22 novembre 2024 |

Ecrit par le 22 novembre 2024

57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

La 57e édition du Festival d’Avignon aura lieu du vendredi 7 au samedi 29 juillet 2023. Au programme ? 1 491 spectacles dont 836 créations, 177 spectacles ‘jeune public’, 129 spectacles accessibles aux non-francophones, 77 en langues étrangères seront donnés par 1 270 compagnies françaises dans 141 lieux, 10 000 artistes et techniciens pour un impact économique estimé à 40,2M€ et la fréquentation de 300 000 personnes.

La typologie de spectacles
787 sont des spectacles de théâtre pur, 342 se concentrent sur l’humour, 171 sur la musique, 86 feront la part belle à la danse, 50 à l’art oratoire, 48 aux arts du cirque et 46 donneront vie aux marionnettes.

Quels publics ?
Le festival d’Avignon est majoritairement fréquenté –à hauteur de 68%- par des femmes dont l’âge moyen est de 50 ans et dont 38% proviennent de la région Sud. Parmi elles, on compte beaucoup d’enseignants et de professions libérales.

Les retombées économiques
L’impact économique est estimé à 40,2M€ grâce à la fréquentation de 300 000 spectateurs et 1,7 million d’entrées, particulièrement concentrés autour du 14 juillet, entre le 10 et le 23. Pourquoi ? A cause du jour férié du vendredi 14 juillet, du bouche à oreille, et des articles parus sur les spectacles les plus plébiscités.

L’Affiche
Cette 57e affiche a été réalisée par Camille Bricout, étudiante en première année à l’École supérieure d’art d’Avignon. La demande d’AF&C ? Porter un regard inédit, insolite et impertinent sur le festival. La lauréate a reçu 1 500€ pour la qualité de son travail. Les projets d’affiches seront quant à eux exposés au Village du off durant tout le festival.

Là, maintenant ?
Harold David et Laurent Domingos, les deux directeurs du Festival Off entament leur 2e année d’exercice avec une première édition reprise au pied levé en avril 2022 et un festival à complètement repenser, sans toutefois créer d’onde de choc auprès des lieux, des compagnies et des institutionnels. Pourtant il y a urgence à ce que les choses bougent.

Harold David et Laurent Domingos entourés de leur conseil d’administration à la maison Jean Vilar, lors de la présentation du 57e Festival Off d’Avignon Copyright Mireille Hurlin

En cause ?
L’engluement du plus grand théâtre du monde français dans un écosystème fragilisé par la course du temps, une organisation trop datée dans sa forme et peu aidée financièrement, un accroissement des spectacles et des lieux dans une conjoncture sociale et économique grevée par le Covid, puis une inflation installée et la nécessité de mieux et plus s’ouvrir à l’international.

AF&C revisite son organisation
L’association s’est employée à la refonte de son site internet et du service Ticket’ off ; a mettre en place un logiciel d’analyse de la fréquentation du festival et travaille sur le renforcement de la communication globale, notamment sur la stratégie social media jugée ‘trop embryonnaire’. Enfin, AF&C s’attaque à la dernière semaine du festival, qui s’avère la plus rude pour les compagnies avec l’amenuisement de la fréquentation des salles et la désertion des festivaliers qui réduisent leur temps de présence pour des causes économiques.

Le festival Off fait alliance avec Avignon Tourisme et le Festival In
Et c’est sous la bannière d’Avignon Tourisme que les festivals Off et In font alliance, considérant qu’il n’y a pas deux publics, mais un seul, pour un mois de juillet rayonnant sur toutes les formes théâtrales. L’idée ? Sortir du clivage public-privé –In et Off- et, surtout, créer une identité des festivals. Ainsi Harold David, Laurent Domingos et Tiago Rodrigues ont déjà tissé des liens propres à faire avancer la marque Festivals d’Avignon, les savoirs faire et expertises des arts vivants, et d’en faire une promotion plus aboutie à l’étranger.

Les solutions du Festival Off
Car Harold David et Laurent Domingos entendent bien donner un nouveau souffle au festival Off. Leur pari ? Œuvrer à l’accompagnement à la professionnalisation ; à la transition éco-responsable ; à la mutation du modèle économique ; au développement des publics et au soutien à la diffusion.

La mutation économique
«Plus de 90% des théâtres sont fermés à l’année, relève Harold David. Ce gisement de salles et de matériel inexploités pourrait s’inscrire, comme cela a déjà été initié au cours de cette année, dans le développement de résidences pour les compagnies et lors d’actions de médiation avec les écoles, collèges, lycées et publics éloignés de la culture. La nécessité ? Casser la logique saisonnière pour faire également évoluer les conditions d’accueil des compagnies et des artistes pendant le festival.»

Le fonds de soutien à l’émergence et à la création
Le fonds de professionnalisation, créé en 2016, et alimenté par la billetterie solidaire Ticket’ off –à hauteur de 75 centimes d’euros sur l’euro prélevé, 116 000 tickets ont été vendus en 2022- et au soutien de la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques), l’AST (Autorisation de sortie temporaire d’un bien culturel), le CNMP (Comité national des moyens de paiement) et Profession spectacles évolue. Il favorise les compagnies et structures en voie de professionnalisation et la prise de risque artistique, en lien avec l’écriture d’un auteur contemporain et vivant. Le fonds de dotation atteint, cette année, les 210 000€ distribués à entre 70 à 80 projets.

Des membres du Conseil d’administration Copyright Mireille Hurlin

L’accompagnement à la professionnalisation
Près de 14 webinaires interactifs et accessibles en ligne permettront aux acteurs du off de préparer leur festival. Mais surtout un parrainage des compagnies primo-accédantes a été mis en place afin que les compagnies les plus aguerries puissent efficacement les conseiller. Un cycle de formation est en cours de conception et sera proposé dès la rentrée 2023, en partenariat avec l’Afdas (opérateur de compétence pour la culture et les industries créatives, les médias, la communication et les télécommunications). Il sera aussi question de mieux appréhender la diffusion du spectacle, problème central des compagnies pour mieux se vendre auprès des professionnels.

Enjeux et défis écologiques
Le Festival off a produit, en 2022, 60 tonnes de déchets-papier générés par l’affichage sauvage, l’enjeu est de passer à 25. Concernant la réduction de l’empreinte carbone, le Festival Off veut encourager la mutualisation du transport de matériel des compagnies et structures de production avec un ferroutage commun. Dans ce cadre, une première expérimentation dans le sens Avignon – l’Ile-de-France pourrait être tentée, pour le trajet de retour de cet été, notamment du matériel, et dont l’évaluation pourrait porter ses fruits en 2024 et 2025. La gestion des déchets est également à l’étude avec un été placé sous le signe du diagnostic afin de proposer un plan d’actions en 2024.

Les perspectives 2024-2025
Le festival Off va rédiger un cahier des charges nommé ‘Label’ définissant les bonnes pratiques professionnelles. Il sera destiné aux lieux comme aux compagnies. Celui-ci sera présenté le 13 juillet.

L’encadrement des loyers des locations saisonnières privées
Depuis le Covid, les locations saisonnière privées auraient augmenté de 25%. Airbnb n’aurait pas manqué, non plus, de faire croître le prix des loyers, déjà exorbitants, empêchant le public de s’installer durablement pour profiter du festival. Parmi les solutions évoquées : L’éloignement des troupes de l’intramuros, pour les proches ceintures de la ville et la location de chambre chez l’habitant, jugée très accessible et pouvant possiblement ‘apprivoiser’ les riverains avec les artistes lors de ce mois de juillet foisonnant et extraverti.

Les nouveautés 2023

Pour les publics
Le festival insiste pour ouvrir plus largement l’accès des publics et augmenter la fréquentation des salles de spectacles. La carte d’abonnement, outre la traditionnelle réduction de 30% sur le prix d’achat des places de spectacle, devient une carte ‘avantages’ en proposant des offres promotionnelles avec des lieux touristiques et culturels, des bars, restaurants et commerces.

