22 juillet 2024 |

Ecrit par le 22 juillet 2024

Renforcement du télétravail : que risquent vraiment les employeurs ?

Le Gouvernement a annoncé qu’il allait renforcer le recours effectif au télétravail mais le protocole sanitaire n’a pas évolué sur ce sujet et permet même un retour un jour par semaine des salariés. Parallèlement une instruction prévoit de multiplier les contrôles. Alors où en sommes-nous et quels sont vraiment les risques pour un employeur qui ne généralise pas le télétravail pour tous les postes télétravaillables ?

Télétravail : quelles sont les recommandations actuelles ?
Le télétravail doit être la règle pour l’ensemble des activités qui le permettent. Il doit être de 100 % pour les salariés qui peuvent effectuer l’ensemble de leurs tâches à distance. Toutefois, depuis le 6 janvier 2021, un salarié peut demander à revenir en présentiel un jour par semaine, avec l’accord de l’employeur.

Bien que les mesures sanitaires aient été dernièrement renforcées, concernant notamment les distanciations sociales et les masques, et que le Premier Ministre ait annoncé le 29 janvier un recours effectif au télétravail renforcé, aucun changement n’a été apporté dans le protocole sanitaire sur le sujet du télétravail depuis le 6 janvier.
Dans l’instruction qu’elle vient de diffuser aux inspections du travail, la Direction générale du travail réaffirme très clairement que lorsque les tâches sont télétravaillables, elles doivent être télétravaillées. Le recours au télétravail peut être total si la nature des tâches le permet ou partiel si seules certaines tâches peuvent être réalisées à distance.

La possibilité de revenir en présentiel une journée par semaine afin de prévenir le risque d’isolement est conditionnée à la demande expresse du salarié. La DGT souligne qu’il faut être particulièrement vigilant au fait que cette possibilité ne soit pas à l’origine de rassemblements dans les entreprises à l’occasion de réunions de service ou de repas pris collectivement.

Télétravail : que risquent vraiment les employeurs qui ne jouent pas le jeu du télétravail ?
Il n’y a pas de sanction spécifique attachée à la non mise en place du télétravail.
Pour autant les employeurs qui ne jouent pas le jeu prennent des risques. En effet, en ne suivant pas ces recommandations, c’est tout simplement l’obligation de sécurité qui est mise à défaut.
Et cela peut conduire jusqu’à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur si un accident du travail ou une maladie professionnelle intervient. Or, lorsque le Covid-19 a été contracté par le salarié dans le cadre du travail, le caractère professionnel de l’infection au Coronavirus peut être reconnu.

Par ailleurs, les pouvoirs publics viennent d’annoncer une mobilisation particulièrement soutenue de l’inspection du travail dans les semaines qui viennent afin de remobiliser les entreprises suite à une baisse constatée du télétravail. L’idée est d’abord d’accompagner les entreprises et les partenaires sociaux mais aussi de contrôler le respect des mesures de prévention dont fait partie le télétravail et d’utiliser des « outils de coercition », si besoin, tels que la mise en demeure ou le référé judiciaire.

Les inspections du travail vont ainsi prendre contact avec les entreprises spécialement dans les secteurs où le télétravail est plus particulièrement applicable.
La vérification de la mise en œuvre du télétravail pour toutes les tâches télétravaillables sera aussi systématique lors de tout contrôle de l’inspection du travail. Les conditions d’information et de consultation du CSE seront également vérifiées. En effet, l’instruction rappelle qu’il importe que le CSE soit associé non seulement à la définition des tâches télétravaillables mais également aux modalités pratiques par exemple pour ajuster les horaires. Attention sur ce point au délit d’entrave qui peut monter jusqu’à 7 500€ d’amende…
Manquement à l’obligation de sécurité, mise en demeure, ou encore délit d’entrave… voilà donc les différents risques encourus si l’employeur prend trop à la légère ses obligations sur le télétravail.
Et si ce n’est pas l’inspection du travail qui débarque directement dans l’entreprise, les salariés et les élus, qui sont de plus en plus sensibilisés au sujet, pourraient aussi prendre contact avec l’inspection du travail. Il convient donc de bien réfléchir à ses choix…

Par Anne-Lise Castell

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot pour RésoHebdoEco 

Source : Instruction DGT relative aux orientations et aux modalités d’intervention du système d’inspection du travail dans le cadre des mesures renforcées de lutte contre la Covid-19, 3 février 2021

 

 

Anne-Lise Castell © Gilles Piel

Renforcement du télétravail : que risquent vraiment les employeurs ?

