Après la dissolution surprise de l’Assemblée, se dirige-t-on vers un grand chelem RN/Reconquête aux élections législatives des 30 juin et 7 juillet prochains en Vaucluse ? Pas si sûr, car si la 5e circonscription est prenable, rien n’est jouée dans celle d’Avignon.
Débâcle, déconfiture, déroute, débandade, désastre, désaveu, déculottée, défaite, les synonymes ne manquent pas pour définir la Bérézina du parti présidentiel aux Européennes.
La fusée Bardella bénéficie ainsi de 30 élus RN à Bruxelles pendant que la candidate macronienne Valérie Hayet en a 13, tout comme le candidat PS Raphaël Glucksmann, LFI avec Manon Aubry 9, le LR François-Xavier Bellamy 6, Marion Maréchal avec Reconquête 5, tout comme l’écologiste Marie Toussaint. En plus, le seul député macroniste de Vaucluse Jean-François Lovisolo, ancien secrétaire de la Fédération PS du département, annonce qu’il passe son tour pour se recentrer sur les prochaines municipales à La Tour d’Aigues.
Coup de poker ou coup de folie ?
Emmanuel Macron qui répète à l’envi « C’est moi ou le chaos », qui a encore déclaré le 16 mai dans un entretien exclusif à l’Express : « On garde notre cap, notre stratégie est la bonne », le ‘Mozart de la finance’ qui affiche 3100Mds€ de dette pour un déficit public de 5,5% du PIB subit donc une déconvenue magistrale.
Et dans un geste désespéré, il renverse la table, décide ‘tout à trac’ de dissoudre. Pari dangereux? Coup de poker ? Quitte ou double ? Saut dans l’inconnu ? Suicide collectif ? Coup de génie politique ? L’avenir le dira.
Depuis des décennies en Vaucluse, l’ancrage du Rassemblement National de Marine Le Pen, après celui du Front national de Jean-Marie Le Pen, se consolide à chaque scrutin, il creuse son sillon, conforte son socle. En plus, il bénéficie d’une publicité plein feux avec un président qui installe le match depuis qu’il est élu, faisant de lui son principal opposant en surjouant la dramatisation. Cette fois, le piège qu’il a tendu aux lepénistes se referme sur lui.
Le RN creuse inexorablement son sillon
Hervé de Lépinau, député RN salue se félicite de cette « motion de censure en grandeur réelle des électeurs ». Et il ne mâche pas ses mots, « Le président Macron n’aime ni la France, ni les Français. Il gouverne à coups de 49-3 à l’assemblée et méprise les parlementaires, il joue les va-t-en guerre en Ukraine, sa politique est un échec sur toute la ligne. Il fracture la société, met ses concitoyens en difficulté, que ce soient les agriculteurs qui croulent sous les normes et ne vivent pas décemment de leur travail, que ce soient les ménages qui vont encore subir une hausse de 11% du gaz dès le 1er juillet en plus de l’inflation galopante depuis des mois. » Evidemment, Hervé de Lépinau va se représenter aux législatives à Carpentras, après une campagne-éclair, les 30 juin et 7 juillet prochains « Une nouvelle génération, plus jeune, va régénérer le Palais Bourbon, mener une autre politique pour améliorer la vie des Français » conclut-il.
Du côté de Reconquête, Yann Bompard, le maire d’Orange qui était sur la liste de Marion Maréchal, salue cette percée sur la droite de l’échiquier. « Avec mon père (ancien maire, conseiller régional et député d’Orange et ma mère (ancienne maire et conseillère départementale de Bollène), nous appelons à l’union des droites depuis des décennies, tant mieux si Marion tend la main au RN, ensemble on sera plus fort ».
« Une campagne-éclair de 3 semaines, c’est bien trop court ! »
Julien Aubert
Julien Aubert qui n’avait pas pu briguer un 3e mandat LR en 2022, éliminé dès le 1er tour, ne cache pas sa colère, lui qui était dans la même promotion qu’Emmanuel Macron à l’ENA : « Avec cette dissolution, Il confie les clés du camion au RN pour qu’il échoue, c’est dangereux. Une campagne-éclair de 3 semaines, c’est bien trop court, il se moque des Français. En 2017, en même temps, il avait tué en même temps la gauche et la droite. Là, il crée une confusion extrême et joue les pompiers pyromanes ».
De son côté, Dominique Santoni, présidente du Conseil départemental de Vaucluse rappelle qu’elle n’entend pas céder aux chants des sirènes : « Je suis issue d’une famille gaulliste. Du RPR jusqu’aux Républicains, j’ai toujours appartenu à cette même famille : une droite indépendante et singulière. Certains aujourd’hui sont tentés de suivre le RN, je ne les suivrai pas. Certains, hier, ont rejoint Emmanuel Macron, je ne les ai pas ralliés et ne les rallierai pas. Et, pour les élections législatives à venir, je réaffirme haut et fort que Les Républicains doivent partir sous leurs propres couleurs et rester indépendants, tant du Rassemblement national que de la Majorité présidentielle. Et si, demain, Les Républicains devaient disparaître, je serai une élue vauclusienne divers droite, tout aussi indépendante et ferme sur ses convictions. »
Une gauche unie comme seule alternative ?
A gauche, le sénateur PS Lucien Stanzione minimise le succès du RN puisque l’abstention est de 45,88%, donc grosso modo, selon lui, un vauclusien sur deux n’a pas voté. Et il affirme que la gauche unie est la seule alternative possible contre la montée de l’extrême droite, « Il nous faut un Front Populaire fort pour la contrer ».
« Un président ne devrait pas jouer à la roulette russe quand le canon tonne aux portes de l’Europe » a ironisé un observateur du landerneau politique. Le RN avait déjà raflé 4 circonscriptions sur 5 en Vaucluse en 2022 avec Joris Hébrard (remplacé depuis par sa suppléante Catherine Jaouen), Bénédicte Auzanot, Marie-France Lorho, et Hervé de Lépinau. Là, avec la main que leur tend Marion Maréchal de Reconquête pour une union des droites, au soir du 7 juillet ils pourraient ensemble faire le grand chelem si la gauche ne se ressaisit pas. « Arrêtons les conneries, jouons collectifs » a vertement conseillé le LFI François Ruffin aux socialistes, communistes et écologistes.
Un appel entendu par Cécile Helle, maire d’Avignon qui souhaite « reconquérir une circonscription qui n’aurait jamais dû échapper au camp des républicains en 2022 ».
« Les élections européennes qui se sont déroulées hier ont placé à Avignon, comme quasiment partout en France, le RN en tête des suffrages, s’inquiète-t-elle. Toutefois, j’ai la satisfaction de constater qu’une nouvelle fois, Avignon la Républicaine est la plus résistante des villes de la région face aux populismes puisque le résultat de la liste du RN est inférieur de 5 points aux résultats nationaux. »