Du privé au public. Des stades de foot à la commission sport. Du rôle de mère à la délégation des collèges. Un moment avec Christelle Jablonski-Castanier, 38 ans, fourmillant d’idées au service des Vauclusiens.
Reprendre le flambeau de la délégation de la présidente du Département, une tâche périlleuse ? De l’aveu de la conseillère départementale du canton de Sorgues, le challenge prend la forme d’une continuité. Même si « Dominique Santoni avait mis la barre haut », l’engagement de Christelle Jablonski-Castanier puise sa force dans les projets d’avenir et la fraîcheur des idées. Des ‘brunch’, des assises, des Top chefs, des influenceurs et tant d’autres. « C’est une grosse marque de confiance d’être venue me chercher, de m’avoir proposée une vice-présidence, et en plus la sienne », nous confie la vice-présidente du Conseil départemental de Vaucluse, déléguée à la vie associative, au sport et aux collèges.
A la fois adjointe aux finances de Courthézon depuis 2020, conseillère communautaire à la CCPRO, vice-présidente au Département, les prémices de sa carrière se font pourtant loin de l’hémicycle. De formation juridique, diplômée d’un master II en droit social à l’Université de Montpellier, celle qui se dit « avide de challenges et curieuse de tout » s’illustre pendant dix ans dans les ressources humaines et le droit du travail au sein d’un cabinet.
C’est Nicolas Paget, maire de Courthézon, qui lui tend un jour une main généreuse et la plonge dans la campagne municipale. « On a travaillé sur le projet, animé des ateliers, et puis il m’a finalement proposée de devenir adjointe aux finances. Je suis assez curieuse, j’aime bien les challenges, donc j’ai accepté », nous confie celle qui exerce également en tant que clerc de notaire.
La voilà donc dans les méandres de la fiscalité, des dossiers municipaux pointus, des budgets. « C’est super intéressant, je me suis régalée même si la finance d’une collectivité reste très technique », précise l’élue, qui animée par la soif d’apprendre, multipliera les bouquins sur le sujet. Vient l’heure des élections départementales, échéance si chère à la démocratie locale.
Parité oblige, Thierry Lagneau, maire de Sorgues et conseiller départemental, doit former un binôme avec une dame. Ni une ni deux, Nicolas Paget recommande son adjointe, abonde d’éloges sur ses compétences pour porter les intérêts du canton, « il me disait qu’il me pressentait bien, que j’avais les mêmes valeurs humaines que Thierry ». Une chose est certaine, hors de question pour elle de devenir une « élue bureaucrate », mais plutôt une représentante de « terrain », une personne de « contact ».
Durant la campagne, ils sillonnent les routes, à la rencontre des majorités des communes du canton. « L’avantage de mon rôle d’adjointe, c’est que j’étais familiarisée avec les problématiques des maires, notamment sur les écoles », souligne-t-elle. En juin 2021, Bédarrides, Sorgues, Châteauneuf-du-Pape, Jonquières, Courthézon élisent leurs conseillers départementaux : Christelle Jablonski-Castanier et Thierry Lagneau.
Premiers pas dans l’hémicycle, au côté de ténors qui ont ‘roulé leur bosse’ en politique. Des Pierre Gonzalvez, Suzanne Bouchet, Christophe Mounier, Élisabeth Amoros, Jean-Baptiste Blanc, Corinne Testut-Robert pour ne citer qu’eux. Un logiciel tout neuf, une vision déconstruite, Christelle Jablonski s’installe et saisit ses premiers dossiers sous le coude. « Je n’avais pas d’idées préconçues. Je n’ai jamais été encartée, je ne fais pas de la politique partisane. Je suis là pour les gens. J’ai eu la chance d’être hyper bien accueillie. Au Département, on sait rire comme on sait être sérieux », souligne la vice-présidente.
