En pleine mutation, l’Agriculture Méditerranéenne attend de pied ferme la venue de la ministre demain au Salon Med’Agri qui se tient au parc des expositions d’Avignon jusqu’à demain.
Dès l’entrée dans le Hall L, on tombe directement sur le stand de la Coordination Rurale aux couleurs des gilets jaunes avec ses slogan-choc : » Sans paysans, demain c’est la faim », « Cultivons l’indépendance, récoltons la liberté », « Stop aux importations massives qui ne respectent pas nos normes ».
« Nous sommes les nouveaux pauvres. »
Caroline Lecanuet, présidente de la Coordination 13 à Eguilles
Caroline Lecanuet est la présidente de la Coordination 13 à Eguilles : « Demain, lors de la visite de la Ministre de l’Agriculture, nous avons une minute et demi pour poser une question. La mienne ce sera : « Quel est votre modèle de ferme de demain : pérenne, agronomique, indépendante ou mondialisée ? On a de plus en plus d’aléas climatiques, de normes qui se superposent, de revenus qui baissent. Nous sommes les nouveaux pauvres, le maillon faible de la société. On a l’agriculture la plus vertueuse de la terre et pourtant, on trinque ».
Christian Convers est lui aussi membre de la Coordination Rurale mais en Savoie : « On nous traite de gens violents, c’est faux, nous sommes déterminés. On en a assez des traités de soi-disant libre-échange comme le Mercosur (Marché commun qui réunit l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, le Venezuela et l’Uruguay) qui abaisse les droits de douanes et provoquerait un afflux de marchandises bon marché en provenance de ces pays où la main-d’oeuvre et la qualité des produits n’ont pas les mêmes barêmes que les nôtres. ». Il précise : « La nouvelle ministre qui était à la radio ce matin, compatit à notre faible niveau de vie, à la maltraitance animale, à l’agri-bashing que nous subissons. Mais elle n’a pas de baguette magique ».
ketch-up ‘Made in Tarascon
Un peu plus loin, se dresse le Carré des MIN (Marchés d’Intérêt National d’Avignon, Cavaillon, Châteaurenard et Marseille) qui reçoit la visite de Cécile Helle, maire d’Avignon. Elle tient dans la main un flacon de ketch-up ‘Made in Tarascon’, « Bien moins riche en sucre et en sel, on pourrait l’utiliser dans les cantines scolaires de la ville ou dans la restauration des hôpitaux et de EHPAD. »
Laetitia Vinuesa directrice d’ECOMIN, à l’angle de la Rocade et de la rue Pierre-Semard précise : « Nous avons beaucoup de visites depuis hier, étudiants, fournisseurs, producteurs d’agro-alimentaire, de semences, . Nous avons sur le site du MIN une brasserie artisanale, un glacier, un boulanger, un pâtissier. Nous sommes le symbole des circuits courts, de l’agriculture locale et de la qualité des fruits et légumes de Vaucluse ». D’ailleurs, deux chefs réputés, Christian Peyres et Michel Meissonnier cuisinent dès 10h du matin des verrines de champignons de Paris et des caillettes dont le fumet attire un monde fou dont la Maire d’Avignon.
Parmi les exposants aussi, des concepteurs de tracteurs, d’engins immenses comme Pellenc, Mac Cormick ou Lamborghini. L’écurie transalpine ne fabrique pas que des bolides filant à 350km/h avec son V 12 atmosphérique.
Une conférence dans l’Espace de Masterclass animée par François Bérud et Nathalie Portet de la Chambre d’Agriculture sur le thème : les variétés résistantes aux maladies de la vigne, « Il serait préférable de dire plutôt ‘tolérantes aux maladies fongiques’ précise-t-il. Ces cépages qui s’appellent Floréal, Vidoc, Prior, Carbon, ils demandent du temps long pour castrer la grappe, pour polliniser les pépins avec un pinceau, pour comparer, croiser, tester, sélectionner, ce que nous faisons dans le Vignoble Expérimental de Piolenc. Cela peut prendre 10 à 15 ans ».
Un peu plus loin, place à « Gautier Semences » basée à Eyragues, une entreprise familiale née en 1952 et aujourd’hui installée dans un bâtiment flambant-neuf et fonctionnel en forme de serre, avec plus de 1500 m2 de laboratoires de recherche et bureaux. Gautier Semences qui va recevoir l’un des Prix de l’Innovation 2024 de Med’Agri 2024 pour une « Gamme de courgettes parthénocarpiques ». Ce qui, en mots simples, signifie que ces légumes se forment sans pollinisation des fleurs femelles. En plus, le rendement est élevé et le légume résiste bien à l’oïdium.
A la fin de la visite, entre les travées des différents halls de Châteaublanc qui vont recevoir plus de 15 000 visiteurs pour cette 4ème édition, on tombe sur le président de la Chambre Régionale d’Agriculture affairé. André Bernard en grande discussion avec les services de la Préfecture de Vaucluse, pour caler la visite de la ministre de l’agriculture, Annie Genevard, jeudi matin à Châteaublanc. Le circuit qu’elle fera dans le Salon, les représentants des filières et des syndicats agricoles qu’elle rencontrera pour prendre le pouls d’un monde en crise depuis des mois, sans qu’une réponse précise n’ait été apportée par l’Etat à toutes ses préoccupations, dans un secteur où, tous les deux jours, un paysans se donne la mort.