22 novembre 2024 |

Ecrit par le 22 novembre 2024

Femmes d’action, femmes d’exception, quand la préfète témoigne

Le Soroptimist International Avignon a organisé mardi 26 septembre 2023, dans les salons de l’Hôtel consulaire, à Avignon une manifestation sur le thème femmes d’action, Femmes d’exception avec pour invitées, Sophie Devins cheffe mécanicienne de la Patrouille de France ; Georgia Lambertin Présidente de la Chambre d’Agriculture de Vaucluse ;  Stéphanie Roch, sommelière, cheffe de cuisine et organisatrice de mariages et Débora Waldman cheffe de l’Orchestre National Avignon-Provence. Mission ? Bâtir un projet inspirant pour tous les types de femmes qu’elles soient en activité, en reconversion, en recherche d’emploi ou encore étudiantes. La soirée, animée par Laurent Garcia, rédacteur en chef de l’Echo du mardi, a accueilli 120 personnes.

De gauche à droite : Quatre femmes d’exception : Debora Waldman, Capitaine Sophie Devins, Stéphanie Roch et Georgia Lambertin

Violaine Démaret, Préfète de Vaucluse,
est venue saluer l’initiative des Soroptimist International d’Avignon. « En tant que représentant de l’Etat je soutiens cette manifestation et les politiques de l’Etat sont sensibles à tout ce qui encourage l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. C’est aussi notre rôle de parents de défendre l’égalité auprès de nos petites filles et petits garçons qui seront amenés à considérer que c’est une évidence.

En s’adressant aux femmes d’exception réunies par les Soroptimist,
Violaine Démaret, a continué : «Chacune d’entre vous a réalisé un parcours d’exception qui a demandé un niveau de compétence, ce qui fait que votre place est évidente, et vous nous direz comment, dans ce caractère exceptionnel vous avez été, très souvent, les premières et comment, dans tout cela, tout devient possible.»

«Tout cela doit se faire savoir et connaître.
Mais au départ de tout cela, il y a l’envie et la confiance. Nous souhaitons que demain, ces parcours exceptionnels deviennent la norme. Merci d’incarner cette différence et cette exigence. J’ai la conviction, comme vous, que l’on est ce que l’on est, et que l’on ne réussit bien, que dans la compétence.»

«Nous menons des politiques publiques pour l’égalité salariale,
poussées également par des collectifs de femmes et d’hommes, et le Gouvernement s’en saisit de plus en plus. Chaque préfecture, accueille en son sein un délégué aux Droits des femmes et à l’égalité. En Vaucluse, c’est Elodie Goumet. Et nous menons des politiques actives et concrètes dans ce sens.»

120 personnes étaient présentes pour cette invitation des Soroptimist International d’Avignon

«Certains ont encore du mal à imaginer que l’on puisse être préfèTe et PréfèTe à 40 ans.
Je suis la première préfète de Vaucluse et j’ai souvent été la 1re comme la 1ere cheffe de cabinet du préfet, puis, 1ere secrétaire général de préfecture. Je n’en tire pas de gloriole particulière mais ces 15 dernières années  -J’ai commencé à être préfète en 2008- j’ai vu une révolution s’opérer.»

«Mon 1er poste de sous-préfète, je l’ai fait au cabinet du préfet de l’Ain, à 27 ans.
Je m’y suis occupée des questions de sécurité. Donc j’ai dirigé, au quotidien, des policiers, des sapeurs-pompiers, des gendarmes… Certains ont estimé que ça n’était pas tout à fait naturel. Ça vous le sentez… Par contre en discutant, ça s’arrangeait. En revanche, les femmes qui n’avaient jamais eu de cheffe avant moi –et aussi jeune- ont eu des difficultés ‘à l’avaler’. J’ai connu des obstacles en tant que jeune manager et clairement, le sujet n’était pas mon mode de management, mais plutôt qui j’étais et parce que j’étais une femme. Ça m’a coûté, mais ça a été un sujet plus pour les autres que moi.»

Violaine Démaret, Préfète de Vaucluse

«Les changements s’opèrent rapidement,
je le vérifie car nous sommes rigoureuses, carrées, nous avons de la personnalité. Un exemple ? J’ai eu envie, assez rapidement, d’avoir des enfants. Or, Il y a 15 ans, il n’y avait presque pas de sous-préfète. Et certainement pas de sous-préfète avec des enfants. Je me marie en sortant de l’ENA (Ecole nationale d’administration), prends mon premier poste et on me fait comprendre qu’avoir un enfant n’est pas une bonne idée.

