3 septembre 2024 |

Ecrit par le 3 septembre 2024

BMX Sarrians : une ambition locale à la réussite internationale

Centre de préparation aux Jeux, lieu de préparation du triplé olympique français aux Jeux Olympiques de Paris 2024, lieu d’accueil de plusieurs compétitions internationales, le BMX Club de Sarrians n’a rien à envier aux plus grands. Depuis 2016, son président Stéphane Garcia travaille d’arrache-pied pour en faire un club mondial. Ambition, désillusion, persévérance, rencontres fortuites, mais surtout passion, ont fait du club ce qu’il est aujourd’hui.

La piste de BMX de Sarrians est impressionnante, avec ses deux butes, à 5 et 8 mètres. Les férus de vélo la qualifieraient même de magnifique. Pourtant, comme Rome, elle ne s’est pas faite en un jour. Stéphane Garcia l’avait annoncé dès son arrivée à la présidence du club en 2016 : « Je vais faire du BMX Club Sarrians un club mondial. »

Qui aurait cru qu’un petit village vauclusien de 6 500 habitants allait accueillir des compétitions internationales de BMX, mais aussi l’entraînement de plusieurs délégations pour les Jeux Olympiques de Tokyo 2020, l’équipe de France de BMX pour les Jeux Olympiques de Paris 2024, dont les trois champions qui ont réalisé un triplé historique le 2 août dernier ? Beaucoup n’y ont pas cru, Stéphane Garcia l’a fait.

Une passion pour le vélo qui ne date pas d’hier

C’est à l’âge de 14 ans, alors que Stéphane Garcia vient de quitter le domicile familial pour s’installer à Avignon auprès de sa grand-mère, que le vélo croise sa route au travers d’une rencontre avec Jean-Michel Robert, des Cycles JM Robert, entreprise ancestrale avignonnaise. « Jean-Michel m’a transmis cet amour du vélo et cet amour du dirigeant de vélo », dévoile-t-il.

Bien plus tard, lorsqu’il découvre la paternité, Stéphane souhaite transmettre cette passion à ses filles. Mais, par peur de les laisser sur un vélo de route par rapport au risque d’accident et après une rencontre avec deux garçons faisant du BMX à Sarrians, le Vauclusien décide d’y inscrire ses filles. Mais voilà que ce club sarriannais rencontre un problème : il ne fait pas preuve de stabilité, avec trois présidents qui se sont succédés en seulement six mois en 2016. Stéphane se voit alors proposé la présidence du club en octobre de la même année. Il impose une seule condition : faire du BMX Club Sarrians un club mondial.

Nouveaux projets pour un nouveau départ du club

Alors qu’il vient de prendre la tête du club, Stéphane Garcia rencontre Sylvain Duployer, vice-président de la Fédération Française de Cyclisme (FFC), qui souhaite que de nouvelles têtes émergent du BMX. En parallèle, le président du club sarriannais lui exprime ses ambitions pour Sarrians. En décembre 2016, le vice-président de la FFC lui propose alors d’accueillir les Championnats d’Europe en 2018. Mais pour pouvoir accueillir cet événement, le club de Sarrians doit refaire sa piste. « On m’a donné un an pour qu’elle soit faite », explique Stéphane. 

« Pour avoir une grosse piste, il faut de gros événements, et inversement. »

Après une rencontre avec Richard Miron, adjoint aux sports de la ville de Marseille entre 2008 et 2020 et conseiller régional à deux reprises entre 1998 et 2021, tout commence à se décanter. La Région Sud soutient le projet de Stéphane Garcia, à condition qu’il rachète la piste de Sarrians. « La Région a accepté d’injecter de l’argent à condition qu’on soit certains qu’on ne fasse pas un McDonald’s à la place de la piste, et pour ça il fallait la racheter », explique le président du BMX Club Sarrians. Un bail emphytéotique de 30 ans est donc signé, la Région donne 50 000€ au club pour faire les aménagements. Si Stéphane est heureux au départ, il déchante vite en voyant ce que coûte cet investissement.

Une piste à 350 000€

Vincent Chapelet, PDG de l’entreprise avignonnaise Sud Bâtiment, aussi passionné de vélo, suit Stéphane Garcia dans son projet fou, en lui prêtant les engins. « Une location d’engin coûte entre 5 000 et 6 000€, c’était déjà ça d’épargné, et je savais que j’allais trouver une solution pour l’essence », affirme Stéphane. Vincent Chapelet n’a pas été le seul à prêter main forte et à se montrer solidaire envers ce projet. Piscinistes et maçons se sont mobilisés pour donner leur terre au lieu de payer pour la jeter. « On a reçu 780 camions de terre », affirme le président du club de BMX.

