Le Tipi, ça vous parle ? La 1ère ferme urbaine du Vaucluse organisait il y a quelques jours une soirée sous le signe de l’inclusion et de la convivialité. Bilan ? 300 festivaliers, des échanges à foison et une effervescence retrouvée. Rencontre.
Rares sont les soirées où les fêtards déambulent entre les bottes de foin, achètent un jean côté friperie, jouent une partie de boules ou contemplent les jolies courges qui poussent dans le jardin. Seul le Tipi, niché 57 avenue Eisenhower à Avignon, vous gratifie de cette expérience atypique. Aux platines ? Kiddy Smile et Boston Bun, depuis le temps que le public attendait la venue des artistes. Le Tipi est un lieu vivant, écologique et fertile. On y trouve une ferme Urbaine, un atelier de céramique, une herboristerie, une cantine, un bar et une scène de concert. Bienvenue dans le premier lieu dédié à la transition écologique à Avignon.
Paul Arthur Klein, 26 ans et déjà visionnaire
Du haut de ses 26 ans, Paul-Arthur Klein mène la barque. Profondément écolo et engagé, le voilà qui court dans tous les sens, veillant au bon déroulé de la soirée. Il accueille le public, vérifie la sono, allume les jeux de lumières tout en plaisantant chaleureusement avec ses invités. Chemise estivale colorée et casquette, le directeur de l’association nous communique son enthousiasme. Sa légèreté est contagieuse.
Tout part d’un stage de fin d’étude à Paris. L’étudiant, alors en aménagement du territoire et gestion de l’environnement, doit créer une ferme urbaine. Très vite, il se familiarise avec cet univers, l’agriculture et les enjeux écologiques et sociétaux de demain. La permaculture, c’est une démarche, une philosophie. Le but est de prendre soin de la nature, des hommes et de partager équitablement. Autrement dit : concevoir des cultures, des lieux de vie autosuffisants et respectueux de l’environnement et des êtres vivants.
« Mon défi ? lancer cette ferme à Avignon, nous confie le fondateur de l’association Les Jeunes pousses. Tout le monde m’encourageait à la créer à Rennes ou à Nantes. Mais je me suis dit que si justement tout le monde réfléchissait de cette manière, la cité des Papes ne risquait pas de gagner en dynamisme et en attractivité. » L’aventure se cristallise lorsqu’il remporte le budget participatif de la ville d’Avignon: 150 000€ pour développer sa ferme.
Les collectivités locales, soutien de 1ère heure
L’association ‘Les jeunes pousses’ bénéficie d’un soutien ancré dans le territoire. La ville d’Avignon, le Grand Avignon, le Conseil départemental du Vaucluse, la Région, la préfecture, tous y vont de leurs concours pour soutenir financièrement et matériellement le projet de ferme urbaine inédite. Les fondations reconnaissent volontiers l’utilité sociale d’un tel projet d’inclusion et abondent également le Tipi. La fondation Nicolas-Hulot, la fondation Grand Delta Habitat, Vallis Habitat ou la fondation Ekibio, pour ne citer qu’eux. Viennent ponctuer ce maillage territorial: la MSA, la Caf et l’Ademe (Agence de la transition écologique).
« On sert comme bureau d’étude aux collectivités pour l’accompagnement à la transition écologique. On souhaiterait à terme créer un deuxième lieu de ce genre », ambitionne Paul-Arthur. Le Grand Avignon, la Ville d’Avignon, l’Etat, les bailleurs sociaux se sont engagés depuis 2018 dans un ambitieux programme de renouvellement urbain, baptisé « L’ambition urbaine », qui vise à métamorphoser les 3 quartiers prioritaires de la commune d’Avignon. Les objectifs : améliorer durablement le cadre de vie quotidien des 25 000 habitants qui vivent dans les quartiers Sud, Saint-Chamand et nord-est d’Avignon, favoriser la mixité, le développement économique et renouveler l’image de ces quartiers. Une enveloppe de 311 000€ est alors débloquée.
Accompagnée des associations ‘Les jeunes pousses’, une équipe projet pluridisciplinaire se constitue. Des questionnaires en ligne sont envoyés aux associations de quartiers, centres sociaux, conseillers citoyens et habitants. Un véritable engouement est constaté et a certainement même renforcé l’émulation autour des enjeux de l’agriculture urbaine, des circuits courts, de l’écologie, et de solidarité. L’équipe du Tipi est en perpétuelle réflexion, « on teste des choses, on fait appel à des collectifs, on fait chanter des artistes pour amener du monde qui ne serait pas venu spontanément. » Chaque soirée propose une ambiance, un univers, rien n’est identique.
4 salariés, 600 adhérents
L’équipe es forte de 100 bénévoles et 600 adhérents à ce jour soutiennent financement l’aventure. Objectif ? 1000 adhérents d’ici la fin de l’année. Un chiffre réaliste puisque pour participer aux évènements, les festivaliers doivent s’acquitter du montant de l’adhésion: 5 euros. Les bénévoles s’attèlent toute l’année pour aider aux 1000 tâches qu’implique une ferme de cette taille. Jardinage, aménagement, organisation d’évènements, relations publiques, service, sécurité, tous mettent la main à la pâte pour faire grandir le bébé. Les jeudis, l’aide est protéiforme, les samedis, un programme d’action est défini au préalable. Dans les rangs figurent également des jeunes munis d’un contrat de service civique et des stagiaires.
4 personnes sont salariées sur la ferme du Tipi et la Champignonnière, dont 2 agronomes. « Notre champignonnière est installée dans l’une des caves voutées de l’hôtel La Mirande, en plein cœur d’Avignon. Nos champignons sont produits sur du marc de café que nous récoltons chez les commerçants du centre-ville. Une fois les champignons récoltés, le substrat est recyclé au Tipi pour amender les cultures. Nos champignons sont disponibles à la vente dans les épiceries. »
Unir le centre-ville aux quartiers prioritaires
« Mon challenge, c’est de réunir des publics provenant de lieux variés. » Le centre-ville se mêle à la périphérie, les quartiers prioritaires aux pavillons plus aisés. Ici, plus de barrières mais des ponts et des passerelles autour d’un mode de consommation responsable. Le modèle économique ? Il est axé sur l’évènementiel et la consommation sur place. « Même si un évènement comme cette soirée ne nous rapporte en réalité pas grand chose vu les artistes que l’on fait venir », souligne Paul-Arthur Klein. Les cultures de fruits et légumes sont offertes aux adhérents. Mais l’objectif demeure une vente des produits au sein de la ceinture verte de la Barthelasse et une mise à disposition dans des épiceries solidaires. « On est conscient que le travail est énorme », précise le directeur. Ne dit-on pas que la volonté donne des ailes ?
57 Avenue Eisenhower, Avignon, http://www.lesitedutipi.fr/; 06 26 76 75 00.