Plus de « comités scientifiques à deux balles » mais des expérimentations pour revenir à la « vraie vie » en aidant des citoyens n’ayant plus ni craintes, ni culpabilité. Voilà le vœu de Renaud Muselier qui ne désespère pas d’apporter, au sein de l’action publique, un peu de « bon sens et de professionnalisme » en 2021. Et un peu plus d’argent…
Au moment de ses vœux à la presse intitulés cette année « on a tous besoin d’être ensemble », Renaud Muselier pense naturellement à un avenir plus que jamais incertain. Forcément, il revient au début de cette crise sanitaire. Celle qui a vu la création du fameux ‘Conseil scientifique’ et son inénarrable Delfraissy. Celui ayant « réuni autour de lui un des copains qui discutent pendant des heures, coupent des cheveux en 10, rédigent des rapports trop longs et en mauvais français » (Le Figaro, 13/11/2020). Ces chapeaux à plumes agacent le président de région qui, dès le départ, a pourtant proclamé sa volonté de ne pas polémiquer. « C’est un réflexe d’urgentiste : plus la situation est grave, plus il faut être calme », justifie-t-il pour la première fois. Forcément, « il fallait avant tout échapper à un effondrement brutal ». Mais qu’en est-il aujourd’hui, à l’approche des élections, se demandent les journalistes, tous coincés en visio-conférence ?
« C’est un bazar dans lequel on ne pouvait que se perdre »
« C’est moins sympa qu’avant, hein ? », lance Renaud Muselier avant de faire la rétrospective de l’ère Veran. « Le ministère de la santé n’a jamais eu de doctrine stable. Tous les critères d’évaluation de l’épidémie, tous les formats de prévention et toutes les échelles ont été employées, sans stratégie commune. C’est un bazar dans lequel on ne pouvait que se perdre », s’étrangle le médecin, déplorant qu’on ne donne aucune « espérance, ni visibilité » à la population. A nos yeux de ‘péquins’, rien ne justifie plus rationnellement – tantôt l’ouverture, tantôt la fermeture – de telle ou telle activité, ni les politiques publiques au bout d’un an d’incertitudes.
Dernier épisode en date, l’épopée vaccinale. « C’est à peine si on arrive à 85 injections par jour et par centre de vaccination au nombre de 96 dans la région », relève sèchement Renaud Muselier, « le gouvernement ayant créée une pénurie entre la population locale ciblée (700 000 personnes) et les commandes livrables permettant de protéger à peine un peu plus de 140 000 d’entre elles ».
Entre temps, le conseil régional aura agi : 1,4 milliard d’euros principalement pour soutenir l’économie et faire face à la situation sociale lors de la première vague, 146M€ de plus pour la deuxième et 13M€ de masques distribués, se radoucit Renaud Muselier qui veut néanmoins – et désormais – entamer une ‘guerre de mouvement’ contre l’épidémie afin de « sortir du dogme de l’Etat qui s’enferre dans une guerre de tranchée ».
« Rien ne semble jamais plus urgent que de reconfiner »
Ce n’est pas du tout gagné : l’Etat n’a pas voulu que les collectivités achètent des masques, ni de machines de test PCR. Aujourd’hui, il ne veut pas qu’elles achètent et distribuent des auto tests salivaires d’origine chinoise, pourtant fiables à 98%, assure le président de la Région. « C’est l’avenir, ces auto tests ! On le voit pour le diabète, la tension ou la fécondation. Et demain ce sera le cas pour l’épidémie ». La doctrine se tient : sans écouvillon, la généralisation des tests faits à partir de crachats est largement plus acceptable pour la population et les aspects juridiques de l’usage d’un outil intrusif et notoirement désagréable peuvent être évités sans encombre. « Mais là encore, nous attendons toujours la validation des autorités sanitaires, qui, comme d’habitude traînent », peste-t-il. Rien ne semble jamais plus urgent que de reconfiner, sans limite, pour un ministre de la santé qui ne répond pas aux courriers des présidents de région.
« Ceux qui opposent vaccins et soins trahissent la médecine »
Dans une guerre de tranchée, pas question non plus d’expérimenter. « Si on veut retourner à la vie, il faut faire des expérimentations collectives comme cela se fait partout ailleurs, simples et faciles à faire. Par exemple, organiser un spectacle avec un protocole d’accès qui consiste à faire rentrer dans une salle de spectacle toutes les personnes testées négatives et à en écarter les autres. Puis, refaire des tests, pour vérifier que tout va bien pour tout le monde. Ce dispositif a bien fonctionné en Espagne où l’on a relevé 0% de contamination. On doit bien pouvoir le faire dans un pays qui utilise des placebos», ironise-t-il, avant d’en remettre une louche, bien plus tenace : « à ce propos, ceux qui opposent vaccins et soins, alors qu’ils sont complémentaires, trahissent la médecine ». Mais la question des soins reste pour l’instant taboue…
Au moins jusqu’aux prochaines élections, dont celle des régionales, prévues pour l’instant en juin au lieu de mars. « Je serais candidat si, et seulement si, j’ai été à la hauteur de la crise sanitaire et que je peux soutenir une candidature avec des gens qui m’aident », prévient-il. « Je remarque qu’il n’y a pas grand monde pour m’expliquer que faire, ni de candidat à ma succession (…) Je suis cependant inquiet s’agissant des drames sociaux épouvantables qui peuvent se produire et notamment de l’aggravation de la situation dans les Alpes, après la visite que j’ai faite à Orcières-Merlette ». L’élection pourrait donc se faire sur l’idée que l’Etat « fait » (bon an, mal an) avec la Région qui, elle, se charge au plus près des territoires… On éviterait ainsi toute polémique inutile, en se conformant au vieux principe « si vis pacem, para bellum ». L’arsenal est solide des deux côtés.
« 5 milliards d’euros pour les 5 millions d’habitants de la région »
Car, au rayon des satisfactions pour 2021, il y a tout de même le contrat d’avenir Etat-Région pour la période 2021-2027, signé début janvier avec le premier ministre d’un montant de 5,1 milliards d’euros – contre 1,8 milliards du temps de Michel Vauzelle, ajoute l’élu actuel – auxquels s’ajouteront des fonds européens. « Ces grands chiffres n’ont de sens que si nous sommes capables de mettre en face une stratégie, une ossature, des moyens, un mode d’emploi clair, un calendrier et des résultats quantifiables ».
Pour le Vaucluse, quelques enveloppes sont déjà annoncées, s’agissant de projets identifiés : 4M€ pour la rénovation thermique sur 283M€ prévus pour l’ensemble régional ; 1,5M€ pour l’Université dans le cadre de la transition énergétique de l’enseignement supérieur sur 180M€ qui lui sont consacrés en Provence-Alpes-Côte d’Azur ; 4,8M€ pour l’aménagement des grands festivals dont celui d’Avignon sur un budget global de 94M€.
Rappelons que les orientations prioritaires pour les Fonds européens (2021-2027), votées en décembre dernier, représentent pour l’heure une manne de 1 milliard d’euros directement engagée par l’assemblée régionale sur les fonds habituels (Feder, Feader, FSE) et le nouveau Fonds ‘React-EU’, utilisable pour la santé, la numérisation, la transition énergétique dans les transports et l’investissement dans les PME doté de 117M€.