Un million de véhicule électrique en 2022. Comment trouver les solutions de recharge partout et pour tous pour accélérer la transition énergétique ?
Ça se voit. Le parc des voitures particulières commence à changer : depuis le début de l’année les véhicules électriques ou hybrides rechargeables représentent près de 15% des ventes. La France en comptait plus de 600 000 au premier avril dernier, la plupart utilisés par des particuliers et des entreprises.
Mais tout le monde ne dispose pas d’une prise électrique pour faire le plein. « Neuf recharges sur dix se font à la maison ou sur le lieu de travail. Il y a donc un problème de disponibilité des bornes sur le domaine public », entame Sébastien Quiminal, directeur Enedis Vaucluse. « Les recharges ouvertes au public sont nécessaires pour ceux qui n’ont pas d’autre solution, pour les utilisateurs intensifs, ou pour les longs trajets comme les départs en vacances. En définitive, la certitude de ne pas tomber en panne sèche, même en cas d’imprévu, est déterminante pour tous ceux qui se déplacent ou qui voudraient acquérir une voiture électrique ». Et la conserver. Les difficultés d’usage d’une voiture ‘zéro émission’ ont poussé près de deux Californiens sur dix à revenir au moteur thermique. Or, aux yeux des pouvoirs publics, la conversion du parc automobile est un levier majeur pour réussir la ‘transition écologique’.
Une démarche collective pour la mobilité électrique
Organisé, planifié, coordonné dans chaque territoire, le déploiement des bornes a été retardé pendant le confinement. L’objectif de 100 000 nouveaux points de charge ouverts au public fin 2021 ne sera probablement pas atteint. Quoiqu’il advienne, il faudra faire un gros effort d’équipement. Enedis a donc été chargé de faciliter la mise en place des Schémas directeurs pour les infrastructures de recharge des véhicules électriques (Sdirve) qui permettent aux collectivités de promouvoir la mobilité électrique sur chaque territoire.
« Concrètement, nos équipes dressent une cartographie des lieux où sont implantées ces bornes et des endroits où l’on peut en mettre d’autres au meilleur coût. » Le gestionnaire du réseau électrique français met donc son expertise de la distribution au service des élus pour optimiser l’installation en vue d’une bonne qualité de service (puissance, état de marche, maintenance, localisation). Non sans prendre part au coût de raccordement : « 75% est payé par Enedis pour tous ceux qui vont prendre la décision d’ici la fin de l’année de s’équiper avant fin juin prochain, 40% au-delà » ajoute Sébastien Quiminal. C’est donc un enjeu financier important, sachant qu’une borne coûte, en plus du raccordement, entre 2 000 à 5 000€, sans tenir compte des coûts de génie civil.
La situation dans le Vaucluse
« Les syndicats d’énergie qui regroupent les communes pour la gestion et du contrôle de la distribution électrique ont été les premiers (ndlr : 2013) – avec l’aide de l’Ademe – à développer les stations de recharge ouvertes au public. Ils en sont les premiers acteurs aujourd’hui ». Alexandre Thomas, directeur du Syndicat d’énergie vauclusien (Sev) souligne que 74 bornes, permettant de récupérer 150 kilomètres par heure de charge, ont été installées à ce jour dans 48 des 140 communes du département qu’il couvre. Les usagers peuvent connaître les modalités (tarifs, carte des bornes, application sur téléphone) sur Vauclus’elec.
– Que dire de ce déploiement ?
Le modèle doit trouver son équilibre économique. Assurant la maîtrise d’ouvrage complète depuis l’installation, la maintenance, le service monétique le Sev constate que le seuil de rentabilité n’est pas atteint à l’échelle du parc. « Les communes comblent en cas de déficit financier. En moyenne, nos bornes affichent une dizaine de sessions de recharge par mois ce qui reste insuffisant. Mais il y a une dynamique avec le décollement des ventes de véhicules électriques depuis le Covid. Le chiffre d’affaires des bornes a fortement progressé depuis lors
– Faut-il encore convaincre les élus de s’engager dans l’équipement de leurs communes en bornes électriques ?
« Les maires sont demandeurs parce qu’une borne fait venir des gens. Depuis les dernières élections municipales, beaucoup aimeraient en avoir. La rentabilité, si la dynamique actuelle d’équipement et de subvention se poursuit, est en vue sur une période de 5 à 6 ans. C’est un enjeu, mais celui qui consiste à attirer des touristes ayant un bon pouvoir d’achat compte aussi avec les revenus importants qu’ils génèrent dans notre département. »
Quels changements pour les réseaux électriques ?
L’essor des véhicules électriques va poser la question du renforcement du réseau de distribution et de l’adaptation des lignes électriques. Non seulement sur le domaine public – une borne de charge rapide demande autant de puissance d’un quartier d‘habitation d’une quarantaine de maisons – mais encore dans le parc résidentiel collectif où vivent près d’un français sur deux. « Un nouveau décret paru en septembre améliore l’installation de bornes de recharge pour les véhicules électriques dans les immeubles soumis au statut de la copropriété en assouplissant les règles de vote en la matière », précise Sébastien Quiminal. Le demandeur pourra donc passer par le réseau de distribution public sans avances de frais.
Le chantier s’annonce très important afin de suivre l’extension du parc de véhicule à batterie rechargeables estimé à un million d’unité en 2022.
Actuellement, Enedis prend part à plus de 200 projets liés à la mobilité électrique à travers le territoire national. L’entreprise expérimente des services autour de la recharge, notamment sur son pilotage et sur l’optimisation du stockage d’énergies renouvelables dans la batterie du véhicule. Les batteries des véhicules électriques peuvent par exemple stocker au bon moment de l’électricité d’origine renouvelable ou alimenter son domicile en autoconsommation lorsque la demande d’électricité est forte.
« L’innovation est au cœur de ces sujets de mobilité. C’est pourquoi nous sommes partenaires du forum ‘Energy for smart mobility’ (ndlr : qui vient de se dérouler à Marseille les 6 et 7 octobre derniers) organisé par le pôle de compétitivité Capenergie réunissant plus de 500 acteurs en région pour développer une filière énergétique d’excellence à l’échelle territoriale et devenir un pôle de référence en Europe ».