Voilà. Dès le 1er jour au matin du festival off, dans la rue, la multitude. Les trottoirs ressemblent déjà aux allées des métros parisiens car les piétons ne savent pas encore qu’ils peuvent emprunter la rue de la République vidée de ses voitures. Les affiches se font un peu rares encore. Le soleil et le Mistral sont au rendez-vous. Que la fête commence.
Et ça tombe bien puisque nous sommes allés assister à la présentation des troupes du Théâtre du rempart où Ange Paganucci comédien et maître de cérémonie aux côtés de Sylvain Cano-Clémente, le régisseur, a procédé aux présentations entre le public, la presse et les troupes. Tandis que ces dernières offraient de leur temps et de leur talent le temps d’un extrait. Alors on s’est permis de donner nos impressions.
Ça commence par ‘Noir sur blanc’ de Zèbre à trois
Ce concert théâtralisé mêle musique, chansons et dessins. Tout commence avec un billet doux plié en avion de papier qui s’envole. Avant d’arriver à sa destinataire il survolera tout un monde de personnages en musique et paroles tandis que sont projetés les dessins pris sur le vif. « Le thème est la correspondance », explique Hervé Peyrard le leader de Vocal 26. Lettre à ma mère, à Narcisse, de L’Océan. On rencontrera Blanquette qui écrit une carte postale à Monsieur Seguin, la Lettre de vacances.
Avis
Les 4 artistes –les 3 musiciens et le dessinateur- emmènent le public en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. C’est rythmé, joyeux, dansant et les paroles font merveilles. On en sort galvanisé redevenant l’enfant pétillant et serein de nos vacances d’été.
Un spectacle musical à partir de 7 ans. A 10h05. Du 7 au 30 juillet. Relâche les 13, 20 et 27 juillet.
Les nuits de Georges de la Tour de Barbara lecomte
Nous sommes à Lunéville en Lorraine au XVIIe siècle. Le grand artiste au caractère difficile peint la jeune Anne qui devient, pour les besoins de l’œuvre, l’ermite Marie-Madeleine en oraison. Effrontée, elle veut décrypter l’obsession du maître pour cette figure de la Bible et découvre ses secrets.
Extrait
«J’ai réfléchi aux secrets de vos tableaux et je crois en avoir percé un. Vous peignez Sainte Marie-Madeleine, Magdalena en Araméen et en hébreu. Or, Magda signifie une construction en forme de tour. Dans le miroir cela devient la foi de la Tour. Au fond, c’est vous que vous peignez. Chaque coup de pinceau est un baume sur votre âme.»
Avis
Le texte est très beau et le jeu des acteurs est puissant et juste. Du théâtre comme on l’aime, qui vous propulse dans l’atelier d’un artiste autoritaire au côté d’une toute jeune-femme modeste mais déjà éveillée aux symboles et à la vie.
Théâtre contemporain à partir de 11ans. A 11h25. Du 7 au 30 juillet. Relâche les 13, 20 et 27 juillet.
Désirada de Maryse Condé
C’est un ouvrage de la journaliste, professeure de littérature et écrivaine Guadeloupéen de renommée mondiale Maryse Condé –prix Nobel de littérature en 2018- qui, à la demande de la comédienne et ancien mannequin Nathaly Coualy a adapté son roman au théâtre. Celle qui vit désormais à Gordes sera même présente dans la salle pour la voir jouer le 12 juillet. La comédienne est accompagnée d’un musicien et conteur, Igo Drané.
Extrait
«Je salue et surtout je souris. Ce que les femmes de chez nous ne savent pas faire : sourire. Tellement de deuils, de souffrance, de coups bas du sort leur laisse là, en travers de la gorge, comme des arrêtes de poisson. Mais aujourd’hui je suis devenue docteure es lettres. Depuis j’ai eu besoin de chercher qui est mon père. Est-ce que je suis le fruit du viol ou de l’amour ? Alors je vais aller voir ma grand-mère à la Désirade, dont on ne m’avait pratiquement jamais parlé. Et un jour ma mère me fera ses révélations alors qu’elle m’avait abandonné et que j’ai grandi à Pointe-à-Pitre.»
Avis
«Un jeu subtil, une voix profonde, une vraie présence sur scène, le bois blanc, le son du coquillage pour recueillir un peu des confidences que la grande Maryse Condé éparpille dans ses magnifiques textes. Là où ça n’est jamais tout à fait elle mais un peu quand-même. Et lui faire confiance pour avoir offert cette adaptation à la comédienne et personne d’autre qu’elle pour ce rôle.»
Théâtre contemporain. A partir de 12 ans.13h10. Du 7 au 30 juillet. Relâches mercredis 13, 20 et 27 juillet.
Gringoire et Blanchette d’après Alphonse Daudet
La Chèvre de Monsieur Seguin d’Alphonse Daudet est parue en 1866. On raconte l’histoire aux enfants alors qu’elle est d’une extrême violence. Le sujet ? La transgression et la castration et, aussi, une allégorie de la liberté. La dernière-née d’une famille de paysan veut aller à la ville où ses autres sœurs se sont déjà rendues et perdues. ‘Les animaux domestiques sont destinés à vivre attachés, pas à batifoler dans la montagne’.