Si Stéphane Garcia semblait trouver des solutions à chacun de ses problèmes, il y en a un qui l’a particulièrement embêté : il avait tous les matériaux, mais pas de fabricant de piste. « Si on n’attaquait pas les travaux pendant les vacances de Noël 2017, le projet tombait à l’eau », ajoute-t-il. Mais comment trouver un fabricant, qui demande entre 80 000 et 100 000€, quand on en a seulement 50 000 pour l’ensemble du projet ? Encore une fois, la chance semble lui sourire puisqu’un entrepreneur, qui travaillait anciennement pour une entreprise internationale de fabrication de piste, avait besoin d’un événement majeur pour faire découvrir son business. Stéphane n’aura alors besoin de payer que 15 000€ en échange d’hébergements pour les ouvriers et de trouver des solutions à leurs potentiels problèmes. Avril 2018, la piste est faite, avec la première bute à 5 mètres en Vaucluse et dans la région Sud, prête à accueillir les Championnats d’Europe trois mois plus tard. Ainsi, la piste aura coûté 350 000€, alors qu’elle aurait dû en coûter plusieurs millions.

En route pour les Jeux Olympiques

Après avoir accueilli plusieurs compétitions nationales et internationales, le BMX Club Sarrians fait face au Covid, dont il a du mal à se relever financièrement parlant. Bertrand Gaume et Didier François, ancien préfet de Vaucluse et ancien sous-préfet de Carpentras, font confiance à Stéphane et l’autorisent à faire venir des équipes professionnelles pendant le Covid pour s’entraîner pour les JO de Tokyo 2020 (qui ont eu lieu en 2021). « Nous étions la seule piste en Europe à accueillir des délégations pour s’entraîner », affirme Stéphane Garcia, qui a reçu un des Trophées Sport & Management dans la catégorie ‘Acteurs du sport – Management et Economie du Sport’ en 2020, organisés par TPS Conseils à l’Assemblée Nationale.

« Si je faisais venir une bute à 8 mètres, la piste de Sarrians allait devenir l’eldorado du BMX. »

Stéphane voyait plus loin pour la piste de Sarrians et souhaitait une bute à 8 mètres, pour être en cohérence avec les normes olympiques, en prévision des JO de Paris 2024. Il existait un tel équipement à Aix-en-Provence qui avait été fait à l’époque des JO de Londres 2012, mais qui était à l’abandon et en ruine, car il était géré par un club qui n’avait pas les capacités pour le faire. « Hervé Liberman, de la Région et président du Comité Régional Olympique et Sportif, voulait tout faire pour qu’on la récupère, mais tous les Vauclusiens en place depuis 30 ans auraient préféré qu’elle aille à la casse, déplore le président du BMX Club Sarrians. Il y en avait même qui proposaient qu’elle aille à Trets, mais surtout pas chez nous. Tout était fait pour qu’on ne la récupère pas. » En tout, pour le démontage, le déplacement, le remontage et la remise en forme de la bute à 8 mètres, le club de Sarrians a déboursé 50 000€, alors qu’une telle bute coûte environ 650 000€.

La piste de Sarrians attire de plus en plus

Ainsi, la piste de Sarrians et son club commencent à se faire un nom dans le milieu du BMX. Romain Mahieu rejoint le club en 2020, va jusqu’en finale des JO de Tokyo, termine 1er à la Coupe du Monde 2023, remporte la médaille de bronze aux JO de Paris. « Petit à petit, on s’est construits », ajoute Stéphane Garcia.

La Coupe du Monde, qui a eu lieu à Sarrians en 2023, a fait la deuxième plus grosse audience de L’Équipe TV cette année-là. Puis la piste de Sarrians est devenue Centre de préparation aux Jeux (CPJ) et a reçu 56 délégations en tout. Puis l’équipe de France a commencé à s’y intéresser en posant la condition de l’exclusivité. « Je n’ai pas compris pourquoi tout de suite mais c’est vrai qu’on ne peut pas investir autant d’argent pour que ce ne soit pas un Français qui finisse sur le podium », explique Stéphane. Et finalement, ce n’est pas un, mais bien trois Français qui ont terminé sur le podium de la finale de BMX Racing aux JO 2024. Une belle victoire pour le club, qui est parti de rien et qui, en sept ans, a fait une ascension fulgurante.