«Je pose la question et je comprends, à la réponse,
que celle-ci n’est pas prévue. Je rencontre deux femmes sous-préfète, et l’une d’elles me dit qu’elle a pris 15 jours ne serait-ce par éthique tandis que l’autre s’est faite virer par son préfet. Je suis enceinte, j’appelle le Ministère de l’Intérieur pour le dire. On me répond Votre préfet est OK ? Je dis oui… Tout roule. »

«Comme je suis un peu têtue j’ai récidivé,
avec un autre préfet mais avec le même mari (Rires). J’ai appelé le Ministère de l’Intérieur pour le leur dire et ils me répondent : C’est génial. Ne t’inquiète pas, si jamais tu changes de préfet, on lui expliquera comment ça se passe. Pourquoi ? Parce que durant ces trois ans, on a eu un secrétaire-général –homme-, dans ce ministère, qui a considéré qu’il fallait faire la révolution et proposer des postes de sous-préfètes. Les gouvernements de ces 10 dernières années ont fait le choix de nommer des sous-préfètes à des postes de plus en plus importants.»

Les parcours inspirants de femmes leaders

Femmes d’action, femmes d’exception, quand la préfète témoigne

Stéphanie Roch, (prononcer Roc) sommelière, disciple d’Escoffier fondatrice et gérante du restaurant gastronomique le Mas de l’Echanson depuis 12 ans –juin 2011-, figure dans le Gault & Millau. Elle fait partie des invitées de la soirée ‘Femmes d’action, femmes d’exception, organisée par les Soroptimist d’Avignon qui se déroulera à la Chambre de Commerce et d’Industrie de la Cité papale, cours Jean Jaurès dans l’intramuros, mardi 26 septembre, à partir de 18h, sur réservation.

«Après un bac hôtelier obtenu à l’Ecole hôtelière d’Avignon,
je me suis spécialisée dans le vin via un brevet professionnel et une mention complémentaire. A la suite de cela, j’ai travaillé dans plusieurs établissements étoilés : La Mirande, l’Auberge de Noves, puis je suis partie un an en Australie, pour, ensuite, revenir au Domaine de Valmouriane. C’est là que j’ai pris la décision de créer mon propre restaurant.»

«Petite ?
Je voulais être cheffe d’entreprise mais je ne savais pas encore de quoi. Ça peut paraître étrange. J’ai pensé au tourisme mais comme j’étais pressée de rentrer dans le monde du travail, je suis entrée à l’école hôtelière dès la seconde. Après ? Ça m’a beaucoup plu. Etais-je entourée par des chefs d’entreprise dans ma famille ? Oui, mon père –semencier spécialisé dans le melon-, ma mère –coach-, mes grands-parents –fournisseurs de matériel de bureau en Hollande-. Est-ce que mes parents m’ont coaché ? (Rires) oui ! J’étais bien entourée.»

Lorsque vous regardez votre parcours quelles ont été les étapes, les événements fondateurs de votre carrière ?
«Ça a été, en partie, le terreau familial. Mais ce que j’ai découvert et qui m’a enchantée c’est l’accord mets et vins. Pourquoi j’exerce ce métier ? Pour donner le sourire aux gens. Ici, le midi, on a beaucoup de chefs d’entreprise qui viennent se restaurer, faire des repas d’affaires. Certes, lorsque les contrats se signent ce n’est pas totalement grâce à la finesse du repas mais cela y contribue. Parce qu’ils ont travaillé avec leur invité toute la matinée et que la signature se fait souvent au terme du partage d’un bon repas. Pour d’autres cela pourrait paraître anecdotique, mais pour moi c’est très important.»

La terrasse du Mas de l’Echanson

«Depuis l’après Covid, nous nous sommes lancés dans l’organisation de mariages,
de baptêmes, d’événements familiaux ou autres. Nous le faisions, avant, pour satisfaire nos habitués mais désormais nous le proposons. C’est un autre métier, dont je me suis emparée, wedding planner –organisateur de mariage-.»

«Avez-vous des problèmes de recrutement ?
Depuis trois ans nous avons pris la décision de fermer le samedi après-midi et le dimanche, pour que les salariés disposent du samedi après-midi, du dimanche et du lundi en repos. De fait, cela a convenu et a permis de fidéliser les salariés. J’ai fréquenté le CJD Avignon –Centre des jeunes dirigeants- durant 9 ans. J’y ai beaucoup appris comme de quelle façon gérer une équipe et mettre une bonne ambiance. Du coup, j’ai très peu de turn-over.»

Mais alors comment faites-vous pour travailler le samedi et le dimanche ?
«Mon équipe prépare tout en amont et, si nous avons un groupe le samedi midi, nous ne travaillons pas le samedi soir. Pour le dimanche, qui est le jour de repos de mon équipe habituelle, je travaille avec des chefs à domicile –comme mon ancien second- et des extras, des auto-entrepreneurs, tous, souvent, anciens salariés. Ce qui est servi le dimanche a été au trois quarts élaboré et réalisé par mes salariés, la nouvelle équipe du dimanche n’ayant qu’à finir les cuissons et envoyer les plats.»

