (contre 33 % au niveau monde) considèrent que, d’ici cinq ans, la norme dans leur secteur d’activité sera de bénéficier d’une flexibilité totale des horaires de travail (à condition qu’ils parviennent à remplir leurs missions au regard d’indicateurs de productivité et de résultats). Ce sont les salariés des secteurs de la finance (27 %), des médias et de l’information (24 %) et de l’industrie (23 %) qui sont les plus nombreux à le penser. Quant au modèle de travail hybride (présentiel et télétravail), il devrait devenir une pratique standard selon 16 % des travailleurs (28 % au niveau monde), une projection qui est encore plus visible chez ceux exerçant dans l’informatique et les télécommunications (31 %), la finance et les services (26 %).

Emergence d’une flexibilité des congés payés

Outre la semaine de 4 jours, d’autres options permettant de bénéficier de plus de temps libre devraient voir le jour d’ici les 5 prochaines années. A l’échelle mondiale, plus d’un quart des travailleurs (27 %) estime que, d’ici cinq ans, l’acquisition de jours de congés supplémentaires sera la norme. Ils ne sont que 11 % en France.

Et pour 18 % des collaborateurs dans le monde (10 % en France), il sera normal d’avoir la possibilité de réduire son salaire en échange d’un plus grand nombre de jours de congés annuels, tandis que 12 % (contre 7 % en France) anticipent que les congés illimités deviendront monnaie courante.

Les attentes dans ce domaine se révèlent plus élevées chez les jeunes travailleurs (respectivement 20 % et 14 % des 18-24 ans), ce qui laisse à penser qu’une nouvelle transformation des normes admises au travail se profile à l’horizon.

« Nous constatons toujours dans cette étude la demande pour un meilleur équilibre vie professionnelle-vie privée ; cette attente existe depuis longtemps mais cela s’est clairement accélérée depuis trois ans. Lorsqu’il n’est pas possible de proposer du télétravail ou un format de travail hybride, les employeurs peuvent répondre aux attentes de leurs talents par d’autres moyens, comme la mise en place de la semaine de 4 jours, pour les fidéliser et les motiver » estime Carlos Fontelas de Carvalho, Président d’ADP en France et en Suisse.

« Cependant, il est nécessaire de faire preuve de vigilance car les risques d’épuisement professionnel chez les salariés existent, que ce soit en travaillant sur des journées plus longues ou en devant réaliser leurs missions en moins de temps. De plus, il est évident qu’une semaine de 4 jours génère aussi des défis considérables en termes d’organisation du travail et du maintien du service et n’est pas réaliste dans de nombreuses organisations.

Ainsi, au-delà de ces nouveaux modes de travail, l’enjeu de rétention des talents passera par d’autres leviers comme le plaisir et l’épanouissement au travail, la progression des carrières et les opportunités de formation, très attendues notamment par les plus jeunes collaborateurs » conclut Carlos Fontelas de Carvalho, Président d’ADP en France et en Suisse.

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