22 novembre 2024 |

Ecrit par le 22 novembre 2024

Le Département valide la fusion entre Vallis habitat et Grand delta habitat

Le logement social et la fusion entre Vallis habitat et Grand delta habitat ont été au cœur d’une séance-marathon lors de la dernière séance plénière du Conseil départemental de Vaucluse. Si tout le monde semblait s’accorder sur les difficultés du bailleur départemental à assumer son rôle d’aménageur c’est surtout deux visions de l’action politique qui se sont opposées. Avec d’un côté les tenants d’une défense, coûte que coûte, du service public et d’autre part ceux qui privilégient la culture du résultat. Avec 18 voix contre 15 et 1 abstention, ce sont ces derniers qui ont emporté la décision.

Quatre heures de débat, 32 délibérations et un dossier-papier de 994 pages pour cette plénière d’automne à Avignon. Avec en amont, devant l’hémicycle de la Rue Viala, dès 9h, un comité d’accueil d’un peu plus d’une centaine de manifestants vent debout contre la fusion-absorption programmée du bailleur social public Vallis habitat avec la coopérative de droit privé Grand delta habitat.

Cette délibération, la 22e, a pris 2 heures montre en main. Tous les groupes politiques ont pris la parole, certains avec sincérité, d’autres oubliant les dérives qui ont mené l’office départemental dans sa situation actuelle notamment lorsqu’il s’appelait encore Mistral habitat ou lors du rapprochement avec Grand Avignon résidences entrainant principalement une forte dégradation du parc de logement de Vallis habitat.

Auparavant, au milieu des salariés de Vallis habitat en colère manifestant devant l’Hôtel du département, un représentant du Parti ouvrier indépendant démocratique (Poid), tracts en main, Gilbert Saccani : « Il est inacceptable que des biens publics soient ainsi pillés. Il faut arrêter cette politique de destruction du logement social, la dégradation des conditions de vie des habitants et la hausse des loyers ».

Solution rapide et efficace
La présidente de l’exécutif, Dominique Santoni, prend longuement la parole pour expliquer les raisons de cette solution : « Les locataires, encore les locataires, toujours les locataires. C’est à eux que je pense avec ce projet de fusion, motivée que je suis par le service que nous leur devons. Nous les mettons au centre des débats, avec, en Vaucluse, 15 600 logements gérés par Vallis habitat et 13 000 par Grand Delta et des habitants qui attendent qu’on engage d’indispensables rénovations. Il y a un an, le 21 septembre 2021, dans ce même hémicycle nous avons eu un débat, long et riche, vous avez fait les mêmes constats pour Vallis habitat, ses difficultés, son incapacité à remettre en état des milliers d’appartements. »

Elle continue : « Je suis une femme pragmatique qui cherche une solution rapide, efficace, loin de toute posture politicienne et idéologique. Depuis au moins 2 décennies, notre office public de HLM n’est plus performant, il a cumulé une dette considérable, le parc locatif est en totale déliquescence, Vallis habitat n’a plus ni les moyens, ni le personnel pour mener à bien toute rénovation. Il faut 450M€ pour réhabiliter le parc, le restructurer en profondeur et procéder à une réelle réhabilitation urbaine de grande envergure. Grand delta habitat a fait ses preuves de compétence, technicité dans les grands chantiers, comme d’autres coopératives dans des villes communistes comme Gennevilliers. Contrairement à la caricature que vous nous présentez, nous ne donnons par Vallis habitat au grand capital, que je sache la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann est socialiste. »

4 000 logements rénovés d’ici 5 ans
Dominique Santoni précise ensuite les engagements obtenus au fil des négociations avec la gouvernance de Grand delta habitat en général et Michel Gontard en particulier, son patron, l’ancien 1er adjoint socialiste de la mairie d’Avignon. « Il s’est engagé à réhabiliter 4 000 logements en 5 ans alors que notre office public n’en rénovait que 130 par an, il en construira 500 par an dans le Vaucluse, nous aurons une minorité de blocage de 36%, les emplois seront préservés, je veillerai personnellement à ce que le personnel ne soit pas laissé sur le bord du chemin. Il faut agir et agir vite avant que les taux d’intérêt ne remontent en flèche, Vallis habitat n’y arrivera pas seul, et je répète que je ne suis pas dans une posture idéologique mais que je prends mes responsabilités d’élue pour défendre les Vauclusiens ».