Les hommes et les femmes qui m’ont inspirée ?
«Je suis très admirative de l’aventurier Mike Horn qui ne lâche rien et vit ses aventures à fond. Mon père a également ce trait de caractère, pas dans quelque chose de physique mais c’est quelqu’un qui s’implique à fond. Il est ce chef d’entreprise qui a très bien mené le développement de sa société -1 melon sur 3 dans le monde provient de ses semences sans OGM (organismes génétiquement modifiés) et issues d’hybridations de plusieurs variétés-. En plus de cela il a créé un concours hippique devenu, désormais européen ‘Les Masters du cheval ibérique’.»

Fleurs de courgettes farcies du chef Karim Abou El Ella

Comment avez-vous bâti votre carrière et surmonté les épreuves ?
«Je n’ai jamais eu peur de me lancer car je me disais que je ferai face aux problèmes un par un lorsqu’ils se présenteraient. Je n’avais pas envie de les imaginer. Pourquoi ? Parce qu’à imaginer tous les freins, on n’avance pas et que cela peut mettre un terme à l’envie de faire. Je préfère y aller.»

«Au départ, très sûre de moi, je me suis lancée
et lorsqu’une difficulté se présente, c’est vrai, je peux avoir un ‘coup de mou’ mais toujours, je rebondis. J’ai dû faire face à un énorme problème, celui d’avoir pris un mauvais chef de cuisine. Ça a été très compliqué. J’ai dû le garder huit mois alors qu’il mettait une très mauvaise ambiance, faisant fuir le personnel et ainsi construire et déconstruire trois équipes en huit mois. C’était une catastrophe. J’ai dû fermer le restaurant durant deux mois en juillet et août 2019 pour, ensuite, remonter une équipe à l’exception du plongeur qui était le seul à être resté.»

Ensuite ?
«J’ai redémarré le restaurant alors que nous étions frappés par le Covid en mars de cette même année avec une trésorerie très entamée. C’est là que l’on s’est demandé ce que l’on pourrait faire que l’on ne faisait pas avant : des mariages –dont le plein bat de mi-avril jusqu’à fin octobre-, des soirées à thème. Je suis également en train de revoir la décoration du restaurant car il faut toujours se renouveler, rebondir et faire différemment des autres.»

A-t-il été difficile de s’imposer en tant que femme dans ce métier ?
«Oui. J’ai pris ma décision de monter mon entreprise à 25 ans parce qu’à diplôme égal, j’étais déjà sous-payée par rapport à un homme. Je me suis dit que puisque je travaillais beaucoup pour les autres, autant le faire pour moi tout de suite. C’est cette différence de traitement entre l’homme la femme qui m’a fait créer mon entreprise plus vite. Je n’ai pas ressenti la même chose lorsque je suis allée démarcher les banques. J’étais bien diplômée et j’avais un bon dossier.»

La salle du Mas de l’Echanson, restaurant gastronomique

Apprendre à s’imposer en douceur
«Par contre cela a été compliqué avec mes salariés. J’étais une femme de 25 ans, blonde de surcroit. J’ai donc imposé le vouvoiement. Au début le management a été compliqué. J’ai donc posé tout de suite les règles : l’organisation et la qualité de travail attendu. Après, le plus difficile a été avec les fournisseurs. J’avais vraiment l’impression qu’ils me faisaient des prix hauts. Un exemple ? Alors que je négociais un produit à 10€ le kilo, le simple fait d’envoyer mon chef le faisait tomber à 6€ le kilo. Alors je me suis adaptée : j’envoyais mon chef selon  les fournisseurs qui venaient, ou tout simplement je renonçais à travailler avec eux.»

«Désormais les maîtres cuisiniers,
tous ces chefs étoilés réunis par Christian Etienne m’ont adoptée. On fait beaucoup de manifestations ensemble, comme lors des happenings organisés avec l’Institut du cancer Avignon-Provence Sainte-Catherine

Quels sont les obstacles qui ne s’effacent pas ?
«Oui, il y a des obstacles que je n’arrive pas à franchir, mais ça n’est pas grave parce que ça va venir. Les soirs de semaine sont calmes, depuis toujours, au restaurant. Je n’arrive pas à changer cela, alors j’y travaille. Sinon je pense qu’une femme peut faire tout ce qu’un homme fait, hormis en ce qui concerne porter du poids. Mais pour moi, la différence s’arrête là. Je ne me pose plus toutes ces questions. Je crois que je suis un peu garçon manqué. J’ai fait du judo pendant 15 ans, énormément de moto. Evoluer dans le monde masculin, pour moi c’est pareil.»

Retour de pêche du chef Karim Abou El Ella

Le mot de la fin ?
«Je dis toujours cela : Quand on veut, on peut, peu importe que cela prenne du temps, une semaine ou dix ans.»

Les infos pratiques
Mas de l’Echanson. Ouvert du midi au dimanche. Le midi du mardi au vendredi et le soir du mardi au samedi. 415, Chemin des Iscles à Châteaurenard. 04 90 95 98 18 restaurant.echanson@orange.fr

La soirée Femmes d’action, femmes d’exception organisée par le club Soroptimist d’Avignon
Mardi 26 septembre 2023. A partir de 18h. Billets ici. Tout le programme ici.

Stéphanie Roch

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