Tous les territoires rêvent d’être des terres d’accueil pour le grand ou le petit écran. On a tous en mémoire des films, des téléfilms ou des séries qui ont contribué à façonner l’image d’une ville ou d’une région. Mais, la production et l’exploitation d’images animées c’est aussi une vraie industrie avec des enjeux économiques et géopolitiques de premier plan. Et tout le monde veut être dans le film…
Le Sud et le cinéma : une longue histoire d’amour
Ce n’est pas une surprise que de dire qu’en matière d’images, il y a des terres plus attractives que d’autres. C’est le cas notamment de la Provence et du Vaucluse. Souvent, ce sont des lieux où les touristes et les voyageurs s’y précipitent aussi. Tout cela pour vous dire que les départements situés sur l’arc méditerranéen sont souvent le théâtre (pardon pour le mauvais jeu du mot) de fictions cinématographiques et télévisuelles. Les paysages et la lumière de Provence attirent les cinéastes, comme elles ont attiré les peintres ou les écrivains.
Rendons à César (celui de Pagnol bien sûr) ce qui lui appartient : un des tout premiers films de l’histoire du cinéma* a été tourné en Provence. Il date de 1895 et on le doit à Louis et Auguste Lumière. Il s’agit de la célébrissime « Arrivée d’un train en gare de La Ciotat. » Et contrairement à la légende, les gens ne se sont pas enfuis au fur et à mesure que le train approchait… Faut pas prendre les provençaux pour des fadas. Soyons sérieux. Quand même.
La Provence premier pôle de production cinématographique… après Paris !
La terre de Provence a ainsi été très rapidement le deuxième pôle français de productions cinématographiques après la région parisienne. Plusieurs grands studios s’y sont rapidement construits. Le premier, dés 1916, par la société Phocéa-Film dans le quartier de Croix-Rouge à Marseille. En 1919, c’est l’inauguration des studios de la Victorine à Nice. Ces studios, à l’histoire particulièrement mouvementée, sont aujourd’hui la propriété de la ville de Nice. A la grande époque, de célèbres et d’importants films y ont été tournés : « Les visiteurs du soir » de Marcel Carnet, « Et dieu… créa la femme » de Roger Vadi , « Mon oncle » de Jacques Tati, « La nuit américaine » de François Truffaut. Les studios de la Victorine sont encore aujourd’hui en activité.
En 1938, à Marseille, Marcel Pagnol installe ses premiers studios dans la rue Mermoz avant de migrer, pour plus grand, dans le domaine de la Buzine, qu’on peut aujourd’hui visiter. Paul Ricard (le Môsieur du Pastis) se lança également, en 1950, dans le cinéma en créant sa propre société de production (Protis) et en construisant des studios (un peu sur les cendres de ceux de Pagnol). Il mettra fin au film à l’aube des années 60.
Plus récemment en 2004, sur les friches d’une ancienne manufacture de tabac, Marseille a créé les studios de la Belle de mai qui se sont fait connaître avec la production de la presque inusable série « Plus belle la vie ! ». La liste ne serait pas complète sans mentionner Provence Studios à Martigues. Et le Vaucluse dans tout cela ? Un second rôle qui ne demande qu’à devenir tête d’affiche, c’est en tout cas la volonté du département, qui vient de confier à des spécialistes le soin d’y réfléchir et de faire des propositions.
Un puissant vecteur d’images
La production audiovisuelle, c’est un peu pour les territoires une sorte de couteau suisse. Ça peut servir à beaucoup de choses. C’est tout d’abord un moyen de montrer le territoire. De le mettre en scène. L’image de la Provence serait-elle celle qu’on connait aujourd’hui sans l’œuvre de Pagnol (écrite et cinématographique) ?
De la même manière, que serait aujourd’hui Saint-Tropez sans le cinéma, ses stars, voire ses gendarmes ? Quand à Marseille, c’est à la fois Marcel Pagnol, Jean-Pierre Melleville et Robert Guéguidian.
Un outil de développement économique
L’audiovisuel c’est un secteur économique important. Outre les retombées de l’activité des studios ou de l’accueil des équipes de tournages, la production c’est aussi de l’emploi en local. Mais pour cela des filières de formation adaptées sont nécessaires, et il faut savoir les développer, les organiser et les soutenir.
Et parfois… c’est aussi le jackpot comme la région Nord-Pas-de-Calais avec le film « Bienvenue chez les ch’tis ». En misant 300 000€ (une avance remboursable si le film rentrait dans ses frais et sur la base de 10% de la rémunération nette du producteur) la région est vite rentrée dans ses frais. Et avec l’exploitation des droits du film sur d’autres supports la région a touché 2,3M€ supplémentaires. Mieux que le casino de La Napoule.
Forcément ça donne des idées… de films.
*Le tout premier ayant été, la même année, « La sortie de l’usine Lumière à Lyon »
Ancien directeur général et directeur de la rédaction de Mirabelle TV (télévision régionale en Lorraine), Didier Bailleux a été auparavant consultant dans l’audiovisuel et à travaillé sur plusieurs projets : TNT, SVOD, services en ligne, création de TV locales. En tant que directeur marketing, il a participé, dans les années 1990 et 2000, à la création de plusieurs chaînes thématiques : Canal J, Voyage et Pathé-Sport. Aujourd’hui, il vit en Vaucluse et travaille sur la production de documentaires consacrés aux terroirs.