Maître Olivier Baglio du cabinet avignonnais Axio Avocat revient sur les subtilités entre vie personnelle et vie professionnelle dans le cadre d’un accident survenu au volant d’un véhicule de fonction.
Dans le cadre de ses fonctions de Chef d’équipe, un salarié avait obtenu contractuellement le bénéfice d’un véhicule de fonction qu’il pouvait par conséquent utiliser librement à la fois dans le cadre de ses trajets professionnels mais aussi hors du temps et du lieu de travail pour des motifs tirés de sa vie personnelle.
De retour d’un salon professionnel en milieu de soirée, le salarié devait provoquer avec son véhicule de fonction un accident de la circulation endommageant gravement ce dernier et alors, circonstance aggravante, qu’il était sous l’emprise d’un état alcoolisé avancé comme purent le constater les services de police appelés à cette occasion. Il sera pour l’ensemble de ces éléments licencié pour faute grave.
Des faits relevant de la vie personnelle
Reprenant ses esprits et considérant que cet accident, tout comme son imprégnation alcoolisée, était survenu après sa journée de travail et donc que ces faits relevaient de sa vie personnelle, le salarié contesta son licenciement en justice. Il argua notamment qu’aucune heure supplémentaire ne lui avait été payée pour assister à ce salon professionnel preuve qu’il n’ était plus sous la subordination de son employeur.
Cet accident relevait donc de sa vie personnelle que l’employeur ne pouvait sanctionner sur le terrain disciplinaire, seul un licenciement non fautif pour trouble causé au fonctionnement de l’entreprise pouvant alors s’envisager ce qui n’avait pas été fait. Cette argumentation, certes astucieuse, n’aura convaincu personne.
La Cour de cassation, tout comme la Cour d’Appel avant elle, devait en effet valider le licenciement disciplinaire intervenu pour faute grave en considérant que ces faits se rattachaient nécessairement à la vie professionnelle du salarié puisque :
-Le salarié était au volant d’un véhicule de l’entreprise,
-Il rentrait d’un salon professionnel auquel il s’était rendu sur instruction de l’employeur pour les besoins de son activité professionnelle, ces points n’étant pas contestés.
-Cet accident se rattachait donc à la vie professionnelle du salarié et non à sa vie personnelle.
(Cassation Sociale 19 janvier 2022 n 20-19.742)
L’employeur n’a pas droit à l’erreur sur la nature de la procédure de licenciement
Cet arrêt rappelle que tout comportement du salarié, même en dehors des locaux de l’entreprise ou du temps de travail, est sanctionnable sur le terrain disciplinaire par l’employeur à condition que les faits constatés soient en rapport avec sa vie professionnelle, la charge de la preuve pesant naturellement sur l’employeur.
Comme le démontre la présente affaire, la frontière entre vie personnelle et vie professionnelle est souvent subtile voire malaisée sachant que comme toujours l’employeur n’a pas droit à l’erreur sur la nature de la procédure de licenciement à mettre en œuvre sous peine de rupture abusive.
Maître Olivier Baglio d’Axio Avocat
Les matinées sociales
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