Lionel Canesi est le nouveau président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables. Associé du cabinet Wizziou, à Marseille, il a exercé de nombreuses fonctions syndicales et ordinales. Président du Conseil régional de l’Ordre de Provence-Alpes-Côte d’Azur depuis 2016, il a fait de sa région un laboratoire des solutions qu’il souhaite proposer à la profession.

Lionel Canesi milite pour faire reconnaître la place centrale des experts-comptables dans l’économie. Il considère que la voix des professionnels du chiffre doit être plus forte : « En tant que premier conseil des TPE/PME, nous sommes en permanence sur le terrain, en faisant bénéficier les chefs d’entreprise de notre expérience. Nous avons une crédibilité à porter les mesures gouvernementales ». Pour lui, « il faut que notre institution soit présente dans les médias pour faire de la pédagogie sur l’économie réelle ».
La crise sanitaire laisse beaucoup de dirigeants de petites et moyennes entreprises dans une situation difficile. Pour Lionel Canesi, les experts-comptables peuvent changer les choses, « en portant les mesures d’accompagnement avec conviction ». Il est convaincu que ces dernières ne seront sans doute pas suffisantes si les experts-comptables ne sont pas aux côtés des chefs d’entreprise : « Comment amorcer la reprise et comment éviter une crise sociale sans précédent sont pour nous des sujets fondamentaux de réflexion et d’action ».

« Il faut gagner du temps pour sauver un maximum d’entreprises. »

Faire la part entre solvabilité et viabilité

La trésorerie constitue une réelle préoccupation pour bon nombre d’entreprises, même si, pour le nouveau président national de l’Ordre, il est aujourd’hui difficile de généraliser : « Il va falloir réfléchir au cas par cas. Il y a des entreprises qui, malgré la crise, ont tiré leur épingle du jeu, qui n’ont pas de soucis de trésorerie et qui ont même progressé en chiffre d’affaires là où d’autres font face à des difficultés. Il y a eu le PGE et les différentes aides qu’il va bien falloir rembourser. Nous allons devoir faire la part des choses entre solvabilité et viabilité. Pour les entreprises viables, nous devrons mettre en place un étalement des dettes Covid sur des durées plus longues. Une partie des PGE pourrait aussi être transformée en subventions d’État. Il sera sans doute moins cher de subventionner ces entreprises pour les aider à se relancer, plutôt que gérer un chômage de masse. Il faut rester positif. Il y a beaucoup d’agilité chez nos chefs d’entreprise »
Quant aux entreprises qui étaient déjà en difficulté avant la crise sanitaire, beaucoup ne pourront malheureusement être sauvées. « Le rôle de l’expert-comptable sera de les accompagner encore mieux que d’habitude pour éviter les défaillances. Il ne faudra pas hésiter à aller vers des procédures collectives, à se mettre sous la protection du tribunal de commerce ».

Une vague de dépôts de bilan ?

Face à une vague de dépôts de bilan, les tribunaux de commerce seront certainement submergés. Là encore, selon Lionel Canesi, les experts-comptables auront un rôle essentiel à jouer : « Nous pourront accompagner les entreprises en difficulté, en étant mandataire ad hoc ou conciliateur. Pour les petites entreprises, il est même envisageable que les experts comptables puissent établir les plans de continuation et les déclarations de créances. Il faut gagner du temps si une telle situation se présente pour sauver un maximum d’entreprises. »
Les cabinets d’expertise-comptable semblent, pour l’instant, épargnées par les difficultés. Reste que le moral n’est pas au beau fixe, comme le confirme le président de l’Ordre national : « Beaucoup de nos équipes sont épuisées. Il y a de la nervosité ambiante qui pèse sur le moral de la profession. C’est pourquoi, le Conseil supérieur a créé une commission de développement des compétences relationnelles qui aura à cœur de trouver des solutions à la fois pour nos équipes et pour nos clients. Il faut qu’on les aide parce que la situation est compliquée. C’est aussi un message qu’il faut qu’on fasse passer au Gouvernement. A Marseille, suite à une manifestation, le ministre est venu annoncer le passage du Fonds de solidarité de 2 500€ à 10 000€, mais le décret est sorti 6 semaines plus tard. L’effet d’annonce s’est donc transformé en défiance, qui se reporte sur les experts-comptables. Notre rôle d’expert-comptable est aussi de faire descendre le niveau de stress dans les cabinets. C’est capital avant la nouvelle période fiscale qui arrive. »

