Le village de l’allemand ? C’est d’abord un livre de Boualem Sansal récompensé par de nombreux prix littéraires. L’auteur a cependant subi nombre de critiques quand ce ne sont pas menaces et censure car il traite d’un sujet tabou dans son pays : la Shoah et de l’installation d’anciens nazis dans des villages algériens, venus prêter main forte lors de leur guerre de libération.
Un point de vue courageux
De ce fait historique et de la connaissance d’une histoire vraie, Boualem Sansal a construit un récit passionnant que la mise en scène de Luca Franceschi a non seulement rendu encore plus crédible mais essentielle à transmettre. Il veut par son récit combattre le négationnisme et l’amnésie mais il n’hésite pas à franchir le pas de l’amalgame nazisme et islamisme, sans toutefois minimiser la Shoah.
Silence d’Etat et secrets de familles
Souvent à la mort d’un proche, les langues se délient mais le silence peut être aussi de rigueur. Ici tout démarre par le suicide du frère de Rachel, Malrich. Rachel, c’est la contraction de Rachid et Helmut et Malrich, de Malek et Ulrich : ils sont moitié algériens par la mère et moitié allemand par le père. Les parents sont restés au village en Algérie mais eux vivent à Paris, chez un oncle, dans la banlieue parisienne. Le 24 avril 1994, au cœur de la «décennie noire» qui touche l’Algérie, le douar d’AïnDeb, près de Sétif, est attaqué par des membres du GIA (Groupe islamiste armé) et ses habitants massacrés, dont leurs parents, suivis du suicide de Malrich en France. La découverte de son carnet et sa lecture seront le fil conducteur du spectacle.
La mise en scène de Luca Franceschi est sensationnelle
par petites touches de lumière, de sons ou de décors on est transporté dans des lieux et des époques pourtant très différents : l’Algérie de 1994, la banlieue parisienne, l’Allemagne nazie… L’évocation des lieux est immédiate – l’entrée d’Auschwitz fait frémir- , les entrées de scène des 6 comédiens sont très fluides. Ils sont tous formidables dans leur capacité à nous entraîner, tel un thriller dans la recherche de la vérité.
Jusqu’au 26 juillet. 9h50. 10 à 20€. Théâtre des Carmes. 6 place des Carmes. 04 90 82 20 47. Réservation ici. theatredescarmes.com