6 octobre 2024 |

Ecrit par le 6 octobre 2024

À Cadenet, la Bastide du Laval valorise tous ses déchets oléicoles

Lorsque Léo Coupat a repris le domaine de ses parents, la Bastide du Laval, situé à Cadenet, en 2020, il avait un projet en tête : développer les activités de l’entreprise en créant des coproduits à partir des déchets oléicoles. Un projet qu’il devait initialement présenter au salon Med’Agri, qui aura lieu du mardi 15 au jeudi 17 octobre au Parc des expositions à Avignon, auquel il n’ira finalement pas, la récolte d’olives commençant prochainement. Mais Léo Coupat souhaite tout de même interpeller les professionnels qui pourraient être intéressés par ses coproduits.

Lorsque les parents de Léo Coupat ont créé la Bastide du Laval à Cadenet, au cœur du Parc naturel régional du Luberon, et qu’ils y ont planté 4 000 oliviers entre 1998 et 2004, ils n’avaient qu’une ambition : délivrer la meilleure huile d’olive possible d’un point de vue aromatique. « On savait qu’on ne pourrait jamais faire des volumes astronomiques, mais dans la région, grâce au terroir et aux diverses variétés, on peut faire des huiles qui ont énormément de goût, des huiles très aromatiques », explique Léo, aujourd’hui à la tête du domaine. Les huiles de la Bastide du Laval ont d’ailleurs eu la reconnaissance des concours et de nombreux chefs étoilés ces dernières années.

« Depuis que j’ai repris l’entreprise, nous n’avons pas eu que des bonnes récoltes, il a donc fallu réfléchir à comment se diversifier et à trouver un moyen de tout utiliser tout dans l’olive. »

Léo Coupat

En 2020, Léo rachète l’entreprise à ses parents, afin de les laisser se reposer, mais aussi pour la développer. « Il a fallu qu’on se développe d’un point de vue commercial parce que nos oliviers n’ont plus du tout suffit », ajoute-t-il. Aujourd’hui, la famille Coupat forme les apporteurs locaux et rachète leurs olives, ce qui a considérablement développé la production du domaine. « Maintenant, on a assez d’huile pour satisfaire toutes nos ambitions commerciales sans jamais renier sur la qualité », poursuit le gérant. À cela s’ajoute désormais un projet : faire des coproduits.

Léo Coupat, propriétaire de la Bastide du Laval. ©Bastide du Laval

Valoriser les déchets oléicoles

« Le coproduit, c’est tout simplement les déchets agricoles qui découlent de la production de l’huile d’olive », explique Léo Coupat. Lorsque la Bastide réceptionne plusieurs centaines de kilos d’olives, il n’y a que 20% qui en sont exploités afin de faire de l’huile. Le reste, c’est-à-dire le noyau et la pâte d’olive, est considéré comme du déchet. Jusqu’à maintenant, pour beaucoup de moulins, ces déchets étaient soit épendus dans les champs, soit stockés. La Bastide du Laval, elle, donnait ses déchets à des centrales de biogaz. Une configuration que l’entreprise vauclusienne souhaite changer.

« Je n’ai rien inventé, ce sont des choses qui se font déjà en Italie et au Maghreb depuis très longtemps. »

Léo Coupat

« Pour la toute première fois cette saison, on va être le premier moulin en France à recycler et valoriser tous nos déchets oléicoles séparément », affirme Léo. Grâce à l’investissement d’une installation qui va faire une deuxième extraction d’huile d’olive à chaud, La Bastide du Laval va pouvoir récupérer 1 à 2% d’huile d’olive en plus. Une huile qui devrait être aussi bonne pour la santé, mais plus doux d’un point de vue gustatif et plus faible en termes d’arôme. « Cette huile pourra tout à fait servir à l’industrie agroalimentaire, aux boulangers, etc, qui veulent une huile d’olive française à un coût moindre », développe Léo.

