Le Musée Angladon propose l’exposition ‘Curiosité, Voyage dans nos réserves’, rythmée par plus de 80 objets, sculptures, dessins, estampes et céramiques. Le musée propose une déambulation à travers les 18e, 19e et 20e siècles, emportant le visiteur au gré des grandes transformations sociales, urbaines et artistiques. A voir jusqu’au 3 novembre 2024.
Le Musée Angladon abrite des œuvres exceptionnelles achetées par Jacques Doucet comme ‘Les deux danseuses’ de Jacques Degas, ‘Wagons de chemin de fer à Arles’ de Van Gogh, ‘Le couple’ de Picasso, ‘Nature morte au pot de grès’ de Cézanne, ‘Portrait de femme’ dit ‘La blouse rose’ de Modigliani, ‘Paysage de neige à Louveciennes’ de Sisley.
Enfant accroupi. Chine. 18e siècle. Copyright Fabrice Lepeltier
L’exposition est organisée en quatre parties
ou voyages regroupés par thème. La première d’entre-elle fait la part belle au 18e siècle avec dessins et pastels. On découvre ainsi les délicates et fragiles sanguines de François Boucher, un portrait de femme attribué à Jean-Michel Liotar, une étude pour l’Accordée du village de Jean-Baptiste Greuze ou encore un portrait de fillette attribué à Louis Roland Trinquesse.
Arts décoratifs et arts de la table
Nous sommes là projetés dans le life style du 18e siècle, cette fois dans les arts décoratifs et un luxueux art de vivre où élégantes faïences, porcelaine blanche à décors or et polychrome d’époque Louis XV en provenance de la manufacture de la reine enchantent les intérieurs nobles et bourgeois. Le voyage est là qui s’immisce au gré de ces chenets en bronze doré ornés d’un personnage chinois tenant une longue vue et un globe terrestre. L’époque nous indique là être captivée par les mystères du Cosmos.
Le goût pour les chinoiseries
Evoque la curiosité pour une Orient fantasmée au gré de cette statuette représentant un enfant accroupi en céramique vernissée turquoise, un impressionnant masque de Nô du Japon, des estampes dont une grande vague d’Hokusaï.
Jean-Baptiste Greuze. Etude pour l’accordée du village. Copyright Alexandra de Laminne
19e et 20e siècle, les progrès de la modernité
Cette entrée dans la modernité débute par un manteau de soirée créé en 1900 par Jacques Doucet pour ensuite admirer les sculptures de nus féminins de Charles Despiau. L’époque est à la fascination pour les courbes féminines, à la vénération et au désir comme avec ‘l’Incantation’, une illustration de Félicien Rops et aussi ‘Son altesse la femme’ d’Octave Uzanne. Puis apparaissent la métamorphose des villes comme Londres et Paris dont s’imprègnent des graveurs nommés Auguste Lepère ou Edgar Chahine.
Enfin,
l’exposition s’achève sur le modèle féminin, les classes de danse, des portraits préfigurant peut-être le début de l’émancipation féminine symbolisée par le portrait d’une femme papillon prête à prendre son envol, œuvre réalisée par le graveur Mario Fortuny.
Coupe à compartiments. Chine. 18e siècle. Copyright Fabrice Lepeltier
En savoir plus
Jacques Doucet
Est une personnalité de la vie artistique et littéraire parisienne des années 1880-1920. Il fonde à Paris l’une des premières Maisons de Haute couture. Il fait fortune en habillant une riche clientèle d’actrices et de femmes du monde dont Réjane, Sarah Bernhardt, Liane de Pougy, la belle Otéro. Il forme Paul Poiret et a pour assistante Madeleine Vionnet. Amateur d’art passionné, il constitue tout d’abord une importante collection d’objets d’art consacrée au XVIIIème siècle : tableaux, dessins, sculptures, œuvres d’ébénisterie et de marqueterie, estampes et livres. En 1912, il vend une grande partie de cette première collection à la suite de la mort tragique de la femme qu’il aimait en secret. Conseillé par Henri-Pierre Roché ou André Breton, il se lance alors dans une nouvelle collection, dédiée cette fois-ci aux artistes de la modernité : Sisley, Manet, Brancusi, Cézanne, Degas, Van Gogh, Matisse, Picasso… En 1924, il est le premier acquéreur des Demoiselles d’Avignon de Picasso. Il devient également mécène pour les écrivains et poètes de son temps, comme Suarès, Aragon, ou Breton.
