Nikson Pitaqaj, Sébastien Benedetto respectivement directeur délégué et président d’Avignon festival et compagnie (AF&C) et Victor Quesada Perez vice-président des compagnies ont fait un pré-bilan chiffré de cette 55e édition du festival Off qui a lieu du 7 au 31 juillet 2021. L’année 2021 fait écho à 2012 en termes de chiffres. Pas folichon mais pas non plus désastreux, à condition, cependant, que la Covid 19 se calme d’ici l’été 2022.
Alors que l’inquiétude régnait pour ce festival d’Avignon, Nikson Pitaqaj a évoqué un festival apaisé dans une étrange époque faite d’incertitudes. Ce qui étonne ? Toutes les disciplines –théâtre jeune public, contemporain, classique, humour et tutti quanti étaient bien au rendez-vous. «Un festival exceptionnel par sa diversité,» a tenu à souligner le directeur délégué d’origine kosovare. «Tout, le programme, le site, l’appli, a été difficile à mettre en place dans une période très courte mais notre projet est de soutenir les artistes avant tout, notamment via le fonds de soutien et les Eco packs (mutualisation de l’impression des affiches).
Les chiffres de 2019 viennent en écho à ceux de 2012
«Je ne sais pas si nous avons été héroïques –je fais là un clin d’œil à notre grand frère (Le festival d’Avignon)- s’est amusé Victor Quesada-Perez, mais un grand merci à ceux qui ont porté le festival et au public bienveillant. Le bilan est positif. La dernière année où nous avions ces mêmes chiffres : 1 000 spectacles et à peu près autant de cartes d’abonnement public -36 342 cette année- était en 2012 ! Ce n’est pas glorieux mais nous sommes retombés sur nos pattes !»
Coup d’arrêt et dates qui s’entrechoquent entre le Off et le In
Nikson Pitaqaj relève que le festival, la première semaine, a démarré très fort. Une dynamique qui se trouvera stoppée net, le 12 juillet, lors de l’annonce du Gouvernement de la mise en place du Pass sanitaire à partir du 21 juillet. Son sentiment ? «Il me semble que les spectateurs qui ont acquis la carte d’abonnement sont allés voir plus de spectacles qu’en 2018 et 2019.» Côté Village du off «Si celui-ci a nettement été moins fréquenté en journée, les soirées, après 23h, ont été très suivies.»
Le temps des regrets
«La dernière semaine du festival s’annonce difficile avec peu de public dans les salles, détaille Nikson Pitaqaj. Un fait corroboré par la fin du festival d’Avignon qui a eu lieu le 25 juillet –et débuté le 5- et qui impacte le festival off. Je regrette l’annonce du Pass sanitaire et l’arrêt du Festival d’Avignon une semaine avant la fin du festival off. Beaucoup de lieux ne peuvent pas être mis en place la première semaine de juillet en raison des vacances scolaires. Je pense, à titre personnel, qu’il serait mieux de concevoir un festival in et off aux mêmes dates, car il est important de travailler ensemble, particulièrement en ces temps difficiles.»
La difficulté de la dernière semaine de juillet
«Proposer des spectacles lors de cette dernière semaine de juillet a été souhaité par les théâtres comme les compagnies, relève Sébastien Benedetto, même si l’on sait qu’elle connaît un fléchissement du public. Mais nous votions en novembre et peut-être avons-nous fantasmé un festival différent parce que les compagnies étaient exsangues. Un mois de juillet sans les contrôles des Pass sanitaire. Les compagnies avaient aussi besoin de réaliser leurs cachets car 22 dates ce sont 22 cachets. Ce n’est pas l’annonce du 12 juillet –du Pass sanitaire- qui nous a fait mal mais celle du 15 juin qui promettait un été sans masques et presque sans contraintes. Nous étions tous prêts à jouer avec 65% de jauge.»
Une exception ?
Une compagnie présente à la conférence de presse relève : «Lors de cette dernière semaine de juillet, nous faisons le plein avec les Avignonnais et des personnes qui ne sont jamais venues au théâtre ! Certains publics ne savent ni lire ni écrire et, pourtant, pour la 1er fois et maintenant, ils viennent au théâtre ! Je n’avais jamais vu cela auparavant, dans ma vie !»
Pas d’accord !
«La décision des dates du In n’est pas réfléchie ni démocratique, elle n’est pas concertée avec les collectivités territoriales, entame Victor Quesada Perez. Elle vient de quelques personnes. Ne faudrait-il pas se mettre autour d’une table pour entamer une réflexion de territoire ? Il n’est pas normal que les commerçants, restaurateurs se retrouvent cette dernière semaine sans clients.»
Un gouvernement très présent et aidant
Nikson Pitacaj s’est félicité de la célérité des institutions à venir en aide aux compagnies, notamment la Direction générale de la création artistique, la Direction régionale des affaires culturelles et le préfet de Vaucluse qui ont annoncé la mise en place d’un fonds provisionnel pour les compagnies –géré par AF&C- qui participe au festival off et qui viendra compenser les éventuelles baisses de recettes de billetterie causées par la mise en place du Pass sanitaire. Cette aide exceptionnelle à destination des artistes et techniciens du off sera accompagnée d’autres mesures de soutien avec la revalorisation du Fonceps (Fonds national pour l’emploi pérenne dans le spectacle), la perte d’exploitation des lieux et la création du fonds spécial du off. Objectif ? Que les artistes, auteurs et techniciens soient payés et cela dans les meilleurs délais.
Mise au point
«Si nous avons eu un festival apaisé c’est que nous avons eu un festival raisonné et raisonnable, a observé Victor Quesada Perez, avec moins de créneaux dans les salles, ce qui a permis de prodiguer un meilleur accueil aux artistes, de monter sur scène en ayant pris le temps de se concentrer auparavant. Je pense qu’il faut revenir à une taille et à un nombre de spectacles raisonnables. C’est le travail d’accompagnement que nous devrons réaliser envers les théâtres et les compagnies.»
AF&C
«Avignon festival & compagnie n’est pas facile à gérer, mais on y arrive a confié Nikson Pitaqaj. Je voudrais que nous ayons plus de temps pour travailler et moins de polémique. A propos de l’affichage, le directeur délégué AF&C a développé sa pensée expliquant qu’il n’était pas contre l’affichage mais pour une visibilité plus égalitaire des affiches, notamment pour les petites compagnies qui font les frais de l’affichage, la ville souhaitant également réguler la pose d’affiches avec des endroits dédiés.»
«Nous travaillons, avec le ministère de la Culture, à trouver une solution d’accompagnement des théâtres et du modèle économique par rapport à la baisse du nombre de créneau», a précisé Sébastien Benedetto.
AF&C et la Fédération des théâtres indépendants
A la question des relations entre AF&C et la Fédération des théâtres indépendants Sébastien Benedetto remet les pendules à l’heure :«Nous ne sommes pas dans la recherche de problèmes mais plutôt de solutions, comme de fonds d’aide à l’accompagnement. Ils jouent leur rôle de syndicat de théâtres privés qui ne représente qu’une partie du festival. Nous, nous représentons tous les acteurs –très différents- du off.»
«Le festival off reflète la richesse de la France, remarque Nikson Pitaqaj, sa complexité, toutes les fédérations et syndicats qui gravitent autour d’AF&C sont les bienvenus car ils défendent des intérêts plus pointus. Ils sont là pour nous pousser à nous améliorer, à corriger des erreurs. Ils nous permettent des remontées de compagnies, de structures de production, de théâtres. Ce sont des partenaires.»
Retrouvez dans le prochain article Pré-Bilan du Off, tous les chiffres connus à ce jour.