Dans le Gard depuis 1986, Les Costières sont le porte-drapeau des vignerons AOC, de leur terroir et de leur savoir-faire.
Depuis la Féria de mai 2023, une nouvelle équipe est à la tête du Syndicat des Vignerons, sur ce terroir d’exception qui remonte à l’antiquité, que ce soient les Grecs ou les Romains, 24 communes* en font partie sur 3 309 hectares.
Pour Cyril Marès, le président : « Nous avons des atouts. Un sous-sol, des cépages, un encépagement, des hommes et femmes passionnés. Nous sommes un collectif qui avance avec plaisir et qui s’implique ». Jérôme Castillon, le vice-président ajoute : « Il y a une âme « Costières » qui souhaite transmettre du beau, du bon, qui veut valoriser le travail de chaque vigneron. Chez nous il y a des caves coopératives et des caves particulières donc nous marchons sur nos deux jambes, nous sommes embarqués dans le même bateau, la même aventure. »
Il ajoute « Le millésime est prometteur, je dirais même béni des dieux. De la pluie en mai et juin qui a rempli les réserves hydriques, de la chaleur en juillet-août mais les racines des vignes ont trouvé de l’humidité en profondeur, sous les galets à 10 mètres de profondeur, ni mildiou, ni dessèchement des grappes. On dit que septembre fait le millésime, mais là, avec le superbe mois d’octobre que nous avons, ce n’est que du bonheur, de la qualité, beaucoup de fraîcheur et des degrés potentiels plus bas, des tanins souples déjà ronds pour les rouges. Avec notre tiercé gagnant, GSM (Grenache -Syrah – Mourvèdre) nous allons pouvoir affronter les marchés, décidément, notre mariée a une belle dot ».
Aurélie Pujol est directrice de l’AOC depuis 2 ans. Avant, elle était juriste du « Droit de la vigne et du vin » et a travaillé à Cognac et aux Côtes du Rhône. Elle a fait le point, d’abord que la situation économique, après le COVID, la guerre en Ukraine, l’envolée du prix des matières premières et l’inflation. « Nous sommes dans une période où les gens se serrent la ceinture, il y a une déconsommation du vin, les jeunes préfèrent les cocktails, le rhum, la vodka. Nous devons tirer notre épingle du jeu avec nos 66 caves particulières et nos 11 caves coopératives, elles sont labellisées à 76% c’est dire notre souci de l’environnement ».
Parmi les AOC du Gard, figurent Les Costières, Lirac, Tavel, Chusclan, Laudun, Signargues, le Duché d’Uzès, et la Clairette de Bellegarde, une toute petite appellation qui date de 1949 et qui ne compte que 6 producteurs pour 250 hectolitres mais qui est 100% bio.
Aurélie Pujol parle ensuite de stocks (qui ont baissé de -8%), des récoltes (qui ont reculé de -14%) des sorties de chais (qui se sont tassées -8%). « Nos vignerons ont été perspicaces. Ils ont anticipé le marché et orienté leur production, du coup, il n’y a pas eu de sur-production, ils ont gagné en valeur. Les gens boivent moins mais mieux. Face à un repli généralisé on a stabilisé ».
Cyril Manès, le président des Costières, reprend la parole : » On a 50% de rosé, 40% de rouge, 10% de blanc, commercialisés 45% en bouteilles, 55% en vrac. Nos ventes en GMS (grandes et moyennes surfaces) progressent globalement en volume (+1,4%), mais certaines appellations plus que d’autres (+8,2% pour les IGP, + 4,3% pour les AOP). Nous constatons aussi un net recul pour les exportations : -48% pour la Chine (qui a mis beaucoup de temps à sortir de la crise sanitaire et qui a créé son propre marché low-cost), -48% pour les USA où la vague des vins rosés s’est tarie et -29% au Royaume-Uni à cause du Brexit et des files ininterrompues de camions dans leTunnel sous la Manche. En revanche, le Danemark affiche + 67%, le bonheur … et la Belgique + 8%. En valeur, ajoute-t-il, cela représente 23,2M€ avec + 32% en Allemagne, +28% au Canada, + 19 en Belgique. Nous avons donc des bases saines et nous sommes bien armés avec notre terroir, notre climat, bref, on a le moral ».
Des pionniers de la charte paysagère
Côté perspectives, précise Aurélie Pujol, la directrice des Costières, « Nous avonçons, nous avons été des pionniers avec une Charte Paysagère Environnementale dès 2006, nous insistons sur la bio-diversté avec la Camargue à côté, les projets Natura 2 000, 2/3 de nos vignes sont irriguées, nous ramassons les graines des plantes, pour les faire pousser, les bouturer et planter plus tard des arbres adaptées à notre climat pour attirer abeilles, chauves-souris, oiseaux et insectes, nous avons d’ailleurs installé 300 nichoirs et nids pour les auxiliaires naturels de la vigne, nous pratiquons aussi l’agri-pastoralisme avec les moutons. »
Un sujet préoccupant toutefois, l’artificialisation des sols : « En 10 ans, nous avons perdu 14% de notre surface arable. Nous avons un oeil sur les PLU (Plans locaux d’urbanisme) des 24 communes de l’AOC, en particulier un projet de carrière à Beaucaire qui nous inquiète puisqu’il pourrait avaler nombre d’hectares aux dépens de la vigne » dit la directrice. « Nous avons un objectif : chasser en meute (comme l’aurait préconisé l’ancien préfet de Vaucluse, Bertrand Gaume), jouer collectif pour renouer avec la croissance, mettre le paquet sur le vin blanc qui a le vent en poupe et exporter davantage puisque les Français boivent moins. Nous avons une nouvelle bouteille qui s’est vendue à 1 185 840 unités, nous devons segmenter l’offre avec un « Costière Village » plus qualitatif, l’INAO est d’accord. On est assis sur une mine d’or, faisons rayonner les Costières. La Maison Carré de Nîmes a mis des décennies pour obtenir le label UNESCO, nous sommes patients, nous jouons sous la même bannière des Costières, nous tirons dans le même sens, ensemble, nous allons y arriver ».
Les Costières face aux Arènes
L’an prochain, les Costières vont ouvrir un pavillon, une maison des vins en face des Arènes de Nîmes, qui fera office d’ambassadeur de l’appellation, de centre de dégustation, qui pourra être privatisée, elle s’est aussi choisi un chef, Franck Putelat (5 étoiles à Carcassonne) pour « Les vignes toquées » début juin 2024. Avec ses 25 millions de bouteilles vendues, le savoir-faire et la motivation de ses vignerons , les Costières ne peuvent qu’avancer et porter haut les couleurs de ces Côtes-du-Rhône gardoises.
* Les 24 Communes de l’appellation : Aubord, Beaucaire, Beauvoisin, Bellegarde, Bernis, Bezouce, Bouillargues, Le Cailar, Caissargues, Garons, Générac; Jonquières-Saint-Vincent, Ledenon, Manduel, Meynes,, Milhaud,, Nîmes, Redessan, Rodilhan, Saint-GIilles, Sernhac, Uchaud, Vauvert, Vestric-et-Candiac