Après une mémorable édition 2022 des Rencontres du Sud manifestation cinématographique professionnelle ouverte partiellement et séparément au public, Avignon redevient capitale du 7e art du lundi 20 au samedi 25 mars 2023. Plus de 300 professionnels sont attendus pour échanger et découvrir 18 films en avant-première, et des équipes de films. Avec entre autres Dany Boon, Charlotte Gainsbourg, Andréa Bescond et Eric Métayer, Victoria Bedos, Chad Chenouga… Rencontre avec René Kraus, président de l’évènement et directeur général du multiplex Capitole Studios au Pontet.
Ces rencontres cinématographiques nées il y 13 ans c’est une belle histoire ?
« En France il y a trois rencontres de ce type là pour les professionnels. En janvier les rencontres de Bretagne plutôt axées sur l’art et essai, en avril les rencontres de Gérardmer dans les Vosges et en mars avant le festival de Cannes les rencontres cinématographiques du sud qui prennent depuis des années une véritable ampleur due aussi bien à la qualité de la programmation, qu’à la convivialité et l’organisation mise en place faisant partie de notre ADN. Nous ne présentons que des films en avant première. Cette année 18 films et 11 équipes de films avec du film d’auteur ou commercial. »
Où ont lieu ces rencontres ?
« Nous travaillons avec Utopia et le Vox points névralgiques du centre ville, mais aussi avec le Capitole Studio pour des films plus commerciaux et cette année exceptionnellement avec Pathé producteur d’un film de Dany Boon qui sera présenté au Pathé Cap-Sud. Et également nous travaillons avec deux cinémas du Vaucluse, Le Rivoli à Carpentras avec Florence Passalacqua et avec Eric Telènne à Cavaillon où nous présenterons un film auquel je suis très attaché qui sera « quand tu seras grand » d’Andréa Bescond et Eric Métayer. »
Vous renouez avec la prestigieuse cérémonie des Victoires où sera dévoilé le palmarès ?
« Oui, nous reprenons ce que nous avions dû arrêter au moment du covid. Le jury des montreurs d’images expression d’Agnes Varda pour parler des exploitants sera présidé par Rafael Maestro directeur de Ciné Passion en Périgord, avec Laurence Meunier du Majestic de Compiègne et le Ciné Laon, David Marguin du Voltaire à Ferney-Voltaire, Pascal Heck de UGC Toison d’or de Bruxelles, et Lucile Bajot-Richard distributrice de Canal +. En même temps le jury des lycéens remettra un prix. Il réunit des élèves de deux établissements de formation du campus des sciences et techniques d’Avignon. »
Onze films sont en compétition ?
« Nous avons une sélection de onze films, plutôt des films d’auteurs, les sept autres films qui sont plus des films commerciaux de qualité ne concourent pas ils sont hors compétition. Souvent dans les jurys, et je pense au festival de Cannes, il n’y a pas d’exploitants. Pourtant ils présentent les films, les défendent et sont capables de bien les juger. Là un panel de distributeurs exploitants du cinéma, de l’art et essai, du commercial seront présents dans le jury décernant le prix. »
Les Victoires du cinéma vont mettre à l’honneur une personnalité ?
« Nous rendons hommage à un exploitant emblématique, Jocelyn Bouyssy directeur général de CGR Cinémas (Circuit Georges-Raymond) groupe créé en 1966 à La Rochelle par Georges Raymond. Il a 700 salles et 73 cinémas. Il a démarré en coupant des tickets dans une salle de cinéma, est devenu directeur régional puis a pris la direction du groupe qu’il a continué à développer. Une structure qui fait 18 millions d’entrées. Il a également une boite de distribution, Apollo Films. Le groupe est très implanté en province de manière que partout vous faites 20′ en voiture vous trouvez un cinéma. Les actionnaires ont demandé la cession du groupe. »
Quelle est la place des enfants ?
« Au Capitole Studios il y a le ‘Petit festival’ qui s’adresse au public scolaire. Devant plus de 200 personnes nous allons présenter des courts et des longs-métrages avec une thématique particulière comme le harcélement à l’école ou le handicap. Il y aura différents intervenants pour approfondir la découverte des oeuvres. Un système a été mis en place dans le cadre associatif, c’est le Pass Culture collectif. Nous proposons sur le site une thématique sur laquelle on veut travailler et présenter des films et les écoles adhèrent ou pas. Ces dernières peuvent être réactives car le pass culture est ouvert à tous types d’établissements. Le ciné-pitchoun au Capitole du Pontet propose samedi 25 mars des films pour les enfants à voir en famille. »
Comment se porte le cinéma au niveau national ?
« En 2019 nous faisions 210 millions d’entrées, en 2021 100 milllions, en 2022 152 millions. Donc le cinéma remonte. Je suis optimiste. L’offre de films, notamment américaine est de plus en plus présente. L’offre de comédies françaises reprend aussi et je pense que nous avons besoin de tous types de cinémas, évidemment aussi le cinéma d’auteur. Je note que les grands auteurs américains comme Spielberg ou d’autres comme Damien Chazel, Sam Mendes fonctionnent mieux en Europe et en France qu’aux Etats-Unis. Il y a une véritable remontée, nous pouvons atteindre les 190 millions d’entrées. Nous sommes le 3e marché de cinéma du monde derrière les Etats-Unis et la Chine. »
Et au niveau du Grand Avignon ?«
« ici c’est un cas d’école, un laboratoire extraordinaire. Il y a deux multiplexes très importants, le Capitole Studios multiplexe indépendant dont je suis directeur général et associé avec Daniel Talandier, le Pathé qui est un groupe national, le Vox un cinéma de centre ville qui a maintenant un label d’art et essai, Utopia un cinéma pur art et essai. Dans le département on a à côté Carpentras, Cavaillon, Orange… Il y a ici quelque chose lié au développement du théâtre et de la culture en général. C’est la région qui a la plus haute fréquentation des salles de cinéma depuis l’année dernière. On fait 50 % d’entrées en plus. »
Après le succès en 2020 de « La belle époque » en 2022 de « Mascarade » de Nicolas Bedos dont vous étiez co-producteur, vous investissez dans « Quand tu seras grand » d’Eric Métayer et Andréa Bescond. Parlez-nous de ce film…
« Je suis très content d’avoir pu participer à cette aventure qui j’espère aura autant de succès que « Les chatouilles » leur premier film. Là c’est dans une maison de retraite avec les relations intergénérationnelles dans le cadre de ce genre d’établissement. On voit le travail des aides-soignants, des soignants, des employés confrontés aux patients, au manque de personnel, aux situations particulières, à une direction qui peut être dure mais qui a des obligations. Il y a de l’humour, une dimension poétique à la fin du film et matière à réflexion. »
C’est un sujet que vous connaissez bien ?
« Quand ils m’ont parlé la première fois de ce projet, Eric et Andréa, l’ignoraient mais j’ai géré plusieurs années un Ehpad à Salon-de-Provence. J’ai pu dire à Eric et Andréa s’il y avait des invraisemblances dans le scénario. A l’époque je dirigeais un établissement de 87 lits. Nous avions prévenus face à l’arrivée de gros groupes qui avaient la mainmise sur plusieurs établissements. Nous nous plaignions déjà d’un manque de personnel, de médecins. Personne n’a écouté. Pour moi ce film c’est comme une sorte de catharsis qui donne un sens. Dans les émotions du cinéma il y a quelque chose d’intemporel. »
Propos recueillis par Jean-Dominique Réga