La librairie du Off
Le festival Off poursuit son partenariat avec la Librairie indépendante La mémoire du monde qui proposera, au Village du Off plus d’un millier de références dont l’ensemble des textes édités joués pendant le festival, qu’il s’agisse d’œuvres classiques ou contemporaines. Également, quotidiennement, la librairie proposera la signature d’auteurs.

Des journalistes et, au fonde de la salle Tiago Rodrigues et le directeur du Festival d’Avignon Copyright Mireille Hurlin

Deux guides thématiques font leur apparition Jeune public et International
Deux guides thématiques font leur apparition : le guide Jeune public pour faciliter leur accès aux 174 spectacles qui leurs sont dévolus et le Guide International bilingue Français-Anglais permettant d’identifier les 125 compagnies étrangères présentes dans la programmation de cette année.

Les Journées Pitchoun
Les enfants des centres de loisirs pourront participer à des ateliers de pratique artistique les lundis 17 et 24 juillet. Deux journées expérimentales pour préfigurer un Village du Off pour les enfants et les familles en 2024. Ces deux journées se dérouleront avec l’accompagnement de l’Assitej (Association internationale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse), la ligue de l’enseignement 84, Ramdam (Musique jeune public) et avec le soutien de la Cepac (Caisse d’Épargne Provence, Alpes et Corse).

Culture du Cœur
Près de 2 000 places de spectacles sont réservées aux familles et enfants habitant des quartiers d’Avignon –dits éloignés de la culture-. Ces places achetées par voie de mécénat par Nhood (Plateforme de services immobiliers des centres commerciaux et mixte) et encadrées par la Fondation AF&C et Face (Fondation agir contre l’exclusion) proposent des temps de médiation auprès des publics invités.

1ere édition Cultura
Cultura Sorgues, nouveau mécène du Festival Off, récompensera un spectacle créé à partir d’un auteur contemporain vivant. La remise du prix se fera dimanche 23 juillet à 10h30 au Village du Off.

Le son du Off
‘Le bar du Off’ devient le ‘Son du Off’, festival de musiques actuelles avec les musiciens de la région. 19 groupes sont programmés, soit une centaine d’artistes proposant du rock, de l’électro, du hip hop, de la fanfare, du cumbia, du punk, DJ sets…

Laurent Rochut, membre du Conseil d’administration, prend la parole Copyright Mireille Hurlin


Les conférences du Village du Off
Le festival du Off propose 5 temps forts pour évoquer les problématiques et les expériences des métiers des arts vivants.

Du 12 au 16 juillet
Place à la filière, en partenariat avec la Scène, 14 tables rondes pour rendre compte des problématiques et enjeux de la filière.

Du 18 au 20 juillet
Place à l’international, en partenariat avec le Cinars (Conférence internationale des arts de la scène). Il y sera question des plateformes d’échange et de lien avec Montréal.

Du 21 au 24 juillet
Place aux auteurs en partenariat avec les EAC (Ecole de référence aux métiers de la culture, du luxe et du marché de l’art), SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) Assitej (Association internationale du théâtre pour l’enfance et la jeunesse), Artcena (Centre national des arts du cirque, de la rue et du théâtre), La Comédie Humaine…

Du 26 au 28 juillet de 23h à 2h
Place au territoire avec des rencontres, des témoignages, des retours d’expérience avec des acteurs sociaux et économiques du territoire. Le son du Off, 19 concerts et le bal de clôture prévu le 28 juillet.

La mémoire du Off
La mémoire du off est détenue par la BNF-Maison Jean Vilar qui collecte tous les supports de communication du festival tels que les programmes, affiches, tracts, dossiers de presse pour conserver la mémoire du festival.

Pour les auteurs du Off
Se retrouveront à l’espace Jeanne Laurent, dans le cadre du partenariat tissé entre Le Festival Off et Avignon Tourisme. L’endroit propose aux professionnels, compagnies, théâtres, partenaires, et institutionnels de se rencontrer et de ‘réseauter’ autour de showcases, d’ateliers, stands exposants et espaces de convivialité.

Copyright Mireille Hurlin

Les rendez-vous à ne surtout pas manquer
Jeudi 15 juin
Sortie du programme numérique et ouverture de la billetterie Ticket’Off.
Lundi 3 juillet
Sortie du programme papier
Jeudi 6 juillet à 17h
Grande parade d’ouverture
Samedi 8 juillet à 11h
Inauguration institutionnelle du Village du Off
Jeudi 13 juillet à 20h
Soirée partenaires à la Cour du Châtelet
Vendredi 14 juillet à 12h30
Banquet des pros au Forum pro sur réservation 36€
Mardi 18 juillet à 21h
Soirée internationale à la Cour du Châtelet
Jeudi 20 juillet à 21h
Soirée jeune public au Village du Off
Mercredi 26 juillet à 18h
Conférence de presse de clôture au Village du Off.
Tous les jeudis, vendredi et samedis, de la 2e et la 3e semaine du festival, de 18h à 10h

Les lieux
Le Village du Off
se tient 6, rue Pourquery de Boisserin à Avignon, du 7 au 29 juillet, de 9h à 2h du matin.
Le Forum pro
aura lieu à l’Espace Jeanne Laurent du 10 au 13 juillet et du 17 au 22 juillet de 10h à 17h.

Copyright Mireille Hurlin

Ils ont dit

Laurent Domingos à propos de l’affiche 
«Elle a fait du bruit à l’échelle des réseaux sociaux et nous assumons son choix’ a souri Harold David. ‘Elle interroge sur la diversité des formes d’art, la tolérance. Après chacun l’interprète comme il le souhaite. Elle est pleine de soleil et de chaleur».

Harold David à propos du logement
«Nous avons un vrai besoin d’assainissement de la situation des conditions de logement avec des locations saisonnières dans un marché complètement dérégulé dont nous pouvons tous témoigner qu’il a pris de 20 à 25% depuis la fin du Covid. Nous avons besoin de la Ville pour aborder ce chemin là pour que le festival Off d’Avignon reste accessible au plus grand nombre, et que le logement ne soit pas un point de cristallisation à la démocratisation culturelle.»  

L’affiche du Festival Off DR

Laurent Rochut sur faire évoluer urgemment le modèle du Festival off
«Je porte l’ambition que la Ville devienne un studio à l’année, avec un écosystème cohérent, relève Laurent Rochut, Vice-président d’AF&C pour les lieux. La réalité ? Avignon porte 90 théâtres permanents à l’année dont une douzaine qui travaille plus fréquemment. Un gisement financé par l’argent public, les mairies, les départements, les régions, les Drac… Il nous faut trouver un mécanisme économique pour mettre cet écosystème en musique, une filière en ordre de marche, comme cela a été le cas avec les installations de cinémas, les productions passées finançant les productions futures. Notre ambition ? Que le festival d’Avignon – pour mémoire 1 spectacle sur 4 se vend lors du festival d’Avignon- soit un temps fort d’un travail qui aura lieu toute l’année. Ainsi l’on renverse le paradigme. Il faut que cette ville porte le festival toute l’année parce qu’il n’est pas immortel dans sa forme actuelle. Plus de 40M€ en un mois d’impact économique ? C’est une manne qui se choie !»    

Harod David et Laurent Domingos sur quelles relations avec le festival In ?“
«Derrière l’organisation de cette filière, c’est l’animation du territoire et le travail en direction des publics qui seront concernés et associés aux processus de travail dans les lieux, détaille Harold David. C’est à cet endroit que nous nous retrouvons avec le In qui travaille avec les lycéens, les quartiers, les prisons. C’est là que nous avons une vocation commune à travailler ensemble, pour porter la citoyenneté avec un esprit un peu plus éclairé. Le festival Off s’étend sur 22 jours et le festival In sur 20 jours. Nous pourrions caler nos dates et, ainsi, permettre aux deux festivals d’avoir lieu conjointement, sur 22 jours, ce qui contribuerait à remplir les salles de spectacles la dernière semaine de juillet, qui reste délicate pour les compagnies du Off.»
«Pendant le festival nous travaillerons sur la porosité des publics du In et du Off, ajoute Laurent Domingos, et également pour évoquer une expérience complète des deux festivals. Nous voulons décloisonner.»