Les responsabilités ne tardent pas. La cheffe de l’exécutive manifeste son désir de la voir reprendre la commission sport, collèges et vie associative. « Elle m’a convaincue que j’avais le profil, que je pouvais y arriver », explique Christelle Jablonski. Il faut dire que la vie associative ne lui est pas inconnue. Femme de footballeur et entraîneur, fille de président de club, les terrains de foot furent sa maison durant toute sa jeunesse. « J’ai grandi sur les stades, le milieu associatif, le bénévolat et Roger qui fait des merguez tous les dimanches, je connais », résume-t-elle.
Arrivée au Département, l’élue découvre les frontières, la cartographie des compétences, jusqu’où vont-elles, où s’arrêtent-elles ? Pour l’épauler dans sa mission, une équipe « réactive et efficace ». La juriste de formation révèle rapidement son côté tatillon, « j’ai besoin de connaître le fond des dossiers, je m’investis pleinement. J’ai été élue pour une mission, des personnes étaient là avant, d’autres personnes me succèderont, mais tant qu’on y est, on fait évoluer les dossiers. Ça s’appelle l’engagement », explique-t-elle.
Rapidement, la vice-présidente rappelle l’attention que porte le Conseil départemental de Vaucluse aux collèges vauclusiens auxquels il consacre 13,4M€ en fonctionnement et 26,2M€ en investissement. Un investissement qui permet notamment d’équiper 14 000 collégiens d’ordinateurs portables. « La distribution de PC n’est pas anodine dans le 5e département le plus pauvre de France. Dans beaucoup de foyers, la fratrie se partage un seul ordinateur. Les élèves avaient du mal à croire que le PC était pour eux », se rappelle-t-elle.
A tous les détracteurs du digital et de ses dérives sur la concentration, la règle d’or réside dans l’utilisation que l’on fait de la machine. « Certains élèves ne savent pas mettre une majuscule sur le clavier, d’autres ne savent pas comment faire une recherche sur Google car trop habitués au téléphone, à Siri, etc. Il ne faut pas avoir peur de l’inconnu et sortir de sa zone de confort. A chaque changement d’habitude, il y a des crispations, mais dans ce monde qui se numérise, apprendre à utiliser ces outils s’avère indispensable. C’est d’ailleurs pour cela que les Edes de Vaucluse, dont celui d’Apt inauguré récemment, mobilisent du personnel pour accompagner dans les démarches numériques », souligne la vice-présidente.
« Nous devons vraiment travailler main dans dans la main avec l’Education nationale, faire des remontée d’informations, se voir régulièrement, travailler dans la réciprocité, sinon c’est un coup d’épée dans l’eau », commente l’élue. Et d’ajouter : « tout le monde me dit que mon mandat est long, mais non, ça va être hyper court ».
Après discussion avec la directrice des collèges de Vaucluse, un autre enjeu se révèle. « Le harcèlement, la citoyenneté, l’égalité homme/femme, ce sont des problématiques sur lesquelles nous avons été très vite en phase toutes les deux », se remémore la conseillère départementale. Dans les collèges, Christelle Jablonski met l’accent sur les ateliers de travail et d’échanges.
« Nos enfants sont nos citoyens de demain, ce sont eux qui iront voter. Je l’avais déjà remarqué en campagne d’ailleurs, beaucoup ne savent pas ce qu’est la citoyenneté. Les jeunes entendent ce que dit papa et maman le soir au dîner, ce que dit le monsieur à la TV, et se limitent à ça. En plus de la police et des intervenants classiques, il faut faire intervenir au cœur des collèges des influenceurs, des associations, des sportifs pour sensibiliser les jeunes », suggère la maman de deux enfants.
Au chapitre compétence et décentralisation, après moultes navettes parlementaires, la commission mixte paritaire à élaboré un texte commun ce 31 janvier. Le projet de loi 3DS (pour différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification de l’action publique locale) devrait être adopté sous cette législature. Une des conséquence pour les collèges de Vaucluse en est l’article 41 car les gestionnaires de collèges ne seront plus seulement soumis à l’autorité du ministère de l’Education nationale. Le département de Vaucluse exercera dorénavant une autorité fonctionnelle sur l’adjoint du chef d’établissement chargé des fonctions de gestion matérielle, financière et administrative, dans le respect de l’autonomie de l’établissement .
