Devant, les difficultés de recrutement, les nouvelles attentes des clients et le souci de leur image les entreprises tentent de s’adapter et, parfois, surtout de le faire savoir… Dans ce cadre, le passage vers le statut ‘d’entreprise à mission’ ou la certification ‘B. Corp’ sont deux évolutions ‘tendance’ envisagées par certains dirigeants qui s’inquiètent de leur RSE (Responsabilité sociétale des entreprises).
Alors, engagement réel ou ‘green washing’ ?
Le débat sur les l’entreprise à mission a donné lieu à de nombreux commentaires, le principe en est qu’une entreprise doit être utile pour la société dans son ensemble, et pas seulement à ses associés. Introduite par la loi Pacte de mai 2019, c’est une innovation majeure, au moins au niveau des principes même du droit des sociétés français.
Cette utilité ‘élargie’ se marque par une modification des statuts de la société concernée, intégrant la prise en compte des impacts sociaux, sociétaux et environnementaux de ses activités de façon à concilier la recherche de la performance économique avec la contribution à l’intérêt général. Ce choix est indiqué dans le K Bis de la société.
Les objectifs poursuivis sont essentiellement de fédérer les équipes (actionnaires, salariés, partenaires) autour d’une ambition commune. Evidemment l’entreprise souhaite aussi améliorer son image de marque et aussi se protéger contre les rachats hostiles, le cas échéant.
L’entreprise doit mettre en place un ‘Comité de mission’ interne et se faire certifier par un organisme indépendant qui vérifie la réalisation des objectifs affichés.
Depuis un an, une centaine d’entreprise, dont 70% de PME, ont choisi ce statut. La plus célèbre est Danone, dont le PDG vient, dans la foulée, d’être débarqué par les associés qui s’inquiétaient de la faiblesse des profits 2020 et de l’orientation clairement RSE choisie par Emmanuel Faber. La vie de dirigeant est rarement un long fleuve tranquille !
L’histoire dira si cette option française est un succès auprès du monde économique ou si ce n’est qu’un flop médiatique qui s’intégrera dans la longue liste des ‘bonnes fausse idées’…
La certification B. Corp
La certification ‘B. Corp’ est un peu dans le même esprit (du reste 15% des entreprises à mission sont aussi certifiées B. Corp.). Comme beaucoup d’innovations, cette nouvelle tendance, née en 2010, nous arrive des Etats Unis. Comme pour l’entreprise à mission de la loi Pacte, ce label vise principalement à garantir l’intégration de la mission sociétale au cœur de la performance globale de l’entreprise.
Dans le même mouvement que celui de la loi Pacte, 35 Etats américains ont adopté le modèle de ‘Benefit corporation’ à titre statutaire. Dans les autres Etats, les entreprises peuvent adopter le label B Corp. mais il s’agit alors là d’une certification contractuelle, demandée par l’entreprise et attribué puis contrôlée par l’ONG ‘B Lab’, et non pas d’une option ouverte par un texte législatif.
En 2020, le label B. Corp. regroupe environ 2 800 entreprises réparties dans 60 pays à travers le monde et exerçant leur activité dans plus de 150 secteurs différents. En France, depuis 2014, 80 entreprises ont été certifiées B. Corp., et ce nombre ne cesse de croître. Le label est accordé si, après analyse de 200 points du questionnaire d’évaluation, le score de l’entreprise est supérieur à 80. Il faut relever qu’outre un label, B. Corp. est aussi une communauté d’entreprises cherchant à multiplier leurs échanges et leurs expériences dans un même esprit.
Alors le match est ouvert entre le label US et le texte législatif à la française. Gageons que les sociétés jeunes, high-tech et ouvertes sur l’international préfèreront sans doute un label US « branché » qu’une modification statutaire à inscrire au registre du commerce !
Philippe Lechat*
*A la retraite depuis le 1er janvier dernier, Philippe Lechat, fondateur du cabinet d’expertise comptable Axiome Provence et désormais président des ‘Aulnes conseil’. A ce titre, il aborde régulièrement dans nos colonnes l’actualité juridique des entreprises.