Copyright Mireille Hurlin


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Un nouveau lieu Le cabaret le Marseillais, vient d’ouvrir ses portes, 25, rue Thiers à Avignon. Il propose, actuellement, des Scènes ouvertes de 15 minutes chacune, lors desquelles les artistes auront toute latitude pour faire rire le public et ainsi se faire connaître.

Un jeudi par mois, l’applaudimètre désignera un gagnant qui, à son tour, concourra en final pour gagner les faveurs du public. Enfin, le gagnant des gagnants accèdera à un créneau lors du prochain festival Off d’Avignon.

Isabelle Bonadéi en guest star
La marraine de ce ‘Théâtre crochet’ –à la façon du Petit conservatoire télévisuel de Mireille- est Isabelle Bonadéi, humoriste Toulousaine qui présentera son spectacle ‘Isabelle s’accroche’ vendredi 20 janvier à 20h30.

Les dates
Jeudi 19 janvier, découverte du concept ; jeudi 16 février et jeudi 16 mars sur le thème de ‘l’humour méditerranéen’ ; jeudi 13 avril ‘Humour inclusif’ ; Jeudi 11 mai ‘Humour et musique’ ; jeudi 15 juin soirée de clôture et découverte du gagnant.

Les infos pratiques
Cabaret Le Marseillais. 25, rue Thiers à Avignon. Entrée libre, sortie au chapeau. Première scène ouverte ce jeudi 19 janvier à partir 19h30. Clôture de la soirée à 21h.

Pour candidater
Vous voulez participer à ‘Tous les artistes, tous les styles, tout humour hors stand-Up !’ Contactez Off diffusion, Anne Laroutis au 06 98 12 05 39 diffduoff@gmail.com www.off-diffusion.webnote.fr Remplir la fiche ici. En savoir plus sur Juste de l’humour Avignon ici.

En savoir plus
Le concours est organisé par Off diffusion « qui regroupe des médiateurs culturels et artistes suite à l’appel de 2021 ‘Culture en Liberté, l’Art est dans la rue’ où nous voulions l’ouverture des salles de spectacle, pour tout public, lors de la pandémie et du confinement, rappelle Anne Laroutis, attachée de presse avignonnaise. Ce mouvement se forge depuis l’ouverture des salles en magazine artistique www.off-diffusion.webnode.fr dans le but de promouvoir les arts et en particulier l’humour et de mettre en valeur les artistes.»


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Ça commence par une rencontre impromptue, à Avignon, rue de la République avec Harold David, co-président d’Avignon Festival et compagnie et entrepreneur : patron de théâtres et diffuseur de spectacles. On se reconnaît, on s’arrête, on prend le temps de se parler puis on se revoit pour un café, à la Maison des fondues que tient son associé Michaël Perras. C’est fou comme les rencontres ouvrent d’espaces de liberté et de partage. On vous raconte.

11h un samedi matin de décembre
Il fait très froid et humide. Ce rendez-vous à la Maison des fondues tombe à pic pour se réchauffer. C’est Michaël Perras, l’associé d’Harold David qui m’y accueille. Je pose ma 1re question saugrenue : Comment tombe-t-on amoureux d’Avignon ?  «Moi ça a été les petites ruelles, se souvient Michaël, gérant du lieu et également en charge –entre autres- de la comptabilité d’Atypik production et diffusion qui gère l’Archipel théâtre –25b, rue du rempart de l’Oulle- le Rouge Gorge théâtre également cabaret et soirées à thèmes -11, rue de la Peyrolerie-, l’Atypik théâtre –72, rue Bonneterie- ainsi que la Sarl Caméléon qui gère la Maison des fondues. Pendant le festival j’étais le premier levé et le dernier couché. Il n’y avait pas grand monde si ce n’est cette atmosphère si présente, vivante même lorsque toutes les rues sont désertées. ce que je me suis dit ? Je me sens bien ici !»

Harold David arrive en scooter,
se gare, franchit la porte et glisse un clin d’œil à son compagnon de route depuis bientôt… 19 ans. 19 ans de confiance absolue et de business ensemble. «Comment nous nous sommes connus ? J’étais en charge de la comptabilité d’une structure de médiation culturelle à Paris que dirigeait Harold », précise Michaël. «Hier grosse soirée au Rouge Gorge, chuchote Harold, fête de fin d’année des déménageurs. On a fini super tard. Heureusement que j’ai une bonne équipe !»

Harold David

«Une ville à taille humaine et cette lumière si particulière »
Je pose la même question saute-grenue – comme dirait Maître Pierre Gautier, notaire à Sorgues-  à Harold. «Moi, honnêtement ? Silence… Puis : «Ma porte d’entrée à Avignon c’est son festival. C’est même pour ça que j’ai commencé à venir à Avignon. Ce que j’ai découvert à partir du moment où nous avons eu les trois salles –les deux salles de l’Atypik théâtre et l’Archipel théâtre- ? C’est l’autre visage d’Avignon, hors festival. J’ai alors eu cette intuition d’une douceur de vivre à la provençale. La lumière du Sud. Plus je venais, plus j’appréciais la taille humaine de cette ville. Le fait de pouvoir tout faire à pied. De ne pas être obligé d’avoir une voiture.»

Et aussi ce côté village
«Et aussi ce côté village, où, pour peu que l’on ait une vie sociale, on tombe tout le temps sur quelqu’un que l’on connaît. Il y a cette proximité de la relation humaine, de ne pas être anonyme. Jusqu’à présent j’ai beaucoup été dans le nomadisme culturel maintenant, à presque 50 ans, j’éprouve le besoin de poser mes valises, constate Harold. C’est cette rencontre affective avec le territoire qui me donne envie de m’y installer. Mais si j’y réfléchis vraiment, au tout départ, dès le matin que je me lève, c’est cette lumière si particulière qui me saisit. Avignon est une ville synonyme de vie, d’ouverture d’esprit et d’accueil car ici on ne s’est jamais sentis étrangers à la ville. On a envie d’y inscrire sa vie tant dans l’espace personnel qu’économique et culturel. Ce qui fait que nous sommes ici ? L’opportunité de s’y installer via le spectacle vivant, la restauration, autant d’outils de travail qui nous permettent d’y vivre.» 

Ça a commencé comment ?
«En 2013 nous achetions l’Atypik théâtre – deux salles de 45 places, 72 et 95, rue Bonneterie, dans le même temps, en juillet nous prenions la location-gérance, pour un mois, du restaurant la Maison des fondues. Comment avons-nous fait pour ne pas devenir dingues cette année-là ? La difficulté ? Nous avons trois lieux différents de théâtre ce qui ne nous permet pas de mutualiser les services d’accueil, de billetterie, de communication, de technique,» analyse Harold.

« La vie économique et culturelle de cette ville est incroyable »
«J’ai découvert qu’Avignon était une ville de tourisme d’affaires, ce que je ne mesurais pas du tout. Or, dans Avignon, nous sommes la seule salle –Le Rouge Gorge-, en intramuros, à pouvoir accueillir jusqu’à 300 personnes debout et 200 personnes assises –hormis le Palais des papes qui va jusqu’à plus de 500 personnes-. J’ai commencé à travailler, de façon informelle, avec la filière touristique pour cartographier les espaces de séminaires, festifs, pour trouver une dynamique et une synergie afin de mutualiser le travail. Je réfléchis également à cela pour le festival et aussi dans le domaine du social. Mon dada ? Rires. C’est justement cela : organiser et structurer. »

Harold David au Rouge Gorge

Mon parcours ?
« Ma formation m’a porté dans les lettres modernes, l’histoire et les arts du spectacle. J’ai toujours été dans le milieu culturel à la Maison des écrivains et de la littérature, j’ai été directeur du Festival Sud-Ouest et du Théâtre de Die, puis du Prix jeune écrivain et, depuis avril 2022, co-directeur avec Laurent Domingos d’Avignon Festival et compagnies. »

Le Rouge-Gorge
«Je m’occupe du Rouge Gorge pour toute la partie programmation, la partie évènementiel, la privatisation que ce soit pour des entreprises ou des personnes privées, explique Harold. Nous essayons de mettre en place une programmation régulière même si l’activité est un peu timide cette année. La raison ? Nous ne savions pas que le bâtiment –ancienne imprimerie Aubanel- avait des problèmes d’insonorisation. Or, nous avions bâti notre projet sur les musiques actuelles, musiques du monde, électro, chansons… Même si nous voulions conserver le côté Cabaret de l’établissement qui nous est très cher, nous avons dû revoir toute notre programmation et privilégier les spectacles acoustiques.»

