« En 2024, le nombre de notifications adressées à la Safer -Société d’aménagement foncier et d’établissement rural- s’est élevé à 14 800 projets de ventes (hors donation et ventes de parts sociales), contre 19 000 au plus fort du boom en 2021, analyse Fabrice Triep Capdeville, directeur départemental de la Safer Vaucluse. Ce nombre de notifications a continué à baisser légèrement, mais le marché s’est presque stabilisé grâce aux nombres de biens rétrocédés par la Safer qui lui est reparti à la hausse.«

L’an dernier, à la même période, on s’inquiétait de savoir si l’inflexion rapide à la baisse du marché rural allait se terminer en douceur interroge Fabrice Triep Capdeville, Directeur départemental de la Safer Paca. L’année 2024 est plutôt rassurante sur ce point et nous permet de dire que l’on est revenu à la normale. Ceux qui parlaient d’un réajustement du marché semblaient donc avoir une bonne lecture du marché. On a, bien sûr, quelques variations d’un département à l’autre, mais dans l’ensemble, les marchés se sont stabilisés.
Le marché au niveau régional
La variation globale du marché en nombre de ventes s’établit à une baisse de 4%, après avoir connu des chutes de plus de 20%. Les volumes en surfaces sont beaucoup plus erratiques chaque année et finissent avec une hausse de 8%. En valeur, la baisse du volume des transactions s’établit à 5,3 Milliards d’€ perdant 5%.

Les marchés urbains-agricoles
En segmentant le marché rural sur une grille de lecture Urbains/Agricoles, les courbes apparaissent en très légère hausse en 2024 pour la Région. C’est une troisième courbe ‘hors-segment’ qui comprend essentiellement des ventes de lots de copropriétés bâties qui montre une continuité à la baisse. Ces derniers biens sont habituellement sortis de nos analyses du marché rural, mais conservés dans les volumes globaux, comme un thermomètre sur la dynamique des marchés. Ainsi, les marchés agricoles et naturels ou les maisons à la campagne se comportent mieux que les biens de la ville.

Volumes, un marché 2024 copié-collé de 2023
Le marché Vauclusien est à l’image du marché régional sur les volumes cette année, mais avec une stabilité encore plus marquée. En volume global, le nombre de transactions avec 3 156 est resté presque identique à 10 unités prés. En surface, avec 4 492 ha échangés, nous sommes sur un chiffre très proche de 2023 avec seulement 85 ha en moins (-2%). Seuls les volumes financiers ont une valeur qui s’écarte un peu du profil régional, avec une légère hausse du volume de 5% pour atteindre 760 Millions d’€.

Le boum post-covid était bien immobilier
En observant les courbes départementales sur le profil des marchés ruraux en Vaucluse, on observe sensiblement la même chose que sur la Région. Le boom post-Covid était bien un boom immobilier. On a connu deux ans de marché d’une intensité exceptionnelle en 2021 et 2022, et le retour à la normale s’est opéré brutalement l’an dernier par une baisse massive. Cette chute n’a pas perduré cette année, ce qui tend bien à confirmer que ce n’est pas une crise immobilière qui s’était amorcée, mais un réajustement. Sur ces courbes, on perçoit que ce boom a eu lieu essentiellement sur les biens immobiliers de l’Urbain-rural, à savoir principalement le marché des maisons à la campagne.
Vaucluse, le département le plus rural et agricole de toute la région
Sur ces courbes de tendance, on constate également que le département du Vaucluse présente un visage beaucoup plus rural et agricole que le profil régional. En dehors des deux années de boom, les marchés agricoles en nombre de vente collent, chaque année, aux marchés urbains ruraux. Sur la région, le différentiel est plus net, avec des marchés agricoles plus faibles que l’Urbain, signe que le Vaucluse est un peu plus à l’écart des pressions périurbaines. Tout dépend sur quel secteur, bien sûr.