Il faut dire qu’à chaque vague de décentralisation, la question revenait sur la table : les gestionnaires de collège et de lycée, fonctionnaires d’Etat dépendant du ministère de l’Education nationale, ne devraient-ils pas faire l’objet d’un transfert dans la fonction publique territoriale ? Une partie de leurs missions consiste en effet à gérer les bâtiments scolaires ainsi que les services de restauration scolaire, dépendant du financement des conseils départementaux et régionaux.
« Les collèges sont une compétence phare du département de Vaucluse. Je vais à tous les conseils d’administration des collèges de mon canton. Je m’engage pendant tout mon mandat à manger dans les collèges privés ou publics, avec notamment les gestionnaires et les agents », précise la vice-présidente. Des agents qui ont quelques fois de quoi être désorientés, voir confus. Le chef d’établissement n’est pas l’employeur. Le gestionnaire donne des directives mais n’est pas le patron. Il gère le bâtiment, sur les deniers du Département.
« Les opérations ‘Au pré de l’assiette’ ainsi qu’Agrilocal ont bien fonctionné également. Promouvoir l’accès à une alimentation de qualité et valoriser le manger local, tels sont les enjeux du Département », indique l’élue. Pour ce faire, ’Agrilocal, une plateforme de mise en relation gratuite et immédiate entre les acheteurs publics de la restauration collective (collèges, écoles primaires, maisons de retraite, lycées, etc.) et des fournisseurs locaux. Sur les sept premiers mois de 2021, le chiffre d’affaires de la plateforme Agrilocal est à +154% par rapport à 2020 et à + 26,2% par rapport à 2019. « Il y a encore beaucoup de pédagogie à faire. Certains enfants ne font pas la différence entre courgette et concombre, épeautre et riz. Pourquoi ne pas faire des concours Top chef, davantage d’ateliers pédagogiques pour sensibiliser sur le bien manger », suggère-t-elle.
Deux collèges vauclusiens sont pilotes pour être labélisé Ecocert, les collèges Gérard Philippe à Avignon et Anne Franck à Morières-les-Avignon. Un label qui inclue le premier cahier des charges français dédié à la restauration collective bio, qui impose des critères non seulement sur le contenu mais aussi sur l’établissement. Il prend en compte les enjeux sociétaux, environnementaux et de santé publique des établissements de la restauration collective en 3 niveaux de labellisation. « On travaille également sur le gaspillage alimentaire, le composteur, on donne beaucoup à des associations. Avec Christian Mounier, vice-président en charge de l’agriculture, on réfléchit notamment à une légumerie mutualisée sur le bassin d’Avignon », évoque l’élue.
« Le Département est vital pour les associations. Beaucoup ne connaissent pas les dispositifs d’aide, ne savent pas comment monter un dossier, ou manquent simplement de temps. Depuis que je suis arrivée, je suis assistée par un agent spécialisé sur les subventions qui m’aide beaucoup. Mon souhait : valoriser le bénévolat. Les nouvelles générations ressentent moins ce sentiment d’appartenance, c’est un peu une ‘génération kleenex’, il faut valoriser le peu de bénévoles qu’il reste », juge Christelle Jablonski qui pointe du doigt la carence du sport de haut niveau. « Les mairies doivent aussi être un moteur, ne serait-ce qu’au regard des infrastructures dont elles sont propriétaires. En plus de véhiculer des valeurs, le sport est une vitrine, il fédère un monde économique », précise-t-elle.
Autre projet dans les cartons, le Vaucluse a postulé pour être ville étape de la flamme olympique, avec Christelle Jablonski en tant que référente nommée par l’ADF (Assemblée des départements de France). « Nous allons leur soumettre quatre ou cinq lieux stratégiques et transmettre un kit de communication aux communes labelisées afin de bénéficier d’un rayonnement maximal », conclue la vice-présidente dont les envies de Vaucluse ne sont pas prêtes à s’éteindre.