Les inquiétudes de l’opposition pour le logement social en Vaucluse
Sophie Rigaut, dans l’opposition regrette « Cette fusion, nous aurions préféré un rapprochement gagnant-gagnant dans ce département où 76% des habitants sont éligibles à un logement social. Que se passera-t-il demain ? Les effectifs seront-ils maintenus ? Le montant des loyers aussi ? ». Dominique Santoni rassurera les élus inquiets sur le sort des salariés: « Les primes de vacances sont de 150€ pour Vallis habitat, 1448,50€ pour Grand Delta Habitat, pareil pour l’intéressement 1 800€ pour VH – 2 800 à 7 000€ pour GDH ».

André Castelli dénonce la précipitation de cette décision
Le communiste André Castelli n’y va pas de main morte : « J’ai l’impression d’être au marché aux bestiaux au Puy en Velay? C’est effarant et insultant de parler ainsi de Vallis habitat et de ses agents. Tout est plié d’avance, cette précipitation est inaccoutumée, vous vous levez le matin et soudain vous décidez de fusionner les deux structures ». Réponse cinglante de Dominique Santoni : « Vous lisez votre question malgré tout ce que j’ai dit en ouverture de séance, vous ne m’écoutez pas et vous continuez à avoir une posture politicienne. Croyez-vous que je me suis levée un matin et que je prenne une telle décision en quelques secondes ? Non, absolument pas, je travaille sur ce dossier qui concerne des centaines d’hommes et de femmes depuis des mois. J’ai étudié les chiffres, vérifié, écouté le point de vue des maires et des spécialistes de l’habitat social avant de penser que cette solution était la meilleure ».

Métropolisation sous-jacente pour le RN, ségrégation pour les Bompard
Marie Thomas de Malleville pour le Rassemblement National prend ensuite la parole : « Vous privatisez le social, le département est phagocyté par une métropolisation sous-jacente, vous cédez gratuitement une partie du patrimoine des vauclusiens et je me demande comment vous allez intégrer 147 fonctionnaires quand vous mettez 10 jours pour remplacer Joris Hébrard, l’ancien maire RN du Pontet qui démissionne du Conseil Départemental pour ne pas cumuler les mandats après son élection comme député ».
Autre prise de position, celle du maire d’Orange, Yann Bompard : « Certains versent des larmes de crocodile sur la disparition de Vallis Habitat, ex-Mistral Habitat, mais ce sont les mêmes qui l’ont tué il y a 20 ou 30 ans. Une ancienne présidente PS avait déclaré haut et fort qu’il n’y aurait un coup de pouce pour Orange et Bollène tant qu’un ou une Bompard serait à la mairie. Pendant tout ce temps-là, on a laissé crever le parc immobilier et ses résidents, les habitants des quartiers de Fourches-Vieilles ou de l’Aygues ont vécu douloureusement cette stigmatisation et cette ségrégation continues ».

« On ne peut plus continuer ainsi. »

Jean-François Lovisolo.

Le débat a continué avec l’élue du canton de Pertuis, Noëlle Trinquier qui dénonce la carence de locations, vu l’état des appartements : « Sur 16 500 logements du parc de Vallis Habitat 702 ne sont pas loués. Ces chiffres de vacances sont inacceptables quand on connaît le nombre de Vauclusiens qui cherchent un toit. Ensuite c’est au tour du nouveau député RN Hervé de Lépinau d’exprimer ses inquiétudes : « Vous voulez une fusion-absorption à marche forcée, mais quand il y a un absorbeur il y a forcément un absorbé qui n’a plus son mot à dire. Grand delta habitat va construire du neuf plutôt que de remettre en état des appartements insalubres ».

De son côté l’ancien socialiste Jean-François Lovisolo devenu parlementaire macroniste l’annonce : « On a réussi à mettre à genou un outil public et on se retrouve avec des appartements délabrés, insalubres, indignes, on ne peut plus continuer ainsi. Je voterai cette fusion mais je demande la création d’un comité de suivi sur le devenir des personnels de Vallis habitat ». Souhait qui sera mis en œuvre, a assuré dans la foulée la présidente.

Enfin Jean-Baptiste Blanc, élu LR du département et du Sénat et ancien président de Vallis habitat sous la mandature de Maurice Chabert raconte ce qu’il a trouvé en arrivant : « Une situation apocalyptique. On a fait ce qu’on a pu pour mieux gérer. La coopérative c’est une forme juridique qui existe dans des villes de gauche comme Nanterre ou Evry, elle fait partie des outils de l’économie sociale et solidaire, donc cette fusion doit marcher ».

Au bout de deux heures d’échanges tendus, la fusion a été votée : 18 voix pour, 15 contre, une abstention.

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