L’atout du Rouge-gorge ?
«Ce lieu atypique est dans la mémoire des avignonnais qui y ont fait beaucoup de fêtes et en conservent de nombreux souvenirs. Egalement la salle est entièrement modulable ce qui nous permet d’envisager des formules aussi atypiques que le lieu. On y organise des défilés de mode et bientôt une grande friperie ayant pour thème des vêtements vintage. A partir de la semaine prochaine le Rouge Gorge propose tout une programmation dévolue à Noël pour les familles et les enfants avec beaucoup d’ateliers créatifs, des spectacles, des lectures de contes. A chaque fois nous décorons le lieu, ainsi Halloween a connu un franc succès avec 250 mômes déguisés qui dansaient comme des fous,» se remémore Harold.

Un lieu conçu pour les soirées à thèmes
«Nous voulons conserver cette idée d’un lieu polyvalent, où l’on organise des soirées à thèmes, des soirées cabaret, tous les mois et demi, avec le Cabaret classique et sa revue music-hall, le Cabaret magie… C’est un genre qui s’est beaucoup renouvelé mélangeant le cirque, l’illusion, la musique, le grotesque. Résultat ? Le public est vraiment au rendez-vous. Nous concoctons aussi des soirées privées pour les entreprises et les particuliers.»

La clientèle ?
«Elle est très éclectique et diffère selon la proposition. Elle est familiale lors des vacances scolaires. On s’est rendu compte que beaucoup de grands-parents accueillaient leurs petits enfants lors des vacances et recherchaient, pour eux, des sorties. Concernant les concerts c’est vraiment la nature de la proposition qui déterminera le public. L’électro attirera les jeunes de 20-35 ans ; Le rock les 45-65 ans. Notre choix ? Nous situer au carrefour de toutes les générations. On pourrait penser que toutes ces opérations pourraient diluer l’identité du lieu, mais sa nature est d’être ouvert à tous les publics et de travailler les thématiques et les cycles comme en se calant sur les saisons. C’est ce que nous avons commencé à faire.»

Le mot est passé tout de suite
«Très rapidement nous avons souhaité mettre le lieu à disposition des associations, sur des sujets qui nous touchent, que l’on a envie de défendre comme La journée de lutte contre les violences faites aux femmes le 25 novembre dernier via l’association Rheso ‘rhésolument humain’. L’évènement avait pour but de lever des fonds mais ce qui nous a émus ce sont les témoignages de ces femmes, venues se réparer en défilant, sur la scène, en tant que mannequins. Une autre association apportant son aide aux migrants nous a contactés. A chaque fois que le calendrier nous en donne l’opportunité, nous devenons partenaires d’associations en mettant le lieu à disposition.»

Michaël Perras, patron de la Maison des fondues, expert- comptable et administrateur

Connaissez-vous La Maison des fondues ?
Qui a Avignon ne connaît pas la Maison des fondues qui a, de tout temps, bercé les amoureux d’Avignon, les mères et les filles venues y nourrir leurs liens ?
Pourtant, Michaël Perras n’avait jamais, auparavant tenu d’établissement de restauration, sa formation d’expert-comptable le conduisant à faire partie du socle tertiaire en entreprises. Mais là, c’est bien en salle et derrière le bar qu’il cultive son plaisir d’être chef d’entreprise. Tombé lui aussi amoureux de la ville il s’y installe en novembre 2017.
«Nous connaissions l’ancienne gérante, Margareth, qui lors du mois de juillet 2013 nous en a confié l’activité. Depuis j’avais toujours eu l’idée de reprendre l’établissement. J’en avais même clairement envie. Pourquoi ? Parce que l’établissement est situé au cœur d’Avignon, dans une rue totalement refaite, habitée et animée par des artisans. La salle est de belle taille. Ce que j’aime dans ce métier ? Accueillir des gens, faire en sorte qu’ils vivent un très agréable moment, le temps de manger, de se parler. Et puis j’apprécie aussi partager le goût du bon vin. L’autre atout ? C’est un restaurant du soir car compte-tenu de nos autres activités nous n’aurions pas pu ouvrir le midi.»

Un restaurant ovni au cœur d’Avignon
«Finalement ce restaurant va à l’inverse du modèle économique avignonnais qui est une économie saisonnière en lien avec la période estivale et touristique de la fin du printemps jusqu’au début de l’automne alors que pour la Maison des fondues c’est la période la plus creuse, analyse Harold David. La pleine saison, pour nous, c’est maintenant avec une autre clientèle. Nous ne pouvions pas prendre un restaurant lambda parce que nous n’avions aucune compétence en ce domaine. Lorsque j’ai voulu creuser le sujet des fondues, je me suis rendu compte qu’il s’agissait d’un plat de paysan pour les pauvres. C’est un plat de partage. Alors ca avait un sens ! Et puis des fondues, il en existe des milliers dans le monde entier. D’ailleurs, nous mettons à disposition, dans le restaurant, tous les livres que nous avons acquis sur le sujet et croyez-moi, ils sont très intéressants.»

A bien y regarder
La Maison des fondues propose une très grande variété de fondues au fromage, les Must avec des brochettes, avec des saucisses, des champignons, avec différentes viandes, accompagnées pour les amoureux de champagne. Certaines fondues sont à base de vin blanc et de fromages et d’autres au bouillon. Tous les plats sont faits maison, élaborés sur place à partir de produits bruts et frais à l’exception des glaces, de la chantilly et des carpaccios. La viande est de provenance française. Les sauces et mayonnaises sont aussi maison. Les fromages sont frais et toujours de provenance française. Les pommes de terre sont épluchées à la main.

La Maison des fondues

Des formules Maison des fondues et Rouge gorge
« Nous allons construire des synergies entre la Maison des fondues et le Rouge gorge. Pour la soirée du 31 décembre 2022, deux réveillons seront organisés dans les deux établissements. Nous proposerons aux convives de la Maison des fondues de poursuivre la soirée à partir de minuit au Rouge gorge pour profiter de la soirée dansante. A l’avenir nous proposerons un repas à la Maison des fondues + le spectacle au Rouge gorge à prix attractif, » conclut Harold.

Les infos pratiques
La Maison des fondues. Depuis 1989. 72, rue Bonneterie à Avignon. Fermé le lundi. Ouvert tous les autres jours uniquement le soir. Aux beaux jours le restaurant propose une terrasse et des tapas. Le lieu peut être privatisé lors d’évènements privés.


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

La dépêche rédigée par la Préfecture de Vaucluse vient de tomber. Le sujet ? La tenue des festivals d’Avignon en 2024 dans une France rythmée par l’organisation des jeux olympiques et paralympiques.

La problématique ? Comment déployer les 30 000 gendarmes et policiers nationaux nécessaires à la sécurité, sur tout le territoire et en particulier en Vaucluse, et sur l’ensemble des manifestations sportives en cours, et avant cela, sur les deux festivals d’Avignon ?