Le club aujourd’hui

Bientôt huit ans que Stéphane Garcia a pris la présidence du club, et il y en a eu du changement ! À son arrivée en 2016, le chiffre d’affaires s’élevait à 27 000€, aujourd’hui, il est à 1M€. Le chiffre d’affaires, ce sont les adhésions, ce que rapporte une course de vélo, l’événementiel, mais aussi la location de piste.

« J’ai toujours dirigé le BMX Club Sarrians comme une entreprise, jamais comme un club sportif. »

Aujourd’hui, le club compte 7 salariés et 200 licenciés, de la draisienne à l’adulte. Une jauge que le président ne souhaite pas augmenter, malgré une demande qui connaît une croissance sans nom, entre +30% et +40%, grâce à l’engouement qu’ont créé les JO 2024 et le triplé français en BMX. Une saison au club de Sarrians coûte 381€. « On est parmi les moins chers de la région, mais les licenciés font du vélo sur une piste qui équivaut au Stade Vélodrome en football », dit fièrement Stéphane Garcia.

Aujourd’hui, le club fait la fierté de son président, de la commune de Sarrians, mais aussi du département de Vaucluse. Stéphane Garcia l’affirme, il n’a pas fait tout ça tout seul et il est très reconnaissant envers toutes les personnes qui l’ont aidé ou qui l’ont simplement soutenu. « Le milieu du sport est difficile parce que tu dois toujours prouver que tu as la capacité de le faire, et même si on a essayé de me mettre des bâtons dans les roues, certains m’ont soutenu, comme Dominique Santoni, qui était à l’époque vice-président du Département en charge des sports et qui est aujourd’hui présidente du Département, et pareil après avec Christelle Jablonski-Castanier, en charge des sports aujourd’hui », développe le président du BMX Club Sarrians.

L’avenir du club

Si le club semble avoir coché toutes les cases de la liste d’objectifs qu’il s’est fixé, Stéphane Garcia ne compte pas en rester là. La piste devrait accueillir la Coupe du monde 2025, et sûrement celle de 2026 également.

« J’ai réservé le Palais des papes les 6, 7 et 8 mars 2026. » Dans deux ans, et pour la première fois en Europe, un club de BMX va organiser le congrès fédéral de l’Union Européenne de cyclisme. 51 pays vont se réunir en Vaucluse pour parler de Vélo. Un événement majeur qui va valoriser le BMX, le Vélo dans le Vaucluse, mais aussi plus largement le département. Ce vendredi 6 septembre 2024, Stéphane Garcia et le directeur général de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Vaucluse Tomas Redondo accueilleront le président de la Fédération française de cyclisme Michel Callot et le président de l’Union européenne de cyclisme Enrico Della Casa, à Avignon pour visiter la ville, son Palais des papes et ses hôtels pour déterminer si cela correspond a leurs attentes.

L’envie d’intégrer le tissu économique local au projet

Si Stéphane Garcia compte rester à la présidence du BMX Club Sarrians pendant quelques années encore, il lui reste des objectifs, dont un qui lui tient particulièrement à cœur : attirer les entreprises vauclusiennes.

« Je suis un grand amoureux du département, je souhaite trouver de nouveaux partenaires, mais surtout de gros partenaires locaux. »

Pour le moment, dans le département, seul Jacques Leze, directeur du centre commercial Aushopping Avignon Nord, a accordé sa confiance à Stéphane Garcia et son club. « Je suis très triste qu’on n’ait aucune entreprise historique du Vaucluse derrière nous, affirme le président du club de BMX. Comment peut-on réussir à garder un Romain Mahieu qu’on a fait venir des Etats-Unis chez nous, comment allons-nous attirer des jeunes qui seront les pépites de demain sans appuis financiers derrière ? » Stéphane Garcia souhaite que Sarrians soit la première équipe professionnelle de BMX en France, il souhaite professionnaliser les pilotes, développer l’équipe féminine, etc. L’ambition est toujours là. Et le président du club sarriannais, à qui on a répété maintes fois qu’il était fou ces sept dernière années, n’attend qu’une chose : « il me faut des gens qui soient aussi fous, ou tout du moins, qui me fassent confiance. »

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