Elle est née dans une famille plutôt bourgeoise où il y a les choses qui se font et celles qui ne se font pas. Elle tombe amoureuse d’un sale gosse, qui représente tous les interdits et surtout toutes les transgressions qui n’ont pas cours là d’où elle vient. Belle, intelligente, rebelle, elle veut emprunter un autre chemin.
On a déjà entendu cela non ? Vous pensez à la chèvre de Monsieur Seguin ? Au petit chaperon rouge ? Vous ne vous trompez pas, même si la formule peut paraître maladroite car c’est bien l’histoire d’une toute jeune fille qui va traverser le miroir, se transformer en jeune-femme, devenir mère et qui va finir par s’enfuir de l’enfermement pour sauver sa peau et celle de son enfant, dont il est question.
Mais pourquoi les jeunes-filles en fleur
doivent-elles vivre l’enfer, tomber à genoux pour devenir celles qu’elles auraient dû être sans toute cette violence ? Car oui, il est question de violence, de détournement, de salissures, là ou pourtant la jeune-fille rêvait d’harmonie, de bienveillance et, soyons fous, d’amour.
Comment fait-on pour se réparer ?
Pour faire à nouveau confiance ? Pour peut-être parler mieux et plus à propos à son enfant pour qu’il échappe à la répétition ?
Le texte de Clarysse Fontaine
est une merveille d’ouvrage ciselé, intelligent, décrivant les rêves et les dérapages, l’amour et la mise sous emprise, l’envie de liberté et l’enfer, le courage de l’affrontement et du départ pour survivre et puis, un jour vivre, vraiment.
Quand vient le temps de l’apaisement, on essaie de comprendre,
de lever le voile sur cet inconscient qui a fait chavirer votre vie, enfin, il devient possible d’exorciser le passé pour réparer ses cicatrices avec du fil d’or. Qui a dit qu’un vase fêlé laissait entrer la lumière ? Qu’un vase réparé à la dorure prenait, à chaque nouveau choc, un peu plus de valeur ?
Nous y sommes.
Si l’histoire commence par la fable du petit chaperon rouge, c’est bien le petit chaperon rouge qui vaincra, non pas en tordant le cou au loup mais en lui tendant son propre miroir. Car si l’on explique au bourreau, sa propre machinerie, ne serait-il pas invité à en prendre conscience et, peut-être à cesser de séduire dans se rets de potentielles victimes ? Si les mères, les sœurs, s’ouvraient sur ce qui se joue entre un homme et une femme, les couples pourraient ils se former sans s’aliéner l’un l’autre ?
Cette petite musique que personne n’entend
Est un bijou de résilience concocté avec une infinie intelligence et beaucoup de cœur par Clarysse Fontaine qui évoque sa propre histoire poussant le bouchon jusqu’à demander à Joey Star d’en faire la mise en scène. Soufflé et sidéré par la demande de Clarysse, devant son insistance, l’artiste très controversé mais soyons clairs génial – lira le texte et acceptera le deal. Il participera au spectacle, dans les coulisses, pour contribuer à ce chef d’œuvre qui, tout de même, met très mal à l’aise les hommes –non, ils ne sont pas coupables-, a fait pleurer les femmes qui y amènent filles et fils. Car il est plus aisé de ne pas tomber dans le piège quand on en discerne les contours.
Pourquoi il faut aller voir Cette petite musique que personne n’entend
Parce que c’est aussi violent que beau. Parce que la mise en scène est aussi élégante qu’ultra réaliste, voire crue… Lever le voile avec détermination et précision permet de comprendre et d’éviter les écueils que la vie n’omettra pas de placer sur notre chemin, que l’on soit fille ou garçon, femme ou homme, mère ou père…
Cette petite musique que personne n’entend. 22h. Jusqu’au 26 juillet. Texte et jeu de Clarysse Fontaine avec une mise en scène de Joey Star. De 12 à 23,50€. Théâtre du Balcon. 38, rue Guillaume Puy à Avignon. 04 90 85 00 80. Réservation ici.