Stupeur et tremblements
Puisqu’il a même été question, un temps, de purement et simplement annuler les festivals de France et de Navarre. Après le Covid, les différents confinements et une culture presque identifiée comme ‘non-essentielle’, la coupe de la révolution était pleine.

Finalement, le ‘En même tempiste’ aura ouvert la voie de la sagesse
Et la Préfecture offre à tous… La date de fin à laquelle devra se conformer la Culture en Vaucluse. Ainsi les festivités devront tomber le rideau dimanche 21 juillet 2024.

Mais tout cela ne donne pas la date de début des festivals.
On pourrait en conclure que celle-ci devrait intervenir tout début juillet sachant que le festival d’Avignon se déroule sur une vingtaine de jour et deux à trois jours de plus pour le festival Off, ce qui posera un autre problème : la fin de l’année scolaire qui, elle, devrait intervenir à la fin de première semaine de juillet.

Pourquoi faire coïncider la fin de la période scolaire au commencement des festivals d’Avignon ?
Parce que nombre de groupes scolaires sont devenus de grands lieux du festival Off comme en témoigne l’école maternelle et primaire Simone Veil 1, rue des Ecoles -ex-village du off désormais installé 6, rue Pourquery-de-Boisserin- au sein de l’école Bouquerie ; l’ensemble Saint-Jean-Baptiste de la Salle, rue Notre Dame des 7 douleurs, Lycée Louis Pasteur devenu le Théâtre Présence Pasteur 13, rue du Pont Trouca, et l’espace Alya rue Guillaume Puy –Campus Sud Pasteur- le gymnase de l’école Saint-Joseph, 62, rue des lices, le Théâtre Mistral 35 rue d’Annanelle pour ne citer que ceux-là…

DR Festival Off

Pourquoi tomber le rideau dimanche 21 juillet 2024 ?
Parce que les Jeux olympiques et paralympiques se dérouleront de mercredi 24 juillet à dimanche 11 août, puis de mercredi 28 août à dimanche 8 septembre et qu’il fallait un peu de temps pour redéployer les Forces de l’ordre qui, cette année, n’auront, clairement, pas droit aux vacances.

La réponse est ici
«Au-delà même des cérémonies d’ouverture –vendredi 24 juillet- et de clôture -du 28 août au 8 septembre et des compétitions-, qui s’étaleront de mercredi 24 juillet à dimanche 11 août 2024, puis de mercredi 28 août à dimanche 8 septembre-, les périodes en amont de celles-ci, dès jeudi 18 juillet, exigeront également un effort particulier de sécurisation dans le contexte du relais de la flamme qui sillonnera le territoire national », fait-on savoir à la préfecture de Vaucluse.

Quand on parle enfin de concertation
Alors que le sénateur Lucien Stanzione et 29 de ses pairs s’inquiétaient, récemment, du manque de communication entre les ministères de l’Intérieur, des Sports et de la Culture, pour sauver les festivals d’Avignon 2024, la Préfecture précise : «Les trois ministres viennent de décider et d’annoncer le maintien de l’édition 2024 du Festival d’Avignon dont le final est fixé au 21 juillet 2024.»

Tous d’accord
«La préfète de Vaucluse et la maire d’Avignon se félicitent de cette décision qui satisfait l’ensemble des partenaires. Il revient désormais à la préfète d’organiser, en lien avec la maire d’Avignon et les directeurs des Festivals d’Avignon, le dispositif de sécurité à déployer pour l’édition 2024 et de fixer la date d’ouverture des Festivals In et Off 2024. En parallèle, le travail conjoint et les échanges se poursuivent pour la bonne organisation de l’édition 2023.»

En attendant l’année prochaine ?
La 57e édition du Festival Off d’Avignon se déroulera du 7 au 29 juillet 2023 pour 22 jours de liesse culturelle et 19 jours pour le Festival d’Avignon qui s’étendra du 6 au 25 juillet 2023.

Les chiffres du In et du Off 
Les chiffres de la 76e édition du Festival d’Avignon ? Ce sont 134 260  dont 29 000 gratuites entrées, un taux de fréquentation de 92% pour 105 entrées payantes et entre 50  et 100 millions de retombées économiques selon Paul Rondin, le directeur délégué du festival.
Les chiffres de la 56e édition du festival Off ? Ce sont 1 570 spectacles dans 138 lieux, 33 000 levers de rideaux, 270 000 spectateurs – 300 000 visiteurs en 2019- et 1,5 millions de billets délivrés, et une année record pour la billetterie solidaire Ticket’Off avec 116 268 places achetées. Voilà qui remet les pendules à l’heure.


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Lors de la conférence de presse de pré-bilan du Festival off d’Avignon, Laurent Rochut, directeur de la Factory, (Théâtre de l’Oulle, Salle Tomasi, La Chapelle des Antonins) auteur et metteur-en-scène et co-président d’AF&C propose son analyse du Festival off d’Avignon. Baisse de fréquentation, canicule, souffrance des compagnies, loyers des logements exorbitants, il est temps de réguler et de renouveler ce Festival du théâtre émergent.

«Je vais faire mon bilan du Off vu de la Factory, assure Laurent Rochut, vice-président AF&C. Nous sommes à la Factory depuis 7 ans et travaillons à l’année. Le festival Off d’Avignon en 2022 c’est 12% de cartes du off en moins et c’est aussi 25% des spectacles vendus en France, ce qui en fait une place du marché incontournable.»

Actuellement ?
«Le festival Off est fragile : 12% de cartes du off en moins par rapport à 2019 c’est que nous n’avons pas encore récupéré tout le monde. Nous allons devoir interroger tous les acteurs de la ville et le Grand Avignon sur des navettes, un flux des déplacements publics mieux pensé afin de requalifier des invitations plus lointaines, augmenter l’offre de logements et baisser l’ascension des prix des logements, car les compagnies paient, chaque année, des loyers exorbitants. Nous allons également interroger la ville en demandant comment rafraîchir Avignon lorsque l’on subit plusieurs semaines à plus de 38°, ce qui constitue une vraie problématique urbaine. Végétalisation, création de zones d’ombre… Les chantiers seront nombreux.»

On a donc pensé que ce festival allait de soi
«Le festival off c’est comme une principauté qu’on pose en juillet et qu’on démonte comme un château gonflable, et puis qu’on remonte en juin de l’année prochaine… On a donc pensé que le festival allait de soi, pourtant, le Off ne va pas de soi ! Et nous avons mis en place, cette année, des chantiers dont un me porte particulièrement à cœur et que je porte depuis plus de 4 ans : transformer cette ville en filière, faire que ces investissements colossaux qui ont été faits depuis tant d’années et de ces 70 à 80 théâtres en ordre de marche -qui dorment toute l’année en dehors de juillet -ne soient plus un gisement inexploité, ni libéral –comme nous en sommes accusés.»

Réguler le marché
«C’est exactement le contraire qui se passe puisque nous sommes en train d’essayer de doter ce Off d’outils de régulation et d’outils performants. On évoque la réduction du nombre de créneaux ce qui pourrait paraitre très bien mais qui, en réalité, aura pour conséquence d’augmenter la valeur des théâtres existants. Mais ça n’est pas le propos !»

Le devenir l’art vivant
«Le propos c’est d’appréhender ce que va devenir ce marché, de concevoir des outils de régulation qui tiennent compte de ce que va devenir l’art vivant dans les prochaines années avec le risque de voir arriver de grosses structures très soutenues, d’importantes productions qui pourraient devenir les seules à exister sur le terrain des compagnies indépendantes émergentes qui ne pourraient, elles, disparaitre. Pour cela il faut des relais et c’est aussi forcément de l’aide et de la subvention publique.»