« La fin de la séparation de l’audit et du conseil serait pour moi un cataclysme. »

L’indépendance numérique est au cœur de l’action

Parmi les axes forts du projet politique porté par Lionel Canesi, l’indépendance numérique de la profession tient une place privilégiée. Pour lui, premier sujet d’importance : la facture électronique. « Notre priorité est de développer “jefacture.com”, afin que la plateforme devienne rapidement opérationnelle, sans être faite contre les éditeurs. Il ne faut pas que ce soit un logiciel de facturation mais le concentrateur de toutes les factures électroniques des experts-comptables, de leurs clients et de l’environnement de la sphère économique privée. Il y a là un enjeu pour l’État. C’est d’ailleurs un message que je porterai auprès du ministre de l’Économie et de la Relance. Si les experts-comptables disposent des données de plus en actualisées sur leurs clients, ils vont pouvoir donner des conseils encore meilleurs, encore plus rapides, grâce à de la data réactive, meilleures seront les chances de sauver les entreprises. »

Pour le président national de l’Ordre, l’effort va également porter sur la constitution du fonds d’investissement numérique : « Nous allons identifier les start-up performantes, déjà détectées dans nos deux incubateurs, à Paris et à Marseille. Nous verrons s’il est possible de faire l’Ordre au capital de ces structures. Soit les éditeurs bougent et la profession dispose des outils en adéquation avec ses besoins, soit les éditeurs ne le font pas et c’est la profession qui va bouger. Je ne peux pas accepter aujourd’hui qu’on ne fasse rien sur ce sujet capital pour notre avenir. Je n’ai pas été élu président du Conseil supérieur pour laisser faire… Je vais donc pousser pour que tous les Conseils régionaux créent leur incubateur pour détecter les start-up performantes. Le fonds d’investissement a, quant à lui, vocation à investir nationalement dans les start-up qui auront été détectées localement. Le Conseil supérieur est là pour faire le lobbying de la profession et définir une vision de la profession à long terme. Les conseils régionaux constituent, pour leur part, le bras armé de la profession. »

Une profession en pleine redéfinition

Lionel Canesi arrive à la tête de l’Ordre au moment où la profession de commissaire aux comptes est en pleine redéfinition. Pour lui, les deux professions ne pourront pas trouver de synergies sans éclaircissement… « J’ai déjà dit que la fin de la séparation de l’audit et du conseil serait pour moi un cataclysme pour la profession. Remettre en cause l’expert-comptable qui est sur le contractuel, le commissaire aux comptes qui est sur le légal, d’avoir le commissaire aux comptes chasse sur les terres de l’expert-comptable, c’est totalement absurde. Tant qu’on ne reviendra pas là-dessus, il y aura plus de synergie. Au final, le client ne comprend plus rien. Le plus important, ce n’est pas la chasse gardée de l’un ou de l’autre, c’est notre utilité dans l’accompagnement de nos clients entrepreneurs, surtout dans cette période de crise, de relance et de prévention des difficultés des entreprises. En tant que président des experts-comptables, je ne peux pas admettre que notre champ d’action soit réduit. Comment dire à une entreprise que les commissaires aux comptes qui certifient les comptes font en même temps du conseil ? S’il n’y a plus d’indépendance, il y a une perte de confiance et c’est préjudiciable pour les deux professions, leur réputation et leur image. »

Boris Stoykov et Jean-Paul Viart, Les Affiches Parisiennes pour Réso hebdo éco


Renforcement du télétravail : que risquent vraiment les employeurs ?