Léon Dubrujeaud (1845-1920) et Marie Doucet (1854-1937)
Léon Dubrujeaud est le mari de la sœur de Jacques Doucet, Marie. Diplômé de l’Ecole des beaux-arts de Paris, entrepreneur de travaux publics, président de la Chambre de Commerce de Paris, il partage avec son épouse et son beau-frère un intérêt pour les arts du papier et les objets attestant d’un certain luxe de vie. Il acquiert volontiers de l’estampe de son temps, par Fantin-Latour, Forain ou Steinlen, souvent directement auprès des artistes eux-mêmes. C’est aussi un remarquable bibliophile qui soutient financièrement certaines éditions d’art particulièrement coûteuses.
Les deux fils de Léon et Marie,
André et Jean, grandissent dans cet univers raffiné. Poète à ses heures, André Dubrujeaud (1877-1915) es attaché de conservation au Musée des arts décoratifs. Il décède, jeune soldat, d’une pleurésie. Plusieurs lettres montrent que le chagrin familial est immense. Jean Dubrujeaud (1880-1969) est diplômé de la Haute École de commerce de Paris et, sur le papier, industriel. Il endosse plus volontiers le rôle de gestionnaire de fortune, conseillant la veuve de Jacques Doucet, jouant les intermédiaires dans certaines ventes de tableaux, et héritant lui-même en 1937 d’une fortune colossale. Il a un fils naturel, Jean, d’une lingère, Marie-Félicie Angladon, installée dès 1927 à Avignon.
Jean Angladon (1906-1979) et Paulette Martin (1905-1988)
Jean Angladon-Dubrujeaud (Jean Angladon de son nom d’artiste), est le petit-neveu de Jacques Doucet. Il rencontre Paulette Martin aux cours des Beaux-Arts d’Avignon. Ils se marient en 1932. Tous deux artistes et amateurs d’art, ils développent chacun un travail de peinture, de gravure et d’illustration. Ils collaborent notamment avec l’éditeur Pierre Seghers pour les premiers numéros de la revue Poètes casqués. Ils exposent régulièrement et s’inscrivent dans la mouvance de l’école d’Avignon, du groupe des Trente et du nouveau groupe des Treize, aux côtés de Chabaud, Chartier, Lesbros. Ce sont aussi de grands voyageurs, des lecteurs insatiables, curieux de tout, rassemblant nombre de souvenirs de voyages, photos, cartes postales, et constituant une riche bibliothèque. Ils enrichissent les collections grâce à de nombreuses acquisitions de peintures, sculptures et meubles, avec une attention particulière pour les 15e, 16e et 17e siècles. Reconnu par son père quelques années plus tôt, l’héritage que Jean Angladon en reçoit en 1969 modifie totalement sa vie.
La Fondation Angladon-Dubrujeaud
Sans descendance, Jean Angladon et Paulette Martin sont habités par la volonté de partager avec le grand public les merveilles que la famille conserve depuis deux générations. Ils décident de créer un musée d’art, et choisissent ensemble, en 1978, l’édifice de la rue Laboureur, qui devient leur demeure. Après la mort de Jean Angladon, il revient à son épouse seule de déployer une énergie considérable pour parvenir à mettre en œuvre ce projet. Elle désigne la Fondation de France comme exécutrice testamentaire, lui demandant de créer et faire connaître la Fondation Angladon-Dubrujeaud qu’elle désigne comme son héritière universelle. Le Musée Angladon ouvre ses portes au public le 15 novembre 1996. Il doit son nom à ses fondateurs.
L’exposition Curiosité. Voyage dans nos réserves bénéficie du soutien de partenaires et mécènes :La Banque populaire Méditerranée, Emile Garcin propriétés et le spécialiste des transports de voyageurs haut de gamme depuis 1875 Lieutaud.
Les infos pratiques
Musée Angladon– Collection Jacques Doucet- 5 rue Laboureur 84000 Avignon – Horaires : jusqu’au 31 octobre du mardi au dimanche de 13h à 18h. Le musée est entièrement accessible aux personnes à mobilité réduite. accueil@angladon.com. +33 (0)4 90 82 29 03.