5, 4, 3, 2, 1, 0… la commune de Carpentras vient de procéder au lancement du ‘Big bang de la démocratie municipale’. La ‘fusée’ de ce nouveau dispositif inédit de participation citoyenne comprend 4 étages : une convention citoyenne, un budget participatif, un droit d’amendement et un référendum d’initiative citoyenne.
La Convention citoyenne
Dans un premier temps, la municipalité va constituer une ‘Convention citoyenne’ composée de 35 personnes tirées au sort sur les 19 000 Carpentrassiens inscrits sur les listes électorales de la commune. Le tirage au sort a été réalisé le 17 février dernier sous contrôle d’huissier de justice, de manière aléatoire et en tenant compte des critères de représentativité (résidence, âge, sexe,…). Les personnes désignées sont depuis contactées afin de savoir s’ils souhaitent, ou non, intégrer cette Convention. S’ils refusent, la commune, qui s’est constituée un ‘vivier’ de 350 citoyens tiré au sort, passe à la personne suivante.
L’objectif est d’installer les membres, sélectionnés pour une durée de 1 an non-renouvelable, d’ici le mois d’avril prochain. Leur mission sera alors d’informer la Ville des besoins des citoyens, de sélectionner les projets du budget participatif et de prendre connaissance des projets de délibération soumis au conseil municipal.
«Une promesse de campagne.»
Auparavant, ces bénévoles qui disposeront toutefois d’un statut juridique de ‘Collaborateurs occasionnels’ auront bénéficié d’une session d’information donnée par un professeur de l’université d’Avignon sur le fonctionnement de la municipalité. La Convention se réunira ensuite une fois par mois ou davantage si nécessaire. « La mise en place de cette Convention était une promesse de campagne », insiste Serge Andrieu, maire de Carpentras, soucieux de renouveler le fonctionnement de la vie démocratique municipale.
Un budget participatif de 700 000€
Histoire de donner du concret à l’ensemble de l’initiative, la Ville a aussi décidé de mettre en place un budget participatif doté de 700 000€.
« Le but n’est pas seulement de donner la parole aux habitants mais de leur donner les outils pour agir », poursuit Serge Andrieu.
Dans ce cadre, la Convention citoyenne sera en charge de récupérer les doléances des Carpentrassiens de plus de 16 ans d’ici juillet prochain.
« Pour déposer un projet, il suffira de se connecter à la plateforme dédiée ou de remplir un formulaire papier en prenant bien soin de répondre aux critères de recevabilité des projets, détaillés sur le site web, précise le maire. Evidemment, seules les propositions relevant des compétences de la Ville seront retenues. »
Pour la commune, qui dispose d’un budget investissement de l’ordre de 10M€ par an, l’enveloppe n’est pas neutre. « Cela représente une somme 25€ par habitants, contre 12€ en moyenne dans les 150 communes françaises qui ont mis en place ce type de budget participatif », complète Yvette Guiou, première adjointe à l’Enfance et à la Démocratie locale.
La Convention, en collaboration avec les services municipaux, examinera ensuite durant l’été la recevabilité, la faisabilité et le coût des projets déposés. Les propositions retenues seront soumises aux votes des habitants en octobre ou novembre prochains. Les propositions ayant récoltées le plus de votes seront inscrites dans le budget de la ville qui s’engage à les réaliser en 2022.
« Bien évidemment, il s’agit de privilégier les dossiers d’intérêt public et pas les projets privés », rappelle Serge Andrieu.
«Le droit d’amendement est désormais donné pour la première fois aux Carpentrassiens.»
Création d’un droit d’amendement
Si les deux premiers dispositifs existent déjà par ailleurs dans le firmament des outils de la proximité démocratique, Carpentras va se doter également d’un ‘Droit d’amendement’ inédit.
Désormais, chaque citoyen pourra déposer un amendement sur une délibération future du conseil municipal. Concrètement, deux semaines avant chaque conseil, la note de synthèse sera publiée sur le site de la Ville. Si un habitant souhaite proposer une modification, il lui suffira de le faire via la plateforme dédiée. Le projet d’amendement sera alors soumis au vote des citoyens et ils auront jusqu’à 48h ouvrables avant la séance pour voter. Si 2% des électeurs soutiennent la proposition (soit 380 personnes), l’amendement sera présenté aux conseillers municipaux et sera alors débattu. Il pourra être, comme les amendements déposés par les élus, adopté, rejeté ou renvoyé en commission.
« Existant déjà pour les conseillers municipaux, détaille le maire, ce droit est désormais donné pour la première fois aux Carpentrassiens. »
Le référendum rendu enfin accessible
Enfin, dernier satellite de cette constellation de moyen mis à disposition de l’univers de la démocratie participative, la possibilité d’organiser automatiquement un référendum d’initiative citoyenne si 10% des électeurs carpentrassiens en fond la demande.
Ainsi, toujours sur le site internet, il sera possible de déposer une pétition citoyenne (sur des sujets relatifs aux compétences de la municipalité). Pour cela, cette pétition devra recueillir la signature d’environ 1 900 électeurs dans un délai de 9 mois. Le maire s’engageant ensuite à inscrire à l’ordre du jour du conseil municipal l’organisation de ce référendum décisionnel.
«C’est certainement mon côté contestataire.»
« Fortement sollicité par le mouvement des Gilets jaunes, le référendum d’initiative citoyenne n’est pas prévu par le droit français, constate Serge Andrieu. En revanche, c’est une volonté de la municipalité. C’est pourquoi, un référendum municipal sera automatiquement organisé si 10% des citoyens carpentrassiens le réclame. »
Pour le maire, à l’inverse du dispositif national du Référendum d’initiative partagée (RIP) dont les conditions d’application le rendent inatteignable, ce seuil vise à rendre accessible la possibilité de convoquer un référendum.
« C’est certainement mon côté contestataire », taquine Serge Andrieu qui constate cependant « que de nombreux élus ne font pas ce qu’ils devraient pour leur territoire mais font juste ce qu’il faut pour être réélu. Avec ce dispositif concret, chaque citoyen pourra exercer le pouvoir qui est le sien, contrôler l’action du maire et des élus, et agir pour ce qui lui semble prioritaire pour notre ville. Il s’agit d’un véritable contrat passé avec les Carpentrassiens. »
Pour le maire ce ’Big bang’ vise donc à montrer la voie (lactée ?) de l’implication citoyenne dans la démocratie locale grâce à cette initiative inédite en France via la mise en place de ces 4 outils cumulés.
« Une des principales volontés de la Ville est de laisser la parole aux Carpentrassiens et de co-construire à leurs côtés la ville de demain, conclut-il. Par cette volonté de changer radicalement notre démocratie municipale, je donne la possibilité à chacun de reprendre le contrôle sur l’avenir de Carpentras. »