«Tu t’ennuies ? Je veux aller à Paris. Malheureuse ! Tu ne sais pas que c’est dangereux Paris ? Qui te protègera quand tu seras là-haut ? Innocente tu ne connais pas les hommes ! Tes sœurs déjà…»
Avis
Sur le plateau trois comédiens expressifs, vivants, habités, qui ont conscience des sacrifices générationnels des femmes. Ici Blanchette est une petite chevrière. Quel sera son destin ? Comment l’homme, le père, l’écrivain, le journaliste lisent-ils ces funestes destinées ? Le goût de la Liberté conduit-il à la transformation de soi ou à sa perte ? Comment peut-on grandir en société sans être sacrifié aux loups ? Une très belle réflexion théâtrale sur une mise en scène vibrante.
Théâtre contemporain. A partir de 12 ans. 14h45. Du 7 au 30 juillet. Relâche les mercredis 13, 20 et 27 juillet.
Antonio Placer quartet en concert
C’est l’histoire d’une rencontre : le jazz, le flamenco et les chansons aux consonances hébraïques entre Grenoble et Grenade.
Avis
Les chansons évoquent l’amour d’un enfant pour sa mère, les blessures secrètes d’une famille juive séparée durant des décennies, les hommes et les femmes qui n’auront pu se revoir mais aussi la possibilité d’une rencontre, des vies éloignées qui se rejoignent enfin. Les musiciens et chanteurs sont accompagnés d’un danseur qui donne corps et vigueur aux émotions. Les rythmes, les accords de guitare, les voix masculines sont magnifiques et la mise en scène élégante, structurée, sobre et vibrante.
Du 7 au 23 juillet. 16h25. Relâche les mercredi 13 et 20 juillet.
Enfin vieille ! de Laura Elko
Alors que Laura fête ses 30 ans, son doudou –une peluche marionnette- lui titille la conscience. Elle s’engage dans un chemin tout tracé : son travail et son amoureux l’ont désormais mise sur les rails du train de sa vie. Mais est-ce bien là sa volonté ? Un spectacle ventriloque mais pas que…
Avis
Laura Elko relate le grand saut. Se fera-t-il ou pas ? Elle aura besoin d’un psy dans la salle pour faire la part des choses. Une comédie légère qui pourtant en dit long sur un quotidien peut-être un chouia aliénant propre à faire oublier les rêves des petites-grandes filles. Peut-on vivre sa vie où laisse-la-t-on aux mains d’autres qui vous imposent la leur ? Avec subtilité et malice Laura Elko vous dit tout ce que vous auriez souhaité ignoré et vous n’en sortirez pas indemne.
Seule en scène. Du 7 au 30 juillet à 17h55. Relâche les 13, 20 et 27 juillet.
L’art délicat du quatuor de Jos Houben
Ils sont quatre musiciens sur scène pour nous faire découvrir, autrement, les plus grands virtuoses tels Mozart, Schubert, Beethoven. A la fois une histoire et un voyage. Comme tous les matins avant un concert les 4 musiciens se retrouvent pour prendre leurs marques dans la salle. Mais ils sont au pied du mur. Mais cette fois-ci ils ne doivent pas donner un concert mais une conférence. Une expérience musicale par le théâtre.
Avis
Ils sont jeunes, beaux, talentueux, charmeurs et surtout… Excellents musiciens. En plus de la beauté de la musique ? Ils jouent leur scène à la perfection : gestuelle, mimiques, pince-sans-rire, nous sommes dans le burlesque, dans une élégance déjantée un peu à la Jacques Tati. On en sort ravis, revigorés et dans une bonne humeur à déplacer les montagnes.
Du 7 au 30 juillet. 19h30. Relâche les 13, 20 et 27 juillet.
La mégère apprivoisée de Shakespeare
William Shakespeare l’a peut-être écrite en 1594. Le thème ? Le processus d’apprivoisement. Là il est transposé dans les années 1970. Une association accueillant des personnes toutes atteintes de troubles de la personnalité œuvre à faire travail collectif. Une nouvelle arrivée à la forte personnalité agressive et vindicative va bouleverser les fondations du groupe.
Avis
Chaque personnage fait écho à une personne que l’on a tous connue. Tous des archétypes de notre folle société qui, pourtant, doit avancer. Ce qui nous est demandé ? De distinguer les contraintes familiales et sociales. Le jugement, la misogynie et trouver le chemin de la joie et du partage. Une satyre des cases dans lesquelles on met les gens. Un étiquetage contraignant pour les uns, rassurant et surtout dominant pour les autres. Et si l’on s’en abstenait pour avancer ? Une jolie histoire pour remettre chaque chose à sa place. Humain, marrant et comme souvent plus profond qu’il n’y parait pour dire qu’ensemble on est plus fort.
Du 7 au 30 juillet. Relâche les 13, 20 et 27 juillet. 20h55. A partir de 8 ans.
Les infos pratiques
Théâtre du rempart. 56, rue du rempart Saint-lazare à Avignon. 04 90 85 37 48. Réservation 09 81 00 37 48. www.theatre-du-rempart.com