30 juin 2024 |

Ecrit par le 30 juin 2024

Quand Marina Otero irradie le Tinel de la Chartreuse pendant une nuit de juin à Villeneuve-lès-Avignon

La curiosité était palpable dans la file d’attente du Cloître St-Jean pour cette deuxième chaude soirée des Nuits de Juin ce mercredi 5 juin. 

Il y avait les « aficcionados » de Marina Otero qui avait déjà vu ses deux premières œuvres, Fuck me et Love me, de son triptyque commencé en 2020 qui s’inscrit lui-même dans un projet d’œuvre totale en continu : Recordar para vivir (Se rappeler pour vivre). L’artiste propose de présenter différentes versions de ses œuvres jusqu’au jour de sa mort. Il y avait les autres, attirés par Kill me, présenté en première internationale par l’excellent Printemps des Comédiens de Montpellier. 

Marina Otero ne se contente pas de briser « le 4ᵉ mur. » Dans son nouveau spectacle Kill me, elle nous entraîne dans une autre dimension à la fois féerique, dérangeante mais évidente

Dès les premières images réalisées par Marina Otero, qui s’est filmée compulsivement 24h sur 24, on est happé par une évidence : tout ne sera pas de tout repos. Mais très vite, l’artiste argentine nous guide dans sa démarche de création, de sa voix étonnamment chaude. Rien n’est omis avec une précision chirurgicale : son histoire d’amour avec Pablo, son effondrement après la rupture, le diagnostic psychiatrique de son trouble mental. Kill me est le résultat de sa folie amoureuse avec une démarche étonnante : réunir sur le plateau des danseuses atteintes, elles aussi, de troubles mentaux et d’un Nijinsky schizophrène. Tout est limpide, la curiosité est aiguisée, le show peut commencer…

Une performeuse ? D’abord une performance

Celle de parler de soi sans être narcissique, de parler de sa folie pendant 1h30 sans qu’elle nous paraisse étrangère et en la gardant elle-même à distance.  Au plateau, Marina Otero convoque dans un spectacle très chorégraphique 4 performeuses (Ana Cotoré, Josefina Gorostiza, Natalia López Godoy et Myriam Henne-Adda)….et Nijinsky  ! Tout est montré et pourtant tout s’effleure. Tout est dit et pourtant, tout est en retenue. Si le spectacle commence comme une seule femme (5 femmes rousses clonées) dans un même combat de boxe ou de tir, chaque personnage se détache ensuite et viendra témoigner, seul sur ce grand plateau blanc de son trouble mental avec leurs propres mots, gestes ou chant. On rit, on pleure, on est avec.

Un choc artistique radical et généreux

Quand le propos rencontre une mise en scène aussi inventive et féerique, on ne peut qu’être conquis et se laisser entraîner, nous aussi, dans cette – quelquefois seulement — douce folie. Pourquoi ? Parce qu’on n’est à aucun moment pris en otage, aucune provocation, aucun pathos. L’audace rencontre la maîtrise des corps, des gestes, des mots. Rien n’est gratuit ni démonstratif. La poésie opère et transcende cette violence et souffrance. En un mot, une authentique rencontre !


Quand Marina Otero irradie le Tinel de la Chartreuse pendant une nuit de juin à Villeneuve-lès-Avignon

Les lettres en blanc de l’affiche des ‘Nuits de Juin‘ brillent comme une lumière libératrice en cette fin de printemps maussade. Du mardi 4 au dimanche 9 juin, la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon nous convie à une semaine festivalière champêtre, un moment de partage et de créations.

Les Nuits de juin, un festival décadré et festif

« Les Nuits de juin, c’est une manière de profiter de la Chartreuse en nocturne. Celle-ci n’est jamais assez connue ou visitée. Ce festival prend ses habitudes depuis 2 ans et permet toujours de la redécouvrir, de jour comme de nuit. Pour cela, une programmation de qualité qui s’adresse au plus grand nombre, des partenariats et une mise en valeur des pratiques amateurs. » La directrice de la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon, Marianne Clevy, a annoncé d’emblée la couleur de cette fin de printemps avec la même passion qui la caractérise. Il y aura des incontournables comme le pique-nique littéraire, le Labo des autrices ou la visite de la Chartreuse aux lampions, des nouveautés avec un spectacle en partenariat avec le Printemps de Comédiens en ouverture ou une soirée-lecture Pyjama avec l’autrice Nathalie Papin au Pôle Culturel de Sauveterre. 

