Il est des itinéraires moins connus qui séduisent randonneurs et pèlerins par leur côté plus confidentiel. C’est le cas, depuis Genève, des Via Gebennensis (GR 65), qui traverse les Pays de Savoie, et Lugdunum, qui transite par l’Ain, pour rejoindre le Puy-en Velay.
446 000 ? C’est le nombre de pèlerins ayant reçu la Compostela (certificat délivré par le bureau des pèlerinages ) à leur arrivée à Saint-Jacques-de-Compostelle, en Galice (au nord-ouest de l’Espagne), en 2023, selon l’association Rhône-Alpes des Amis de Saint-Jacques. Un nombre en pleine expansion : ils étaient seulement 2 900 en 1987, 55 000 en 2000, 100 000 six ans plus tard et 327 400 en 2018, dont 8 800 Français.
Depuis quelques années, et en particulier depuis la crise sanitaire, l’itinérance a le vent en poupe. La fréquentation grandissante des chemins de Compostelle, que les randonneurs parcourent à pied pour 93 % d’entre eux, en est une parfaite illustration. On croise sur le sentier des hommes, des femmes et des enfants de tous âges et nationalités, seuls, en couple, en famille, entre amis… à la recherche d’une expérience authentique, d’un voyage intérieur, d’une parenthèse hors d’un quotidien envahissant, ou tout simplement de moments de communion avec la nature.
Si la Via Podiensis, qui part du Puy-en-Velay (Haute-Loire), inscrite pour partie au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1998, est la plus fréquentée des quatre grandes voies françaises* qui convergent vers l’Espagne, il est des itinéraires situés en amont moins connus, qui commencent à séduire les pratiquants en quête de parcours plus confidentiels, à la fréquentation plus modeste.
En Pays de Savoie, la continuité de la Via Jacobi
Dans l’est de la France, la Via Gebennensis (GR 65) et la Via Lugdunum, qui, au départ de Genève rejoignent Le Puy-en-Velay, font partie intégrante de ces parcours plus secrets, balisés avec la fameuse coquille jacquaire jaune sur fond carré bleu. Ils traversent notamment la Haute-Savoie et la Savoie pour le premier, ou l’Ain pour le second.
« La Via Gebennensis s’inscrit dans la continuité de la Via Jacobi qui arrive d’Allemagne et de Suisse », explique Hubert Courtial, fondateur de l’agence Espace Évasion qui propose ce circuit dans son offre de voyages à pied ou à vélo. Un circuit qu’il connaît bien, et pour cause : le chemin traverse le village de Beaumont (Haute-Savoie), siège de son entreprise !
Sur sa partie en Pays de Savoie, décrit-il, « cet itinéraire est particulièrement varié. Après avoir quitté les bords du Léman, il longe le mont Salève vers le col du mont Sion, avec de belles échappées sur le lac et le Jura. Il traverse des paysages de collines rurales vers Frangy, de vallons agricoles sur les hauteurs de Seyssel, de vignobles vers Jongieux… Il s’attarde aussi en route sur les berges du Rhône et termine sa partie savoyarde par un profil un peu plus montagneux avec le mont Tournier (877 m). Puis il rejoint Saint-Genis-sur-Guiers, célèbre pour sa brioche aux pralines, avant de basculer en Isère puis dans la Loire et d’atteindre la capitale du Velay. »
Ce bel itinéraire s’étire sur 115 km environ, pour 2 300 m de dénivelés positifs cumulés sur cette partie savoyarde, et rappelle à Hubert Courtial les « chemins noirs » de Sylvain Tesson, par le côté méconnu des sentiers empruntés.
Ain : un parcours restauré en 2014
Au départ de Genève, un parcours a également été restauré, il y a dix ans, dans l’Ain, par l’association Rhône-Alpes des Amis de Saint-Jacques : « Cette première partie de la Via Lugdunum s’inspire d’un ancien itinéraire jacquaire attesté dans le manuscrit compostellan du XIIe siècle, le Codex Callixtinus », explique la structure dans le guide pratique consacré à cette voie.
Plus sauvage encore que la précédente, et non classée “chemin de grande randonnée”, elle traverse ce département sur 167 km, moyennant environ 2500 mètres de dénivelé positif cumulé (le principal étant concentré sur le début du parcours, entre Genève et Nantua). L’occasion de découvrir, au passage, les paysages de moyenne montagne du Jura Sud, la cluse de Nantua et son lac, les vignobles et collines escarpées de Cerdon, la vallée de l’Ain, la côtière du Rhône, le village médiéval de Pérouges… avant de rallier Lyon puis Le Puy-en-Velay via les monts du Lyonnais et du Forez.
Ces deux itinéraires millénaires chargés d’histoire et de spiritualité permettent ainsi aux pèlerins comme aux randonneurs de sortir des sentiers (jacquaires) battus. Depuis le début de cette année, la via Gebennensis fait d’ailleurs partie des trois chemins de grande randonnée de Saint-Jacques-de-Compostelle situés en Auvergne-Rhône-Alpes, en amont du Puy-en-Velay, valorisés dans le cadre du plan tourisme régional, avec Cluny-Le Puy (GR ® 765) et Lyon-Le Puy (GR ® 765).
* Au départ de Tours, Vézelay (en passant par Limoges), Le Puy-en-Velay et Arles (en passant par Toulouse).
En savoir +
Association Rhône-Alpes des Amis de Saint-Jacques :
www.amis-st-jacques.org
Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme :
www.auvergnerhonealpes-tourisme.com
par Hélène Vermare, Groupe Ecomédia membre du Réso Hebdo Eco