C’est une question que l’on se pose chaque hiver depuis la loi dite ‘Montagne 2’ de 2016 : les pneus neiges sont-ils obligatoires ? A ce jour, non. Et dans l’entreprise, la règle est-elle la même ? Jusqu’où va l’obligation de l’employeur en matière de sécurité de ses salariés ?

De nombreux pays européens imposent d’équiper les véhicules de pneumatiques adaptés aux conditions hivernales (Autriche, Bulgarie, Allemagne, etc.).

Aujourd’hui, en France, aucune réglementation ne l’oblige. Toutefois, les chaînes peuvent être imposées par la signalisation routière notamment dans certaines zones de montagne (panneau dénommé “B26 équipements spéciaux obligatoires”, qui est un rond bleu avec un pneu blanc).

La loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, votée en 2016, prévoit que le préfet de département faisant partie d’un massif, détermine, après avis du comité de massif, les obligations d’équipement des véhicules en période hivernale. Mais les modalités devaient être fixées par décret. Celui-ci a été publié au cours du mois d’octobre 2020. De nouvelles règles s’appliqueront, mais à partir du 1er novembre 2021.

Ainsi, jusqu’au 31 octobre 2021, seules les chaînes sont obligatoires sur les réseaux routiers où est implanté le ‘B26 équipements spéciaux obligatoires’, lorsqu’elles sont enneigées.

Mais à compter du 1er novembre 2021, les pneus “hiver” pourront être imposés dans certains territoires. Cela concerne les zones de montagne et les zones contiguës qui constituent ensemble un massif. Les massifs sont les suivants : Alpes, Corse, Massif central, Massif jurassien, Pyrénées, Massif vosgien. Cela représente 48 départements.

Dans ces massifs, le préfet de département déterminera la liste des communes pour lesquelles des obligations d’équipement s’appliquent en période hivernale. Des dérogations pourront être définies sur certaines sections de route et itinéraires de délestage.

A noter : la période hivernale débute le 1er novembre et se termine le 31 mars de l’année suivante.

« La réglementation française n’impose pas les pneus hiver pour le moment. »

Pneus neige et obligations de sécurité de l’employeur

Les pneumatiques ‘hiver’ sont identifiés par l’un des marquages ‘M+S’, ‘M.S’ ou ‘M&S’ ou par la présence conjointe du marquage du ‘symbole alpin’ et de l’un des marquages ‘M+S’, ‘M.S’ ou ‘M&S’.

Même s’il n’existe aucune obligation d’équiper les véhicules de fonction de pneus neige, cela ne veut pas dire que l’employeur doit laisser circuler les salariés de son entreprise dans des véhicules non-adaptés aux conditions hivernales.

En tant qu’employeur, il doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique des salariés en mettant notamment en place des mesures de prévention des risques professionnels (Code du travail, art. L. 4121-1).

Si, lors de cette évaluation des risques, il identifie un risque routier lié à la période hivernale (verglas, gel, neige), il doit mettre en œuvre les mesures de prévention adéquates : formation, interdiction d’utiliser les véhicules, voire équiper les véhicules de pneumatiques adaptés à la saison et ce, même si la réglementation ne l’impose pas encore…

Dans le cadre d’une question posée au ministère de l’Intérieur, le député Martial Saddier précise qu’il est « démontré que l’utilisation de tels équipements en dessous d’une température de 7°C permet d’assurer une meilleure tenue de route du véhicule et une meilleure sécurité du conducteur et de ses passagers ».

Pour rappel, le risque routier est aujourd’hui la première cause d’accident mortel du travail pour l’ensemble des professions.

Et n’oublions pas que, pour les juges, le fait de laisser ses salariés circuler dans des véhicules présentant un danger pour leur santé et leur sécurité entraîne nécessairement la responsabilité de l’employeur…

Par Isabelle Vénuat

Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot pour RésoHebdoEco 

Source : Décret n° 2020-1264 du 16 octobre 2020 relatif à l’obligation d’équipement de certains véhicules en période hivernale, Jo du 18

Isabelle Vénuat, Juriste en droit social et rédactrice au sein des Editions Tissot
 

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