Conférence de presse du pré-bilan du Festival off

Ceux qui ne veulent pas
«Ceux qui nous ont attaqués sont ceux qui, depuis des décennies, ne veulent pas que la ville change. Aujourd’hui nous ne sommes pas attaqués par les fondateurs qui sont tout à fait légitimes, mais par les héritiers. Ces héritiers vont devoir se faire à l’idée que cette ville devienne une filière parce que l’ensemble de l’art vivant mérite qu’Avignon le devienne, à l’année, de septembre à juin. Les compagnies doivent pouvoir, désormais, se tourner vers ces acteurs qui les font exister l’été -de manière économique très rentable-et que ces aides deviennent publiques. C’est-à-dire que ça ne doive rien coûter aux compagnies, que celles-ci puissent venir massivement faire des résidences à l’année à Avignon, que leur transport et hébergement soient pris en charge et que les lieux mettent à disposition salles et plateaux. L’idée ? Que les lieux soient aidés sur leurs charges fixes. Près de 80% de cette aide -en prenant en compte, 20% de la somme dévolue au parc machines qui s’usera plus vite- soit remise au pot du festival en régulant la valeur du créneau, soit en supprimant un créneau ce qui permettra d’offrir des temps de montages plus humains aux techniciens des compagnies.»

Du néo-libéralisme… à la défense de la régulation
«Les néo-libéraux que nous étions sont en fait devenus les meilleurs défenseurs d’une régulation et du service public. Il y a plusieurs années, les fondateurs ont empêché une scène nationale de s’installer à Avignon. Il s’agit de la scène nationale de Cavaillon qui devait s’installer au Cloître Saint-Louis. A l’époque, ceux qui avaient de ‘très belles places’ dans la ville ont fourni un tir de barrage tellement puissant auprès du Ministère que celui-ci a reculé, installant la Scène nationale à Cavaillon. Il serait temps que le Ministère se mette au centre du village national, cette filière à l’année, qu’est Avignon pour qu’elle soit incontournable pour le théâtre, pas pour que nos petites affaires estivales prospèrent, mais pour que cet outil, que le ministère finance depuis 40 ans,  lui revienne encadré d’une vraie politique. Et c’est à lui d’instaurer cette politique puisque nous ne pourrons pas le faire sur la base des 130 acteurs, associations et entreprises privées que nous sommes.»

Participer à fonder l’art vivant depuis Avignon, ville nationale
«C’est ce dont nous prenons acte aujourd’hui avec ce nouveau Conseil d’administration, cette collégialité. La nouvelle politique qui inspire notre gouvernance ? Donner le cap, offrir des perspectives. Nous avons à participer à un mouvement majeur pour l’art vivant en France. Le festival doit faire sens, dépasser l’été pour participer à fonder l’art vivant. Je reçois 100 demandes par an, en danse, alors que je n’ai que 10 places à proposer et des centaines en théâtre alors que je n’ai pas plus de places que pour la danse. Pour l’instant ? Les compagnies sont en souffrance : hébergements, déplacement… Théâtres et compagnies doivent pouvoir se rencontrer.»

Les journalistes de la conférence de presse

57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

La 56e édition de 2022 du Festival off d’Avignon a signé le retour de 1 570 spectacles dans 138 lieux. En 2021 les spectacles étaient au nombre de 1 070 dans 116 lieux. En revanche la fréquentation du plus grand théâtre du monde a chuté passant de 300 000 à 270 000 spectateurs. Un chiffre à mettre en rapport avec la désaffection des salles culturelles au niveau national impacté de 20 à 30% pour certains, par les alertes canicules et la propagation du covid pour d’autres et, sans doute aussi, d’une inflation galopante de 6,1% en juillet 2022 contre 2,2% en 2021.

Les membres du bureau d’AF&C, de gauche à droite Raymond Yana, Laurent Rochut, Laurent Domingos, Harold David,  Hugues Leforestier, Jérémy Bourges

La fréquentation du Festival Off
«En 2019 AF&C avait estimé à 300 000 le nombre de spectateurs venus assister aux spectacles pour 1,7 million de billets délivrés resitue Harold David co-président de AF&C. Bien que les chiffres ne soient pas encore remontés des théâtres d’Avignon et des compagnies, puisque nous n’y avons pas accès. Si on s’appuie sur le nombre de cartes off nous pensons que 270 000 spectateurs étaient au rendez-vous de cette 56e édition pour 1,5 million de billets délivrés.»  

La carte off
«Nous avons vendu cette année 59 000 cartes du off contre 67 000 (-8 000) en 2019, déplore Laurent Domingos, co-président du Festival off. Près de 16% des détenteurs de cette carte résident dans le Vaucluse et 11% ont entre 12 et 25 ans. Cette carte off permet de bénéficier d’un tarif réduit de 30% sur les spectacles, d’entrer dans des lieux culturels et patrimoniaux de la Ville à petit prix, d’assister aux concerts, au bar du off ainsi qu’à d’autres événements sur le territoire national. Ce chiffre fait écho, en 2022 à la baisse de fréquentation des scènes sur l’ensemble du territoire de l’ordre de 20 à 30%.»

+15% de Ticket’Off
«L’année est record pour les Ticket’off –la billetterie solidaire- avec 116 268 places achetées ce qui a permis d’abonder le Fonds de soutien à la professionnalisation à hauteur de 116 268€ pour les années 2022 et 2023, a entamé Harold David, précisant que 90% des spectacles présentés y figuraient. C’est aussi l’endroit où les spectateurs peuvent faire leur choix de spectacles. Nous pensons que cette hausse du nombre d’utilisateurs de Ticket’off est due à de nouvelles pratiques préférant le digital en réaction à la crise sanitaire.»
«En 2019 nous étions en dessous des 100 000 billets,» a précisé Laurent Rochut.

Harold David Co-président du off

Les accréditations professionnelles
«En 2019 près de 2 647 personnes avaient été accréditées Festival Off dont 610 pour la presse, détaille Harold David. Cette année nous avons délivré 1 928 accréditations dont 420 accréditations pour la presse. Nous avons reçu moins de programmateurs sans doute à cause du Covid. Le nombre d’accréditation est inférieur à celui de 2019. Cela est volontaire de notre part puisque nous avons voulu sélectionner de manière plus drastique les professionnels qui demandent une accréditation car nous pensons que par le passé, il y a peut-être eu un certain laisser-aller, ce qui fait que beaucoup de cartes étaient données à des personnes qui  n’avaient pas forcément de rôle professionnel à jouer vis-à-vis des compagnies. Nous avons comptabilisé pour le moment plus de 2 000 retombées presse ainsi que beaucoup d’articles parus au national et à l’international, dont beaucoup de papiers de fond sur Avignon Festival et Compagnie, notamment sur le projet que nous portons.»  

Déplacement géographique du Village du Off
«
Le village du off est désormais près d’un axe central d’Avignon à l’école Bouquerie, 6 rue Pourquery de Boisserin (Ndlr : en face de la Scala, ancien Pandora pour cause de travaux dans l’école Simone Veil –ancienne école Thiers, rue des écoles) détaille Laurent Domingos. 7 000 personnes par jour fréquentent le Village du off dont 800 personnes le soir, lors des concerts. Le village du off est devenu une maison commune où public, artistes et professionnels se rencontrent vraiment. 150 évènements y ont été organisés : conférences, tables rondes, ateliers, concerts.» « Il nous reste beaucoup de travail à faire afin de rendre plus uniforme la fréquentation du lieu, notamment pour les tables rondes. Le déplacement géographique du Village du Off a joué en faveur de sa visibilité, notamment envers le public, qui a mieux identifié cet espace et y a passé plus de temps, s’y restaurant, s’y attardant…» a relevé Harold David.

Le fonds de soutien à la professionnalisation
«En 2022, 82 spectacles ont été identifiés comme bénéficiaires, précise Harold David, 262 artistes -126 hommes, 136 femmes et 2 personnes en situation de handicap- soutenus pour 1 569 représentations et un montant total 180 546€.»

Le partenariat avec la Maison Jean-Vilar-BNF
«La Maison Jean Vilar qui est également à l’année l’antenne de la BNF (Bibliothèque nationale de France) collecte, comme chaque année, programmes, dossiers de presse, affiches et autres supports des compagnies du Off et est partenaire avec AF&C du concours de la plus belle affiche.» 

