Avec d’abord, sur le parvis de l’office de tourisme, une exposition de matériel avec, notamment, un camion de pompiers de collection affecté à Malaucène il y a 70 ans. Mais aussi le véhicule du GRIMP (Groupement de recherche et d’intervention en milieu périlleux), un zodiac, des scaphandriers, un véhicule-poste de commandement de colonne, un autre de secours et d’assistance aux victimes, secteur qui représente 80% des activités des sapeurs pompiers de Vaucluse avec 38 000 interventions par an, soit une toutes les 12 minutes. Démonstrations également avec la brigade cynophile et des chiens sauveteurs dressés pour retrouver des victimes sous les décombres.
L’après-midi, dans la Bibliothèque Inguimbertine, table ronde sur « Les SDIS face au dérèglement climatique » en présence d’un sénateur de Haute-Saône rapporteur d’une commission sur les pompiers et de Grégory Allione, le patron du SDIS 13, par ailleurs président de la Fédération Nationale des sapeurs-pompiers de France. Animé par le commandant Geoffrey Casu, adjoint au chef de Cie Confluence d’Avignon en présence de Michel Santamaria, président de l’UDSP 84 (Union départementale des sapeurs-pompiers de Vaucluse) et de Jérôme Sotty, directeur-adjoint du SDIS 84.
« Nous avons connu un été d’enfer, des embrasements partout, en Provence, en Gironde, en Alsace, en Bretagne nous devons donc avoir un retour sur expérience pour mieux lutter contre les feux demain ». Le sénateur Olivier Reitmann explique qu’en février dernier, pour faire son rapport il a auditionné 70 personnes à propos du feu de Gonfaron dans le Var l’été précédent, avant d’écrire quelques propositions. Grégory Allione intervient pour dire que « On ne peut pas tout protéger, au fil des décennies, on assiste à une déprise agricole, une augmentation de la masse combustible avec des herbes entre les oliviers, entre les rangs de vignes, il faut revenir à la prévention des feux, désherber ».
Le sénateur Reitmann l’affirme « Seulement 30% du débroussaillement est réalisé, or il est obligatoire d’y procéder dans un rayon de 50 mètres autour de votre maison, mais vous ne pouvez pas obliger votre voisin à le faire et si un feu se déclare chez lui, il y a de forts risques que votre propriété soit menacée par les flammes. Et ce débroussaillement coûte cher, il faudrait aider les propriétaires qui n’ont pas les moyens d’y procéder avec un avantage fiscal déductible. Il faut aussi aménager des chemins assez larges pour que les camions de pompiers puissent intervenir » et il évoque l’incendie de Gonfaron : » Les écologistes n’avaient pas voulu de ces aménagements préventifs de pistes, résultat les tortues de Hermann, espèce protégée, ont toutes grillé comme le massif forestier autour d’elles ».
Autre problème pour les soldats du feu : ils dépendent de 4 ministres, de l’intérieur, l’agriculture, l’économie et la santé qui ne communiquent pas entre eux, qui travaillent en « silo », avec parfois des préconisations contradictoires. Il nous faudrait un ministère dédié à la Sécurité Civile sous toutes ses formes pour mutualiser les lois et les moyens et pour que la puissance publique s’exprime d’une seule voix ». En plus, ajoute le Contrôleur Général Allione : « Avant, il n’y avait des feux qu’en été, maintenant c’est toute l’année, les colonnes de renforts se réduisent comme peau de chagrin puisque les pompiers de Gironde ont déjà beaucoup à faire chez eux, ils ne peuvent pas aller donner un coup de main aux autres. Et c’est la double peine puisque, avec le développement des déserts médicaux, les pompiers ont aussi de plus en plus de missions de secours à la personne à effectuer pour transporter les victimes aux urgences. »
Le gué aérien armé c’est également l’un des fers de lance de la stratégie. « 95% des feux sont annihilés s’ils sont circonscrits rapidement avant de brûler 5 hectares. Même si c’est au sol que la lutte est la plus prégnante. Or notre flotte d’avions bombardiers d’eau est vieillissante, les Canadair ont 25 ans, on en commande régulièrememt de nouvelles versions, mais la carlingue est la même, les équipements techniques toujours aussi basiques. La Grèce, l’Italie, l’Espagne, le Portugal ont connu de terribles incendies aussi. Il faut absolument faire jouer la solidarité à l’échelle européenne pour faire jouer la concurrence entre constructeurs d’aéronefs, y compris les hélicoptères et arriver à faire baisser les coûts ». Le sénateur de Haute-Saône, par ailleurs maire d’une petite commune de 1 600 habitants, explique qu’il n’avait pas de camion de pompiers, il en acheté un qui a coûté 30 000€, pour un camion grands feux avec 4 pompiers dans la cabine, ce serait 250 000€.
Cette journée de congrès départemental de Carpentras s’est poursuivie par la signature d’une convention avec la Société des Membres de la Légion d’Honneur, mais aussi par la remise, par la Préfète de Vaucluse Violaine Démaret, la présidente du Conseil Départemental Dominique Santoni, le sénateur Jean-Baptiste Blanc, le député Jean-François Lovisolo et Thierry Lagneau, président du conseil d’administration du SDIS 84 de brevets à 42 jeunes formés pendant 4 ans dans les casernes d’Apt, Bollène, Carpentras-Monteux, l’Isle sur la Sorgue, Orange, Vaison, Valréas et Pertuis-Cadenet, parmi eux, la fille de l’ancien Préfet de Vaucluse, Bertrand Gaume venu à la cérémonie en papa. Le tout s’est conclu par un défilé motorisé sous la pluie.
Les pompiers protègent et sauvent encore faut-il en recruter davantage, leur donner les moyens de lutte à la hauteur des enjeux de la planète. Le 13 octobre 2022, dans toute la France sera organisée la « 1ère Journée de la Résilience » face aux risques naturels et technologiques. Pour sensibiliser la population aux signaux d’alerte, gestes réflexe, évacuations. « Il y a 30 ans, le 22 septembre 1992 l’Ouvèze débordait à Vaison et Bédarrides, provoquant des dizaines de morts, il y a 20 ans, des digues du Rhône ont cédé à Arles, on a tout oublié » regrette le Contrôleur Général Grégory Allione.