Le noyau d’olive pour se réchauffer

Un autre élément majeur de l’olive, c’est son noyau. « On sort presque 33% de noyau à chaque récolte, qui représente à lui tout seul 25 à 30% du poids de l’olive », explique le gérant de la Bastide du Laval. Ces noyaux pourraient bien servir à chauffer les habitations à l’avenir. En effet, ils seraient 20 à 30% plus calorifiques que le bois. « On a installé une chaudière biomasse qui fonctionne aux noyaux d’olive, ajoute Léo. Et on essaie de convaincre tous nos voisins, tous nos concitoyens locaux de passer le cap eux aussi. »

Le chauffage aux noyaux d’olives devraient permettre à certains de diviser quasiment par deux leur facture de chauffage. En effet, la Bastide du Laval les vend 10 à 20% moins cher que le granulé de bois. Un avantage non négligeable en ces périodes où le pouvoir d’achat est fragile pour beaucoup. « Ça prend un peu de temps à convaincre, surtout les fabricants de chaudière d’homologuer leur machine pour le noyau d’olive, se désole le Vauclusien. Donc ça, ça va être le combat d’une vie et j’espère le remporter dans pas trop longtemps ! »

La pâte d’olive, un déchet aux déclinaisons multiples

Une fois l’huile et le noyau retirés, il reste la pâte d’olive, ce qu’on appelle la matière sèche, c’est-à-dire la pulpe d’olive qu’il reste. En ce qui la concerne, les possibilités sont nombreuses.

« On peut en faire de l’engrais, de la nourriture animale, ou même un coproduit pour la cosmétique, pour les crèmes, explique Léo. Je n’ai toujours pas très bien trouvé où je veux m’orienter avec la pâte d’olive, mais j’ai une palette de solutions qui est infinie. »

Un projet économique et écologique

Lorsque Léo Coupat a repris l’entreprise familiale, la gestion des déchets était un véritable casse-tête. « À l’époque de mes parents, c’était un vrai coût de devoir gérer ces déchets », affirme-t-il. La Bastide du Laval produisait beaucoup plus d’olives qu’elle n’avait de terres disponibles pour épandre la pâte d’olive, il fallait donc faire des kilomètres en tracteur pour se rendre chez d’autres agriculteurs pour épandre dans les champs, ce qui représentait un coût considérable. Ainsi, en valorisant les déchets directement sur le domaine, les économies sont notables.

Au-delà de l’aspect financier, la valorisation des déchets présente un réel atout écologique. « Faire un effort pour l’environnement, l’écoresponsabilité, c’est bien, mais c’est compliqué quand il n’y a pas de rentabilité derrière, déplore le gérant de la Bastide de Laval. C’est pour ça que ça a du mal à décoller en France. Mais là, on a le beurre et l’argent du beurre. C’est-à-dire qu’on a un projet qui fait du bien à la planète et qui, en plus, enrichit les producteurs, ainsi que les consommateurs finaux. Absolument tout le monde est gagnant. »

Un appel aux professionnels d’autres secteurs d’activité

Aujourd’hui, l’objectif de la Bastide du Laval, c’est d’étendre son projet au reste de la filière oléicole et plus largement à toute l’agriculture, mais aussi de le faire connaître aux professionnels qui pourraient être intéressés par le fait de récupérer ces déchets pour en faire autre chose. C’est ce pourquoi Léo Coupat devait initialement participer au salon Med’Agri, le salon professionnel de l’agriculture méditerranéenne. « Je ne pourrais finalement pas aller au salon parce qu’il démarre au même moment où on ouvre le moulin pour accueillir les premières olives de la saison, je ne peux pas abandonner mon équipe », dit-il avec une pointe de regret dans la voix.

Si Léo ne sera pas présent du mardi 15 au jeudi 17 octobre au Parc des expositions à Avignon, il a tout de même contacté d’autres exposants du salon qui pourraient être intéressés par ses coproduits, que ce soit dans les secteurs de l’agroalimentaire, de la cosmétique ou encore de l’agriculture. Pour l’instant, ce qu’il manque, selon le gérant de la Bastide du Laval, ce sont des acteurs du domaine de l’énergie. C’est pourquoi il les invite, ainsi que tout autre professionnel qui serait intéressé, à le contacter (leo@bastidedulaval.com / 06 22 68 33 21) afin de prendre un rendez-vous après la saison de la récolte. En attendant, la Bastide du Laval croit en ce projet. « Pour moi, l’avenir de l’être humain, il est clairement dans nos déchets », conclut Léo Coupat.

Le domaine compte environ 4 000 oliviers plantés entre 1998 et 2004. Le moulin, quant à lui, a été construit en 2013 et a été opérationnel à partir de 2014. ©Luberon Sud Tourisme

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