La Nouvelle majorité
«Nous sommes issus d’une nouvelle majorité élue en avril 2022, cette édition est donc un test, même un crash test d’après certains, relate Harold David. L’ADN du Off est l’indépendance alliée à l’intelligence collective. Nous voulons valoriser et préserver la richesse et la diversité de la création artistique ; soutenir et accompagner ceux qui font le festival, les acteurs du off et permettre à tous d’accéder au festival.»

L’expérience avignonnaise
«Ce qui compte, c’est de travailler en amont avec les compagnies pour qu’elles sachent si elles peuvent ou pas faire Avignon, expose Laurent Domingos. Qu’elles puissent être mieux préparées, mieux formées par rapport à leur budget prévisionnel, à l’ensemble des subventions qu’elles pourraient toucher et être parrainées par des compagnies plus expérimentées. Nous mettrons en place ce dispositif dès la rentrée. L’expérience avignonnaise doit devenir positive.»

Laurent Domingos, co-président du Off

Promouvoir les compagnies étrangères
«J’ai été surpris par le rayonnement du Festival off à l’international, reprend Laurent Domingos. Des compagnies sont venues de Taïwan, de la Corée, du Brésil, de Québec, de la Suisse, de Belgique et des pays frontaliers. » « Nous avons reçu des délégations officielles et d’autres plus informelles, a complété Harold David, venues s’enquérir de la façon de collaborer ensemble dans la durée. Nous avons évoqué la meilleure façon d’accompagner les compagnies étrangères. Si nous voulons être à la hauteur il nous faudra nous donner les moyens pour recevoir de façon beaucoup plus professionnelle ces compagnies de l’autre bout du monde. Nous allons organiser un bureau d’accueil dévolu aux compagnies étrangères pour les accompagner sur les lieux, la réalité du festival, mais aussi sur le franchissement des frontières. Notre rôle sera de lever les difficultés. Nous travaillerons à offrir une meilleure visibilité du théâtre étranger, via un tiré à part et le Village du Off avec un pool ‘international’.» 

Concevoir un parcours Off à l’export
«Nous pourrions imaginer une réciprocité avec un parcours du Off à l’export, observe Harod David. La question : Comment faire lorsqu’ AF&C n’est pas le programmateur du festival off ? Peut-être passer par un appel à projets, à candidatures, entrer dans un dispositif de résidence… Si une vingtaine de pays accueillaient 5 compagnies alors 100 spectacles pourraient partir faire le tour du monde… »

Un projet triennal 2023-2026 pour structurer l’accompagnement du Off
«Nous abordons un projet triennal : 2023-2026 dont nous ferons la présentation à la rentrée, révèle Harold David. Il s’érige autour de 5 piliers en accord avec la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, qui nous a rendu visite le 9 juillet dernier ainsi que la Drac Paca (Direction régionale des affaires culturelles Provence-Alpes-Côte d’Azur), les collectivités territoriales et partenaires du Off.»

Les 5 piliers
«Nous voulions un projet structurant de conviction et politique demandant un engagement financier rappelle Harold David. Un tour de table avec les institutionnels et les professionnels sera mis en place à la rentrée pour une charte rédigée avant la fin de l’année. Les 5 piliers sont :
1. Une gouvernance reposant sur l’indépendance et l’intelligence collective ;
2. L’éco-responsabilité et sa phase opérationnelle ;
3. La professionnalisation avec un accompagnement et revisiter le fonds de professionnalisation qui n’atteint pas encore ses objectifs notamment auprès des compagnies émergentes ;
4. Le modèle économique avec comment passer d’une économie saisonnière à une économie hors saison en faisant d’Avignon et de ses territoires une fabrique des arts vivants avec nombre de théâtres qui souhaitent s’ouvrir aux résidences associées, à la réception des publics et travailler à une filière du théâtre indépendant, une Cinecittà d’un théâtre à la française ;
5. La diffusion qui est une vraie problématique du spectacle en France. S’il y a 1 570 spectacles proposés dans le Off c’est qu’il y a un vrai besoin des compagnies de montrer leur travail. Le festival donne un cadre à la relation commerciale avec un équilibre des forces. Cette régulation passera par le développement de nouvelles pistes, notamment en accompagnant mieux et plus les programmateurs au niveau national et international.»

Chloé Suchel, responsable de la communication AF&C

Le Plan média
«Nous avons fait le choix de la régionalisation plutôt que de la ‘parisianisation’ de l’information pour le plan média du festival Off, précise Harold David. Nous travaillons sur deux logiques : en amont et sur la dernière semaine du festival, indique Chloé Suchel, responsable de la communication. Depuis plusieurs années nous organisons un affichage à partir du mois de juin dans les 120km autour d’Avignon : Lyon, Montpellier, Marseille. L’idée ? Toucher les personnes qui peuvent facilement se déplacer, une journée ou deux pendant le festival. Nous nous implantons aussi sur le calendrier d’autres manifestations culturelles comme Les rencontres photographiques d’Arles puisque nous sommes sur les mêmes publics cible, nous recherchons des événements connexes. De début juin à fin juillet nous totalisons 800 faces en affichage urbain. Nous avons un partenariat avec France Télévision lors d’une campagne signée pour la dernière semaine de juillet afin de souligner qu’après le In il y a toujours le off. Nous avons des spots publicitaires avec France Bleu Vaucluse et France Bleu au national. Nous ciblons également les 12-25 ans via des médias spécifiques.»
«Nous avons mis en place des échanges de valorisation avec des supports papiers comme Télérama, Le Parisien, précise Harold David. Pour 2023, la question est prématurée. Nous prendrons en compte les résultats de cette année. Cela fera partie des sujets à aborder à la rentrée.»

La conférence de presse au Village du off lors du pré-bilan du Festival off d’Avignon

57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Pour la 16ème année consécutive, les critiques du Club de la presse Grand Avignon Vaucluse viennent de remettre les prix ‘Coups de Cœur’ du Festival Off à quatre spectacles.

Parmi dix spectacles sélectionnés, le Jury du Club de la presse Grand Avignon-Vaucluse a attribué les prix ‘Coups de Cœur du #OFF2022’ à quatre spectacles. Les critères de sélection étaient basés sur le texte, la créativité, la qualité scénique, l’implication et le talent des artistes.

‘Le journal intime d’adam et eve’ (Sham’s bar théâtre), par Cie Family Francis Grisol

Très loin du mythe religieux, c’est une œuvre unique en son genre : l’adaptation, pour la première fois en français, de trois livres de Mark Twain. Nous y suivons les deux premiers habitants de la Terre à travers leur rencontre, leur histoire d’amour et leur découverte du monde. De nombreux thèmes comme la peur , le pardon, le langage, la sexualité, la naissance, mais aussi la mort sont abordés en douceur tout au long de la pièce. Une écriture limpide et féministe, touchante et équilibrée entre des considérations profondes et un humour affiché. La mise en scène épurée n’en demeure pas moins riche de sens par le choix des postures et des costumes. Comme enfermé dans une boule de neige, le duo interagit avec subtilité avec son public tout en maintenant un jeu de comédien équilibré et sensible. Pièce émouvante, touchante et poétique.

‘Believers’ (Théâtre Le Grand Pavois), par la Compagnie Le 6’Thèmes Théâtre

Une histoire à la fois triste et belle, profonde et touchante, qui se compose à quatre mains pour un seul jeune couple que l’on voit s’aimer, se construire, fonder une famille… Une mise en scène étonnante et créative dans laquelle le décor tourne autour d’un seul objet : un lit, symbole du nid, de l’îlot dans lequel on se réfugie pour l’amour ou quand rien ne va plus. Des sujets forts : l’amour, la mort, la croyance, la responsabilité parentale, l’espoir bien sûr aussi… Et s’Il existe, Dieu, où est Il dans tout ça ? Pour qui ? Pourquoi ? Avec en filigrane la philosophie de Kierkegaard … et le Wonderful word de Black / Colin Vearncombe, si troublant ! De jeunes comédiens merveilleux et percutants, inoubliables, dans ce rôle trop sérieux de jeunes parents affectés par le handicap d’un enfant. Une terrible et belle leçon de vie.

