« Pour la première fois, je m’adresse à vous de cette tribune, a expliqué Dominique Santoni lors de la dernière assemblée générale de l’Association des maires de Vaucluse (AMV) qui vient de se tenir à Monteux. Avant j’étais dans le public, parmi vous, les maires de Vaucluse, et je reste un maire dans mon code génétique d’élue ». Il est vrai que Dominique Santoni a siégé pendant des années comme maire d’Apt et depuis les cantonales, elle a été élue le 1er juillet dernier à la présidence de l’exécutif départemental.
« Mon combat est le vôtre, poursuit-elle. Il faut remettre les communes au centre du jeu, au centre de la décentralisation, au centre des actions. Le département c’est la collectivité de proximité, la collectivité des communes. » Dominique Santoni a rappelé que son mandat est placé sous le signe de l’investissement pour de grands travaux. Le carrefour de Bonpas à Avignon « Echange routier entre l’A7, la RN 7, la RD 900, véritable nœud d’étranglement pour 30 000 véhicules bloqués aux heures de pointe (investissement de 25M€ dont 9,5 par le Département), la déviation d’Orange (50M€ dont 42% pour le Vaucluse), la rénovation de 3 collèges à Vedène, Bédarrides et Apt (30M€). Pour lutter contre la fracture numérique, 6,3M€ ont été dévolus à l’acquisition d’ordinateurs portables pour les collégiens.
Même s’il ne s’agit pas des compétences du département, Dominique Santoni souhaite apporter sa pierre à l’édifice en matière de sécurité et de santé, pour l’achat de caméras de video-surveillance, construire des maisons médicales ou développer la télé-médecine. Evidemment la politique d’aide aux communes, sous forme de contrats pluri-annuels, sera poursuivie. Et la Présidente va créer ‘Vaucluse Ingénierie’, une structure pour orienter les élus vers le bon service, le bon interlocuteur selon le dossier. Elle veut investir aussi dans l’attractivité du Vaucluse. « C’est en attirant de nouveaux habitants, de nouvelles entreprises créatrices de richesses que nous pourrons booster l’emploi et en finir avec l’image de 5e département de plus pauvre de France. Nous devons libérer notre créativité, additionner nos talent et susciter une envie de Vaucluse ».
En ouverture du congrès, Christian Gros, secrétaire général de l’AMV et maire de Monteux qui accueillait ses homologues à la Salle du Château d’Eau, a insisté sur la compétence protéiforme de ce mandat : « Notre métier de maire ne s’apprend pas à l’école, ni dans les livres, mais sur le tas, sur le terrain, dans le feu de l’action. Nous devons revitaliser nos centres-villes, faire face aux dérèglements climatiques, on ne peut plus gérer en bon père de famille. La relance de notre pays ne se fera pas dans l’austérité. On a supprimé la taxe d’habitation et on nous a privés d’un pouvoir fiscal essentiel. Il faut un Etat fort et il faut des maires forts ».
Le meilleur préfet du monde
Jean-François Lovisolo, co-président de l’AMV 84, a lu le rapport moral de l’Association qui ne s’était pas réunie depuis 2019, Covid oblige. Il a d’entrée de jeu donné un coup de chapeau au préfet de Vaucluse, Bertrand Gaume : « Merci pour votre activité pendant cette pandémie, vous avez été présent au quotidien, à nos côtés avec l’ensemble des services de l’Etat, vous vous êtes mobilisé pour les masques, le gel, vous avez multiplié les centres de vaccination sur tout le territoire, vous avez été le chef d’orchestre de la mobilisation des services publics, et quel chef d’orchestre. Vous êtes le meilleur préfet du monde, il faudrait vous cloner ! ».
Après cette envolée lyrique, Jean-François Lovisolo a cependant entamé une longue liste de récriminations contre l’Etat. « L’administration déconcentrée doit faire preuve d’adaptation pour qu’on ne mette pas 15 ans à sortir un projet de déchetterie, 10 ans pour des logements sociaux ou 20 ans pour permettre l’émergence et la réussite du site de Beaulieu à Monteux avec des centaines d’emplois à la clé. L’égalité ce n’est pas l’équité, La Bastidonne n’est pas Avignon, il faut tenir compte de la réalité de nos territoires, de leur taille, de leur situation. » Le maire de la Tour d’Aigues continue : « Etre maire est un plaisir mais il faut aimer le combat. Nos intentions ne sont pas toujours dictées par le copinage, le clivage politique ou la magouille mais par la volonté de répondre aux préoccupations de nos concitoyens. C’est vers nous qu’on se tourne pour éteindre le feu du mouvement social des gilets jaunes ou pour gérer la crise sanitaire ».
