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La Chartreuse, Louise Cara et Claude Garanjoud en dialogue

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Les artistes Louise Cara et Claude Garanjoud (1925-2005) exposent leurs œuvres à la Chartreuse de Villeneuve lès Avignon du 30 Juin au 22 septembre 2024. Le vernissage aura lieu le 30 juin à 11h et conférence-débat sera donnée à 15h en présence de Louise Cara et Pierre Provoyeur, conservateur général honoraire du patrimoine, auteur de ‘Garanjoud’ paru chez Actes Sud, qui évoquera la personnalité et les œuvres présentées de Claude Garanjoud (1925-2005).

Il y a des dialogues qui s’instaurent au-delà du temps et de l’espace pour s’inscrire ici et maintenant, dans un lieu monastique, comme une porte ouvrant sur un autre monde.


C’est en tout cas ce que l’on pourrait bien vivre à la Chartreuse.
Evidemment l’exercice requiert un œil ouvert, faisant de nous les visiteurs capables de ressentir les émois des artistes qui ont retranscrit sur de nombreux supports, les chocs qu’eux-mêmes ont vécu et ainsi restitué.

Il y est question de formes, de couleurs,
de vibrations peut être amplifiées par les pierres de cet ancien édifice religieux, un monastère cartusien, empli de la vie laborieuse, studieuse et spirituelle des moines bâtisseurs à l’origine de la Chartreuse. Nous étions, alors, au Moyen-âge.

C’est ainsi que le parcours artistique nous happe,
pas après pas, élevant nos semelles de vent vers les chemins tracés des œuvres qui sont autant de portes vers un ailleurs à la portée de chacun.

Œuvre de Louise Cara

Il y a, entre Louise Cara et Claude Garanjoud comme une écriture,
un alphabet commun et mystérieux, invisible au premier abord mais qui, pourtant, se tisse, au gré des marches que l’on gravit, comme un chemin initiatique. Claude Garanjoud (1926-2005) travaillant le bleu outremer de l’intense au transparent, le gris et le blanc, tandis que Louise Cara se consacre au rythme, au trait, au noir sur le blanc, parfois à l’ardoise et au sépia.

Claude  Garanjoud trace des courbes douces, des vibrations ondulantes,
un énigmatique X au creux de certaines toiles, comme le point de rencontre de plusieurs mondes, quand Louise Cara appose son alphabet magique entre le banc et le noir sur une partition qui s’offre au gris ardoise, parce que le monde évolue aussi en niveaux de gris. Ainsi, l’on voyage en strates tantôt verticales, tantôt horizontales, entre apnée et respiration, au retour au premier souffle, au passage.

Louise Cara et Claude Garanjoud
sont tous les deux des chercheurs. Louise Cara a été appelée par l’Orient, le soufisme et l’Extrême Orient et ne travaille qu’avec l’encre japonaise. Elle fait sienne cette phrase de Nicolas de Staël : ‘On ne peint pas ce que l’on voit mais le choc qu’on a reçu’. Sa réalité ? L’écho que produit en elle par son environnement : la pierre, les meurtrières, une porte ancienne et habitée… La spiritualité l’emporte toute entière à la rencontre des Eveillés des trois religions du Livre (Judaïsme, Christianisme, Islam), des répétitions qui mènent à la méditation.

Le geste, Louise Cara

Lieux patrimoniaux et Art contemporain
Depuis 10 ans, Louise Cara expose ses œuvres dans des lieux de patrimoine comme au Grenier à sel, à l’ancien archevêché d’Avignon, au château de Gordes, à la chapelle des Ursulines de Quimperlé, à Fès au cœur de la Médina et même à New-York, où elle trace, ainsi un trait d’union entre villes anciennes et villes du futur, s’emparant des remparts d’Avignon et de leurs meurtrières, en passant par les venelles de la Médina, poursuivant son cheminement au gré des fenêtres et portes étroites de la Chartreuse, s’arrêtant aux baies vitrées des buildings. Les lieux et les hommes se mêlant en une subtile alliance.

Un geste comme une prière
C’est avec une spatule de peintre en bâtiment, large de 26 cm que Louise Cara applique l’encre japonaise auparavant travaillée avec un liant. Alors que l’encre est maintenue, en un équilibre précaire sur la tranche de l’outil, l’artiste, en apnée, s’apprête à l’apposer sur son support puis à tracer un trait parfois plein et profond, parfois transparent, pour à peine en tracer les contours.