Déplier les possibles et faire ensemble

Cette semaine festivalière s’enrichit de nouvelles collaborations, de nouvelles conversations artistiques avec le Printemps des Comédiens de Montpellier, le Pôle culturel Jean-Ferrat de Sauveterre et l’École supérieure d’Art d’Avignon. Marianne Clevy aime à le rappeler : « La Chartreuse n’est pas seulement un lieu de diffusion, c’est un lieu où les partenariats et les spectacles se cuisinent. » Régularité en général, gratuité souvent, la Chartreuse, centre culturel de rencontres, c’est toute l’année au fil des saisons. « Il faudrait pouvoir dire ce qui se passe à la Chartreuse même si on n’y a jamais mis les pieds ! »

Le Printemps des Comédiens ouvre la première soirée des Nuits de Juin

Le directeur Jean Varela, du Printemps de Comédiens de Montpellier, était présent pour nous présenter le fruit de ce premier partenariat entre Le Printemps et la Chartreuse. Né en 1987 dans la mouvance de la décentralisation déployant l’autonomie des collectivités, le Printemps des Comédiens s’est progressivement érigé en festival incontournable de la création théâtrale internationale en France. Après Fuck me et Love me, le Printemps des Comédiens a choisi de présenter la dernière création de cette trilogie de Marina Otéro au Tinel de la Chartreuse en première mondiale. Fidèle de cette grande artiste argentine, Jean Varela a souligné la générosité et authenticité de Marina Otéro dans une mise à nu radicale. Au plateau, celle-ci convoque dans un spectacle très chorégraphique quatre performeuses(Ana Cotoré, Josefina Gorostiza, Natalia López Godoy et Myriam Henne-Adda)…et Nijinsky !

Un choc artistique avec l’artiste Marina Otéro pour Kill Me en création mondiale

Vous travaillez précisément ici autour de la folie amoureuse et du trouble mental, d’où vous est venue cette idée ? En effet, les thèmes sont la santé mentale et la relation à l’amour. Si j’ai choisi de travailler cette question, c’est parce que je n’avais pas d’alternative, étant donné que j’ai traversé une crise personnelle qui m’a conduite à un diagnostic psychiatrique. Après cela, j’ai commencé à voir que de nombreuses personnes vivaient des situations similaires et étaient contraintes par certains tabous. Il m’a semblé que je n’avais pas d’autre choix que de m’exposer pour pouvoir en parler sans crainte… Ma principale source d’inspiration est la vie et les gens que je rencontre. Ce travail particulier est également fortement inspiré par la pratique et l’environnement de la boxe, après m’être entraînée dans un club de mon quartier. Ensuite, il y a ce que je lis, ce que je vois, du point de vue de la « consommation » au niveau culturel. Il y a une citation (je pense assez évidente) des films de Jean-Luc Godard en ce qui concerne les femmes et les armes. Il y a aussi une coïncidence avec la dernière pièce d’Angelica Liddell, Voodoo.
Propos recueillis par Mélanie Drouère pour le Printemps des Comédiens et La Chartreuse, centre national des écritures du spectacle, mai 2024. 

L’Europe à la table

Élections européennes obligent, l’Europe s’invite à la table de ce banquet littéraire qui connaît toujours un franc succès et qui est un des temps forts de ces Nuits de Juin. Ce moment culinaire et théâtral aura lieu dès 20h dans le grand Cloître avec l’intervention du groupe d’acteurs-lecteurs de la Chartreuse. Venez avec vos meilleurs plats et boissons et surtout ne pas oublier de réserver. Des auteurs européens pour goûter des textes (traduits) suédois, espagnols, belge etc. Il nous en vient déjà les mots à la bouche !

Est-ce pour moi ? Oui ! Un programme très varié pour petits et grands

Mardi 4 juin
19h. Inauguration exposition autoportrait de Vera Martynov. En partenariat avec l’Ecole Supérieure d’Art d’Avignon. 
20h30. Kill me. À partir de 16ans. 9 à 30€. 04 67 63 66 67. printempsdescomediens.com

Mercredi 5 juin
20h30.  Kill me. À partir de 16ans. 9 à 30€. 04 67 63 66 67. printempsdescomediens.com

Jeudi 6 juin
18h30. Stage photo / écriture (jusqu’à dimanche)
18h30. Ballade haïkus avec l’École de Musique de Villeneuve et les comédiens de l’Atelier Les Rocailles.
19h. Labo des autrices autour de Valentine Sergo et Gaëlle Axelbrun.
19h. Atelier nyctalope écrire en résonance
20h. Ballade haïkus
21h30. Visite aux lampions

Vendredi 7 juin
15h. Performance déambulatoire, l’amour, le point de vue par les élèves théâtre du lycée Jean Vilar.
19h. Lecture-pyjama Le Gardien des Ombres. Entrée Libre. Sauveterre. Pôle Culturel Jean Ferrat. 04 66 33 20 12.
20h. Work in progress portraits crachés. Avec le rappeur Marc Nammour.10€. Sauveterre. Pôle Culturel Jean Ferrat. 04 66 33 20 12.

Samedi 8 juin
10h. Stage rapper les classiques
11h. Atelier à voix haute
15h. Animation à lire dans l’herbe
17h. Lecture et rencontre dis-moi dix mots sur le podium autour de « Olympique » avec Maud Gallet Lalande
17h30. Ballade haïkus
18h. Lectures jeune public la belle histoire de l’Ecole des loisirs
20h. Pique-nique littéraire
22h. Visite aux lampions

Dimanche 9 juin
10h. Visite dessinée sous le pinceau de l’aquarelliste Mathilde Guillot.
10h et 11h30. Atelier vannerie

Du 4 au 9 juin. Monument en entrée libre le week-end du 8 et 9 juin. La Chartreuse. 58 rue de la République. Villeneuve-les-Avignon. 04 90 15 24 24.

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