Limiter le pouvoir jacobin
L’autre co-président de l’AMV, Pierre Gonzalvez, maire de l’Isle-sur-la-Sorgue, a lui aussi rendu hommage au préfet : « La famille des territoires s’appuie sur le couple maire-préfet, depuis le début de la crise sanitaire, cette relation s’est officialisée et je forme le vœu que le temps s’arrête et vous invite à dépasser les noces de cire (4 ans) pour vivre les noces de bois (5 ans), ici en Vaucluse. » Il a évoqué les logements sociaux, les communes qui n’en construisent pas suffisamment et paient des pénalités et il a appelé les territoires à se battre pour limiter le pouvoir jacobin en citant Asterix : « On ne peut vivre qu’à Lutèce, le reste de la Gaule c’est bon pour les sangliers ».
Le Préfet est alors longuement intervenu en reprenant à son compte le slogan de la présidente de l’exécutif : « Donner envie de Vaucluse », mais un Vaucluse où règne l’équilibre pour l’économie, le social, l’environnement. « Nous menons une politique douce, souriante, agréable, avec tact et persévérance mais en faisant respecter fermement les règles et les lois et si nécessaire des démolitions d’office sont décidées ».
Le préfet a d’abord évoqué la crise sanitaire et remercié les élus pour leur action, leur engagement indéfectible, le personnel soignant, les pompiers qui ont sillonné les campagnes pour vacciner la population mais aussi animé le centre de Montfavet. « Il y a eu 1 158 morts de la Covid et plus de 5 000 hospitalisations, ce n’était pas une simple ‘grippette’. » 1,5 milliard d’euros ont été versés en urgence aux commerçants, acteurs culturels, entreprises, pour les prêts garantis par l’Etat.
Autre moment fort de cette année : le meurtre du policier Eric Masson le 5 mai dans le centre d’Avignon, sur un point de deal. « Nous ne lâcherons rien. La vie n’est pas un tapis de roses sans épines. D’ailleurs la délinquance est en baisse (-5% en zone police, -3% en zone gendarmerie), le nombre d’infractions constatées en hausse massive (+48% à la campagne, + 78% en ville) ». Un fonds de prévention de la délinquance de 550 000€ a été fléché vers une trentaine de communes pour lutter contre la radicalisation et le séparatisme.
L’incendie de Saint-Hippolyte-le-Graveyron et Beaumes-de-Venise à la mi-août et les 254 hectares de vignes et espaces naturels dévastés par les flammes ont aussi amené le préfet à aborder le thème des alertes climatiques, phénomènes cévenols et inondations. « Abonnez-vous à Vigicrue, mutualisez vos moyens si vous êtes une petite commune, rapprochez-vous des syndicats de rivières ».
Côté économique, le « Plan de Relance » et ses 172M€ de dotation ont été évoqués, avec des aides pour les transitions économique et énergétique, la reprise du marché du travail, le Ségur de la Santé, le coup de pouce ‘1 jeune – 1 solution ».
Les questions des maires…
Enfin, au bout d’une heure et demie de discours, est venu le moment de répondre aux questions posées par les maires. Celui de Lauris, une commune située entre pic rocheux et Durance, s’est étonné qu’on lui demande de construire 500 logements sociaux sous peine de pénalités de 90 000€ : « Dois-je me faire harakiri ? Me lancer dans la prostitution, à mon âge… »« N’en venez pas surtout pas à de telles extrémités » exhorta Bertrand Gaume en souriant. Mais faites un effort, montrez votre bonne volonté, construisez-en quelques-uns en vous rapprochant des grands bailleurs, comme on l’a fait à Gordes. Il faut desserrer l’étau du logement social, ne pas entasser dans les mêmes quartiers urbains ».
Dernière intervention, celle du maire de Velleron, élu depuis l’été 2020 et sous le choc d’un projet d’aménagement de 200 logements sur un terrain privé de sa petite commune : « Cela ferait 20% d’habitants en plus, avec des besoins supplémentaires en accès, routes, écoles, crèches, parkings, réseaux d’assainissement. Une faillite environnementale, une artificialisation des sols, une perte de la bio-diversité. Ce projet fait l’unanimité contre lui comme l’a prouvé la marche qui a réuni 800 personnes dont le chanteur Grand Corps Malade, samedi dernier. » Le préfet lui a répondu que l’ensemble des services de l’Etat sont en train de vérifier la procédure pour voir si la loi a été respectée et les autorisations données à juste titre.
Enfin, en marge de cette assemblée générale, une convention de partenariat a été signée entre GRDF et l’AMV (photo ci-dessus). De son côté, la Fédération Provence-Alpes-Côte d’Azur des travaux publics a remis ses ‘Victoires de l’investissement local’ à la Ville d’Avignon pour sa requalification autour de la rue Bancasse par Citadis. Autre lauréat, Cotelub (Communauté territoriale sud Luberon) et la société Amourdedieu d’Ansouis pour la réalisation des aménagements de l’étang de la Bonde.
Pour finir, l’après-midi a été consacré à une table ronde avec la gendarmerie sur le thème de la sécurité publique ainsi qu’à une intervention du directeur départemental des finances publiques.