‘Bienvenue au Bel Automne’ (La Luna), par la Compagnie Cavalcade

Avec ce spectacle, on est face à la vieillesse, certes, mais pour débloquer les portes du silence, rompre les tabous et célébrer la vie. Sylvia Bruyant, auteure et metteuse en scène de la pièce, saisit avec une plume au réalisme incisif et à l’humour tendre l’univers d’un EHPAD et crée avec talent un lien fort entre la grande vieillesse et les vieux en devenir que nous sommes. Elle dit elle-même aimer écrire sur les sujets qui la dérangent. On peut même dire « sur les sujets qui dérangent ». Dans cette pièce, donc, qualifiée par l’auteure de « fantaisie douce-amère », on retrouve Virginie, aide-soignante, qui vient d’être mutée à la maison de retraite « Le Bel Automne ». Parce qu’elle cherche désespérément à avoir un enfant, elle pense soulager sa douleur en passant des nouveau-nés aux vieillards. Avec elle, on découvre les autres membres de cette petite communauté : Maïté l’autre aide-soignante encartée CGT, la directrice quelque peu hystérique mais bienveillante, Dolorès infirmière misanthrope, le docteur, mais aussi toute une galerie de portraits des résidents, des lieux et des visiteurs, tous plus attachants les uns que les autres. Et ce combat pour devenir maman, comme un fil rouge, fait écho à ces fins de vie qui nous racontent tellement la vie. Qu’est-ce que le théâtre sinon une succession d’instants hilarants de tendresse qui nous amènent à questionner le monde et sa réalité parfois si cruelle ? Qu’est-ce que le théâtre sinon ce grand éclat de rire qui nous assaille comme une vague bienfaitrice et bouleversante ? ‘Bienvenue au Bel Automne’ est en cela un grand moment de théâtre. Parce qu’on en ressort grandi d’émotion et secoué du rire qui nous réconcilie avec la vie.

‘Der Menschen fresser Berg… ou la montagne’ (Episcène), par La Compagnie des Vrais Majors

Un spectacle de rue adapté à la scène, présentant une sortie de résidence du montage de l’adaptation du film allemand de 1930, ‘Der Menschen Fresser Berg’. Un spectacle qui casse le 4ème mur en invitant parfois le public à participer, qui casse tous les codes en intégrant également ceux qu’on oublie et qui sont dans l’ombre des pièces: metteur en scène et technicien. La mise en scène est folle, part dans tous les sens, toute la salle est sollicitée par les 4 comédiens qui semblent jouer leurs propres rôles avec une grande justesse. Un festival désopilant de foutraque bien monté, où tout vole en l’air, une bouffée d’air frais montagnard !


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Avec Délit d’Errance, Faïza Kaddour rend hommage à la grande chanteuse injustement oubliée Colette Magny

Mais qui connaît Colette Magny ? Colette Magny décédée en 1997 est injustement méconnue même si son tube « Mélocoton » refait surface grâce au rap français. Elle avait le talent de mélanger le blues à la poésie, le free jazz à la révolte….On l’a souvent comparée à un Léo Ferré au féminin, à une Janis Joplin à fleur de peau. Elle laisse pourtant une œuvre foisonnante, pas toujours audible quand elle «ouvrait sa gueule ». Des chansons certes mais aussi des collages, des tracts sonores, des actualités slamées de mai 68.

Faïza Kaddour fait sienne sa révolte

Faïza Kaddour n’a jamais rencontré Colette Magny mais quand elle découvre cette voix particulière, ses textes engagés, sa révolte -qui est toujours d’actualité envers l’environnement, la guerre, le racisme- elle se reconnaît dans ce combat et dans cette démarche artistique. Avec délit d’errance elle nous offre un spectacle qui n’est pas seulement un concert même si elle convoque des chanteurs que Colette n’aurait pas renié : Claude Nougaro, HK et les Saltimbanks, Daniel Balavoine, Barbara.

Elle s’adresse à Colette, l’interpelle pour mettre en valeur son engagement au moment de l’Algérie. Tout cela est très joyeux, simple avec juste un brin de folie comme pouvait l’avoir Colette Magny quand elle se passionne pour la pintade, animal indomptable et rêve d’un opéra en son honneur «Kévork et le Délit d’errance ».

Jusqu’au 30 juillet. 20H30. 10 et 15€. Théâtre des Amants .1 Place Grand Paradis.06 33 13 78 07.


57e édition du Festival Off, vers une organisation, une rationalisation et une internationalisation du plus grand théâtre du monde

Olympe de Gouges, cette femme de lettres qui était aussi femme politique fut, durant la révolution de 1789, de toutes les avancées sociales. Pourtant elle fut guillotinée le 3 novembre 1793. Elle avait 45 ans. Pourtant les historiens turent très longtemps la femme exceptionnelle qu’elle fut. Une pièce de théâtre lui rend hommage : Olympe de Gouges plus vivante que jamais, à aller voir au théâtre de l’Episcène. Magnifique.

C’est avec passion que la comédienne, Céline Monsarrat, nous fait découvrir cette femme d’exception dont le destin, tragique fut même poussé dans les oubliettes par les historiens. Pourquoi ? Sans doute parce qu’elle incarne bien avant l’heure, l’émancipation féminine, la liberté et l’altruisme.

Si des rues portent son nom,
nous sommes beaucoup à ne pas avoir en tête ce que furent ses combats. Pour nous les rappeler, Joëlle Fossier, l’auteur de la pièce et Céline Monsarrat déploient les derniers instants de la vie d’Olympe de Gouges, alors qu’elle attend de passer en jugement à la conciergerie. Nous sommes à l’époque de la terreur où la guillotine règne en maître.

Elle sait que l’issue sera fatale.
Mais avant de se présenter à l’échafaud, Olympe de Gouges déroule son existence, retrace son parcours, fustige la violence et les procès arbitraires vilipendant les bouchers-révolutionnaires qui lui font face. Elle égratigne avec force ceux que l’on a croisés dans nos livres d’histoire : Marat, Robespierre et Fouquet Thionville dont elle dénonce la folie stérile et meurtrière.

Ce qu’elle voulait pour la France ?
Une nation ouverte à la différence qui protègerait les plus humbles. Elle se bat contre l’esclavage et les droits des personnes de couleur, les droits des enfants mulâtres, des droits de reconnaissance des enfants naturels ; le soutien aux mères célibataires, la création d’une caisse patriotique… Bref, tout ce qui existe aujourd’hui.

Elle demande
l’égalité des droits civils et politique pour les deux sexes et l’instauration du divorce. Elle met au point un système de protection maternelle et infantile, réclame la création de maternités pour que les femmes accouchent dans de meilleures conditions. Elle prône la création d’ateliers nationaux –organisation pour l’emploi- au profit des chômeurs ; des foyers pour mendiants. Celle qui est considérée comme la 1re féministe de France est aussi une figure de la révolution française… Plus reconnue à l’étranger qu’en France !

(Re) découvir Olympe de Gouges
La pièce est rondement menée, rythmée, saisissante. On connaissait le talent de Céline Monsarrat –la voix, entre autres, de Julia Roberts- qui incarne avec force cette femme aux antipodes de la virago, mais fine, subtile et infiniment courageuse. On aime l’écriture raffinée et intelligente de Joëlle Fossier. Un très beau spectacle qui donne l’envie de retrouver l’héroïne, très vite, pour en savoir toujours plus sur cette époque de la terreur et sur les hommes et les femmes qui la vécurent.

Les infos pratiques
Olympe de Gouges, plus vivante que jamais. Jusqu’au 30 juillet. Relâche le 25 juillet. 13h10. Théâtre l’Episcène. 5, rue Ninon Vallin. Avignon. Réservation 04 90 01 90 54.

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