Me Solène Arguillat évoque le contentieux qui oppose les anciens exploitants de la Cathédrale d’images, devenue aujourd’hui Les Carrières des Lumières, à la commune des Baux-de-Provence. L’avocate au barreau d’Avignon, qui intervient essentiellement en droit public des affaires et qui souhaite mettre ses compétences au service des entreprises et des collectivités, décrypte les dernières décisions prises par la Cour d’Appel de Lyon.
Si le volet concernant la régularité de la procédure de passation des conventions de délégation de service public pour l’exploitation des Carrières des Lumières et du château des Baux-de-Provence s’est définitivement clos avec la décision du Conseil d’Etat du 12 mai 2023 retenant une absence d’intérêt à agir pour la société Cathédrale d’Images malgré son statut de candidat évincé, ce dossier connait un nouveau rebondissement qui risque de coûter cher aux administrés de cette belle commune.
En effet, par une décision du 6 juin, la Cour d’Appel de Lyon -sur renvoi de la Cour de Cassation*- a enfin tranché la question de la réparation des préjudices résultant de la résiliation unilatérale en 2008 du bail commercial détenu par Cathédrale d’Images depuis près de 20 ans.
La Cour a retenu que le « site naturel exceptionnel » avait assuré à Cathédrale d’Images une « visibilité incomparable » justifiant le caractère non transférable du fonds de commerce, caractéristique ouvrant droit à une indemnisation de la valeur du fonds de commerce pleine et entière au profit de son bénéficiaire, indemnisation que la Cour arrête à la somme de 4 479 846 euros.
Sur le préjudice lié à la perte du droit au maintien dans les lieux, la Cour rappelle que ce droit a été institué pour conférer au preneur une garantie dans l’attente du paiement de l’indemnité d’éviction et le valorise à la somme de 1 813 005 euros en se basant sur le résultat d’exploitation moyen des derniers exercices.
Enfin, la Cour octroie la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de la « résiliation injustifiée du bail (…) qui a mis fin à l’exploitation familiale plus que trentenaire d’un concept créé par l’auteur de ses dirigeants ».
C’est donc avec une condamnation de près de 6,4 millions d’euros (hors intérêts) que se clôture ce volet judiciaire.
Toutefois, un nouvel épisode, relevant du juge pénal, est à attendre puisque l’ancien Maire et la Gérant de la société Culturespaces ont fait appel de leurs condamnations respectives pour favoritisme et recel de favoritisme prononcées par le Tribunal Correctionnel de Paris.
A suivre donc…
[Précisions pour les adeptes de procédure judiciaire à rebondissements : le dossier a été jugé initialement par le Tribunal de Grande Instance de Tarascon le 19 janvier 2018 qui a retenu l’absence de motif grave et légitime dans le congé et reconnu un droit à indemnisation à la société, jugement examiné en appel par la Cour d’appel d’Aix-en-Provence le 27 juin 2019 qui a retenu un congé régulier assorti d’un droit à indemnité d’éviction au profit de Cathédrale d’Images, décision partiellement annulée par la Cour de Cassation le 17 juin 2021 qui retient un congé régulier mais un droit à indemnisation plus large que la seule indemnité d’éviction dont le montant était à déterminer par la Cour d’appel de Lyon saisie sur renvoi.]