Le secteur de Carpentras-Pernes a été le plus gros pourvoyeur du marché rural en 2024 avec 620 transactions, suivi par celui de la vallée du Rhône (529) et les deux secteurs Luberon Sud et Nord (461 et 434 ventes respectives). Le marché est plus fermé sur le Ventoux (218 ventes). Les deux secteurs Avignonnais sont en net retrait car il s’agit pour beaucoup des ventes de marché très citadins qui ne rentrent pas dans le champ d’information du rural.
Carpentras-Pernes
En nombre de ventes agricoles ou naturelles, c’est encore le secteur de Carpentras-Pernes qui a vu le plus d’opérations se réaliser (313), devant la vallée du Rhône et le Haut-Vaucluse (227). Si l’on pondère en pourcentage ces marchés pour comparer de manière équitable, ces classements changent et c’est le secteur du Mont-Ventoux qui présente le visage le plus agricole et naturel avec 57% des ventes. Tout juste devant le Haut-Vaucluse et la Vallée du Rhône. Le Secteur de Carpentras-Pernes avec 50% se retrouve en quatrième rang. C’est encore au-dessus du taux départemental qui s’établit à 47% de marché agricole en nombre. En dessous de ce seuil, on trouve les secteurs d’Avignon et du Grand Avignon avec 18 et 25% qui représentent bien un marché rural avec une forte prégnance de l’urbain résidentiel. Le secteur du Pays des Sorgues et les deux secteurs Luberon ont des profils plus périurbains avec un nombre de vente agricole s’élevant à 40%.
L’activité de la Safer bien relancée en Vaucluse après une année 2023 morose
La Safer Paca a rétrocédé 1 560 propriétés en 2024. C’est une belle reprise avec 200 transactions en plus, après une année 2023 qui avait été difficile. Ces ventes ont mouvementé 7 461 ha soit 1 500 ha de plus qu’en 2023. Ces superficies représentent 28% de prise de marché sur les marchés agricoles. Un niveau de présence qui doit permettre de peser sur les marchés.
Des opérations inférieures à 15 000€
Comme chaque année, un peu plus de 55% des interventions de la Safer se font sur des opérations inférieures à 15 000€, ce pourcentage passe à 85 % pour les ventes inférieures à 75 000€. Ces indicateurs sont là le marqueur d’une intervention généralisée sur les propriétés dites parcellaires. La mission de service public de la Safer vient donc s’exercer sur ces unités parcellaires dont le prix médian est de 4 000 €, pour une surface médiane de 35 ares. En matière de préemption la Safer a été présente cette année en réalisant plus de 700 préemptions dont 445 préemptions en révision de prix.
Concrètement
Dans le Vaucluse, le niveau d’activité de la Safer est nettement remonté avec 461 rétrocessions qui ont représenté 997 ha de foncier. Dans ce marché, la Safer a réalisé 115 interventions en préemptions dont 59 en révisions de prix pour réguler le marché.

Un marché reparti à hausse, comment est-ce possible ?
Comment le marché appréhendé par la Safer, a pu repartir à la hausse alors que les voyants et les alertes structurelles restent vifs pour la crise viticole (on parle de crise de consommation) et que toutes les filières agricoles ne sont pas non plus en pleine santé ?
Restructuration du paysage agricole
Dans les faits, on assiste à une restructuration du paysage viticole avec la vente de plusieurs domaines. Ces ventes sont souvent liées à des arrêts d’activité sans reprise familiale ou à des projets de restructuration interne. Ainsi, le foncier continue d’être mouvementé. On pressent par les projets initiés que ce phénomène va se poursuivre en 2025, reste à savoir si les candidats à la reprise seront au rendez-vous. C’est la crainte qui court, avec cette épée de Damoclès qui verrait des biens à la vente, sans personnes pour les reprendre au prix et même en dessous.
51 promesses d’échanges de propriétés à Uchaux et Piolenc
Dans les autres facteurs d’explication à cette bonne année pour la Safer, il y a eu un effet d’aubaine également, avec la finalisation en 2024 d’un échange multilatéral d’envergure sur Uchaux et Piolenc principalement. Ce travail de fond initié il y a plusieurs années a permis l’échange de 81 ha pour 23 exploitations agricoles. Cela concerne 52 propriétés et propriétaires différents et au final la signature de 51 promesses d’échanges, sachant que la Safer avait réalisé 26 acquisitions sur 19 ha en vue de réaliser son stock nécessaire aux échanges.
Le surcoût du stockage du foncier
Enfin, dernier point d’explication, il y a un effet de réaction face aux difficultés rencontrées en 2023, notamment sur les coûts de stockage du foncier, avec la hausse des frais financiers. La Safer a passé en revue son stock foncier, a accéléré la libération de plusieurs propriétés ou parcelles qui attendaient des restructurations plus larges. Pour pérenniser des stocks stratégiques, organiser la transmission d’exploitations agricoles ainsi que les politiques d’aménagement portées sur certains territoires la Région Sud Paca a enclenché la première tranche en 2024, prévue dans un partenariat ambitieux avec la Safer d’aide au portage foncier. Ça devrait permettre d’initier d’autres projets structurants à moyen ou long terme.
Le prix des vignes en Vaucluse

