On pouvait être inquiet vu le mistral qui faiblissait à peine. Les épis de blés démesurés ployaient avec grâce sur la scène du théâtre antique, ajoutant la poésie qu’il fallait à cet acte bucolique. Le haut mur du théâtre antique où s’appuie une immense roue crantée de tracteur laisse deviner une ferme où s’agite tout un petit monde des champs, lilliputiens, insectes et animaux. Nous sommes dans un monde de légendes presque de fantasy où tout est démesuré tel l’amour de Nemorino pour Adina. Tout est exagéré et naïf : comment peut on prendre du vin pour un élixir d’amour ?
Une merveilleuse mise en scène d’Adriano Sinivia
Après l’avoir joué à Bordeaux (d’où l’énorme bouteille de bordeaux contenant la potion magique! ) Adriano Sinivia se devait d’adapter les décors et les déplacements au plateau du Théâtre Antique – qui est 4 fois plus grand que celui du théâtre de Bordeaux- et ce en très peu de temps. Il rassemblait pour l’occasion de nouveaux chœurs, celui de l’Opéra Grand Avignon de Monte-Carlo et l’orchestre de Radio France. Autour de l’histoire simple d’un amour à sens unique, Sinivia ne nous laisse aucun répit entre chants, danse, projections vidéo et solos.
La mise en scène est sans cesse émaillée de clin d’œil. Son idée maîtresse de travailler avec différentes échelles est réussie tout en mettant en valeur les 5 rôles titres dans un décor champêtre.
Francesco Demuro a remplacé au pied levé le ténor René Barbara dans le rôle de Nemorino
Certes c’est la cinquième ou sixième fois qu’il chante dans l’Élixir d’amour mais il n ‘avait jamais travaillé dans une mise en scène d’Adriano Sinivia .
Il l’a fait visiblement avec plaisir tant il nous a régalés hier soir au point d’être bissé pour cette fameuse « urtiva lagrima» qui est sans conteste un des airs les plus connus du répertoire d’opéra.
Dès aujourd’hui il repart pour Berlin pour «Les pêcheurs de perles» Sans état d’âme ! Ainsi va la vie d’un grand artiste entre disponibilité et générosité.
Légèreté, gaîté et professionnalisme
On est admiratif de la maîtrise aussi bien vocale que physique des artistes. Tout est étudié, le moindre déplacement, grimace et gestuelle et pourtant on sent que tout le monde s’amuse sur scène et dans la fosse de l’orchestre.
Bref, un élixir salutaire et jubilatoire à défaut d’avoir d’autres vertus revendiquées.
L’Elisir d’amore de Donizetti a été donné vendredi 8 juillet aux Chorégies d’Orange à 21h30. Plus de 7 000 personnes étaient venues applaudir cet opéra qui a enthousiasmé le public.