Le parcours
Pour cette exposition, ‘Tracés de lumière’, Louise Cara nous proposera la rencontre de 35 œuvres à la Bugade comme une invitation à l’élévation, un hommage aux lieux, aux Eveillés qui l’inspirent. Ses premiers traits sur papier Arches dans leur exaltation seront présentés au rez-de-chaussée, pour nous conduire au premier étage à travers six grands papiers coréens de 2,15m de haut, exposés à Fès en 2022 à l’occasion du Festival de la culture soufie.

La Chartreuse Copyright Louise Cara

Le grand séchoir
Ces six papiers seront présentés dans le Grand Séchoir, seules œuvres que Louise Cara a conçues avec des pigments et des encres de couleurs, créées pour évoquer les manteaux et tuniques des maîtres spirituels issus de la source abrahamique. Les traits achèveront leur pérégrination au niveau de la dernière cellule par un trait de lumière transfiguré en Or, l’encre noire aura vécu sa propre alchimie.

Les 35 œuvres témoigneront de l’émotion ressentie
telle la porte de la prison de la Bugade, au rez-de-chaussée, interprétée par Louise Cara comme un paysage, évoquée par des carrés d’encre brun et sépia pour traduire les couleurs de bois brûlé de cette sublime porte transformée par elle comme un passage vers la liberté.

Claude Garanjoud
Claude Garanjoud (1926-2005), lui, fut forgé par le ciel, l’eau et les montagnes de ses Alpes natales, l’Orient. Il travaille l’encre de Chine pour le papier et l’acrylique pour la toile. Il est un artiste de l’abstraction lyrique, s’extrayant des limites de la figuration préférant la sensation de la trajectoire. Tout comme Louise Cara, il est séduit par Nicolas de Staël, Saint-John Perse, René Char, Kenneth White, François Cheng et aussi Höderlin et Rainer Maria Rilke.

Oeuvre de Claude Garanjoud

L’espace et l’œil
L’œil qui s’ouvre ouvre l’espace, accueille et provoque son expansion à l’infini. C’est bien ce que Garanjoud transmet à quiconque entre en contact avec l’une ou l’autre de ses toiles, de ses gravures, de ses encres et déjà dans ses collages initiaux. Le déploiement de l’espace visuel s’opère par le mouvement. Hachures du graveur, course de l’artiste qui propulse au moyen d’une large spatule une pâte visqueuse sur une bâche étendue au sol, geste orbital d’une série consacrée au cercle, parcours d’élévation vers les hauteurs, ou plutôt par-delà les sommets, vers un ciel d’azur. Une sorte de culte du vent culmine dans le dépouillement ultime des contraintes physiques de la toile offerte aux souffles ambiants et rendue lisible du fait de sa perméabilité à l’envers comme à l’avers.

Cet espace s’offre dans la transparence bleutée
de l’azur nuancée selon la météorologie de gris, de blancs lumineux ou cassés que des noirs parfois appuyés soutiennent ou provoquent. L’œuvre entière pourrait se lire comme un voyage, une traversée vers le bleu sans limites.

Ce qui les unis ?
Ce lieu emblématique où tous deux ont baigné, émus, habités et dont ils ont retranscrit l’écho entre l’ombre et la lumière, le vide et le plein. Admirant aussi et s’imprégnant de l’aura du ‘Couronnement de la Vierge’ d’Enguerrand Quarton et des fresques de Matteo Giovannetti. Tous deux attirés comme des aimants par l’abstraction et le mysticisme, l’indicible, l’espace, le mouvement et la hachure du trait.

Œuvre de Claude Garanjoud

Les infos pratiques
Exposition de peintures avec Louise Cara pour ‘Tracés de lumière’ et Claude Garanjoud. Deux peintres en résonance. Centre national des écritures du spectacle. 30 Juin- 22 septembre. Vernissage le 30 juin à 11h et conférence-débat à 15h en présence de Louise Cara et Pierre Provoyeur, conservateur général honoraire du patrimoine, auteur de Garanjoud paru chez Actes Sud, qui évoquera la personnalité et les œuvres présentées de Claude Garanjoud (1925-2005). La Chartreuse de Villeneuve lès Avignon. 58, rue de la République. 04 90 15 24 24 Chartreuse.org

Œuvre de Claude Garanjoud

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