Une vingtaine de projets pour autant d’établissements de l’enseignement supérieur de l’Hexagone engagés dans ce concours et ce sont les ‘Croc’s-Magnon’ concoctés par des élèves de l’Ecole nationale vétérinaire, agroalimentaire et de l’alimentation Nantes Atlantique qui ont décroché le 1er prix, un chèque de 5000 €. Un plat cuisiné, complet dont l’ingrédient principal est le gland, accommodé en boulette farcie à base de lieu noir avec une sauce au persil, riche en fibres, sans gluten et source de protéines.
Les aspirations des consommateurs d’aujourd’hui
Un produit qui répond depuis l’an 2000 aux exigences des organisateurs de ‘Trophélia’ devenu ‘Ecotrophélia’ en 2008, selon son créateur, Dominique Ladevèze : « L’innovation dans les industries alimentaires concrétise les aspirations des consommateurs d’aujourd’hui pour la qualité nutritionnelle, le goût et les productions locales. Elle porte également des valeurs fortes en termes de santé, d’environnement et de responsabilité sociétale. » Alors que la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Vaucluse, partenaire historique, a quitté la manifestation, les organisateurs ont dû faire face à la crise du coronavirus : « L’obstination a payé, nous avons décalé la compétition de juin à septembre. Les écoles étaient fermées, plus de laboratoires, plus de halles technologies pour tester et mettre au point les produits. Mais les jeunes se sont débrouillés, démenés pour proposer des aliments innovants » poursuit Dominique Ladevèze.
Catherine Chapalain, directrice générale de l’Ania (Association nationale des industries alimentaires) le souligne : « Malgré la covid-19, la chaîne alimentaire a tenu, les professionnels ont rempli leur mission, nourrir les Français, ils ont assuré. Et, dans ce contexte, Ecotrophélia reflète la passion des jeunes ingénieurs agronomes à travailler dans un secteur proche des agriculteurs, des circuits courts. Ils sont soucieux d’environnement, de bien-être animal, de chasse au gaspi. »
Du champ à l’assiette
Philippe Maugin, président de l’Inrae (Institut national de la recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) présidait le jury national pour la seconde fois, salle Jeanne-Laurent. « Ce qui me plaît c’est la créativité de ces jeunes qui imaginent l’innovation du champ à l’assiette, mettent en avant une alimentation saine, des qualités nutritionnelles, un sens de l’éthique, du développement durable. En 2052, il faudra nourrir 10 milliards d’humains, sans déforester à outrance. On assiste à de profondes évolutions avec le changement climatique, on voit des continents sous-alimentés et d’autres où règne l’obésité. L’alimentation de demain se doit de rééquilibrer le rôle du végétal et de l’animal, cela ne va pas se faire en un jour. La tendance est aux légumineuses, les lentilles, les haricots, les pois chiches, les fèves. Mais il faut encore en planter sur des milliers d’hectares, les cultiver, les transformer, les distribuer, bref, faire évoluer la chaîne de production. »
Des filières en mutation
Trois filières sont en pleine mutation, la pêche, la viande et les fruits et légumes. Côté mer, avec plus de 3 000 km de côtes, la France propose un large choix de poissons, coquillages, crustacés souvent méconnus, voire délaissés. Or, les consommateurs avalent du surgelé carré, de l’élevage alors qu’existent des produits sains, tracés, goûteux, à prix abordables et qui, en plus, respectent l’écosystème tout en préservant les ressources halieutiques.
La filière viande souffre depuis 30 ans de crises à répétition : vache folle, fièvre aphteuse, grippe aviaire, abattoirs barbares. Elle subit les remous de la vague végane. Près de 70% des recrutements en boucherie restent lettre morte. Les professionnels vont devoir faire preuve d’imagination pour redonner confiance aux consommateurs.
Quant à la filière fruits et légumes, elle a vu depuis l’an 2000 sa part dans les produits français chuter de 15 points. « Il faut mettre un terme à cette dégradation, tout en assurant la sécurité alimentaire et en travaillant sur la compétitivité, la productivité et la diversité, donc le goût et le croquant » conclut Laurent Grandin, président d’Interfel.