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Carrière de Boulbon, Le lieu où s’éveille le jardin des délir(c)es

Copyright Christophe Raynaud de Lage

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Une mise en abyme étonnante
On dirait….Nous dirions que l’on arrive dans une carrière qui s’appelle carrière de Boulbon. On dirait qu’on la découvre ou qu’on la redécouvre après 6 ans d’absence.  Qu’il y flotte encore les grands noms ayant investi ce lieu mythique de Bartabas à Peter Brook en passant par Israël Galvan.     

On y arrive en bus, un peu chaotique. On connaît ou pas son voisin. L’émotion est dans l’air, chaud, alourdi par le chagrin des souvenirs : l’an dernier La Montagnette a brûlé. On écoute les dernières recommandations : horaires à respecter pour les navettes de retour et cigarettes interdites.

On irait ensuite s’asseoir sur les gradins qui n’ont guère changé. On embrasse d’un regard ce plateau naturel, nu et cette falaise qui nous accueille. Il n’y a aucun doute : la Carrière de Boulbon sera bien le personnage principal de ce qui va se jouer ce soir.

Et le spectacle commence
On voit arriver un bus blanc chaotique poussé par des personnages improbables qui viennent aussi pour un spectacle,  un enterrement, un séminaire, un stage ? Est ce une communauté hippie ? Des spectateurs du In ? L’imaginaire du spectateur s’active. Ils viennent d’échouer dans un désert, ils commencent à s’organiser, à s’émanciper des directives doucereuses assénées au micro. Ils font ce que nous n’osions faire : nous approcher, toucher la terre, errer sur cette scène sableuse, combler le lieu d’objets farfelus, investir l’espace de poésie et de chansons, prendre des postures farfelues, gambader, s’éviter, s’accoupler.

Dans cette succession de scènes à la fois loufoques et sidérantes, nous cherchons notre alter égo, notre âme sœur. Est-ce ce qu’on appelle la fameuse catharsis au théâtre ?

Une place privilégiée
Le triptyque de Bosch,  220 × 386 cm , collection permanente du musée du Prado à Madrid suscite le même engouement que La Joconde et du coup la même contrainte : rendez-vous, file d’attente, temps contraint de visite. Autant dire que vu les détails à observer, les scènes à identifier, les propos ésotériques à comprendre ou à interpréter – Enfer, paradis, fin du monde ou dystopie – le spectacle de Philippe Quesne – même si le tableau n’est qu’un point de départ de création au même titre   que la Carrière de Boulbon – nous offre la liberté de rêver notre vie passée et à venir.

Une expérience sensorielle et sensible qui défient les éléments de la nature
Tous les éléments ? Non. L’eau y est absente à la différence du tableau de Bosch où elle y est omni présente. Pendant 2 heures la sécheresse est partout , dans l’air et le sol retourné. Quand les éléments se déchaînent – fabuleux orage sur la falaise – les tensions peuvent enfin se relâcher malgré l’éminence d’une apocalypse. Et s’il suffisait de recommencer ? D’apprendre de nos erreurs. Est ce trop tard ?

Des délices à la délectation
Nous sommes prêts à remonter dans notre bus, les langues se délient un peu plus qu’à l’aller. Trop long pour quelques uns, trop abscons pour d’autres, sans intérêt pour certains. Il n’empêche, on y était sans regret, avec délice et délectation.

Le Jardin des déli(r) ces. Jusqu’au 18 juillet. Relâche le 13. 10 à 40€. 21h30. Carrière de Boulbon. Navette. 6€ aller/retour. Festival-avignon.com

Copyright Christophe Raynaud de Lage
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